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 JEAN LUC GODARD

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Bridget




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MessageSujet: JEAN LUC GODARD   JEAN LUC GODARD EmptyLun 17 Mai - 0:55

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En attendant Godard...........


'FILM SOCIALISME' A CANNES - UN CERTAIN REGARD


Alexandre Prouvèze pour Evene.fr - Mai 2010


Poétique et politique, l'oeuvre de Jean-Luc Godard l'est de part en part. D'ailleurs, son nouvel opus, 'Film Socialisme', annonce clairement la couleur, quelque part entre rouge et noir. Mise au point sur JLG, avant qu'il nous découvre ce que l'avenir a en réserve.

Le sort de Jean-Luc Godard est émouvant et paradoxal. Son nom a beau être depuis longtemps synonyme de cinéma, la majeure partie de ses films reste malgré tout méconnue, difficile d'accès, souvent introuvable.
Bien sûr, un adolescent acnéique qui tomberait aujourd'hui sur 'Pierrot le fou' (1965) en restera certainement hilare ou bouleversé. Peut-être même les deux à la fois.
Mais tout de même, 'A bout de souffle' aura profondément marqué l'imaginaire collectif de son époque... sauf qu'il est sorti il y a un demi-siècle, et qu'entre sa période de gloire (culminant en 1967) et aujourd'hui, Jean-Luc Godard a sensiblement évolué. Le monde qui l'entoure également.

Du coup, pour aborder son nouveau 'Film Socialisme', présenté à Cannes – et sur Internet (1) – la veille de sa sortie officielle le 19 mai, quelques détours paraissent nécessaires : déjà pour lever un soupçon de snobisme trop souvent associé au réalisateur, mais surtout pour comprendre en quoi son cinéma continue de représenter un excellent sismographe du contemporain.

Dans un sens au moins autant idéologique qu'esthétique. Comme Godard l'a souvent affirmé : dans l'expression "politique des auteurs", forgée par les Cahiers du cinéma au milieu des années 1950, "on a retenu le mot auteurs... alors que l'important, c'était le mot politique".




Liberté pour le langage


Avec Godard, il faut d'abord envisager que tout langage (celui des mots comme celui des images), formant un système de signes, entraîne nécessairement un certain régime général de sens.
Ce régime peut être curieux, ouvert et pluriel, comme une oeuvre d'art ou un poème. Ou bien autoritaire, lorsqu'il tend à circonscrire les possibilités du langage à un sens unique – par goût de la coercition ou simple manque de vocabulaire.

Pour prendre un exemple, ce n'est pas tant pour leur vulgarité stylistique que les films de Michael Bay sont affligeants, que parce qu'ils confinent le spectateur dans une passivité contraignante, sans lui laisser le moindre espace de questionnement.

A l'inverse, si les films de Godard ont pu passer pour déstructurés ou confus, c'est simplement que le cinéaste franco-suisse a toujours refusé d'abuser des pouvoirs hypnotiques du langage cinématographique – dont les films d'Eisenstein, comme de Leni Riefenstahl, ont fourni des exemples marquants de propagande politique.

Alors, qu'il s'agisse d'un vieux polar futuriste comme 'Alphaville' (1965), ou d'un essai récent sur la misère de l'Europe ('Notre musique'), chacun de ses films met en garde, à sa manière, contre le risque de manipulation qui existe au fond de n'importe quel langage symbolique.
Aussi son apparent hermétisme relève-t-il d'une honnêteté scrupuleuse... qui n'a donc rien à voir avec une banale mystification pour intellectuels désoeuvrés.



Révolte en tout sens


La différence entre un film de Godard et une superproduction hollywoodienne paraît à peu près la même qu'entre un poème surréaliste et un discours d'Angela Merkel – ou une improvisation de John Zorn et un play-back de Lady Gaga.

Car la richesse de ses films vient du fait qu'ils incorporent leur propre critique, pour se remettre incessamment en jeu, au fur et à mesure de mises en abyme successives. Sans qu'on sache toujours pourquoi, d'ailleurs...

Seulement, l'enjeu n'est pas tant de déstabiliser le spectateur que de lui octroyer l'espace mental nécessaire pour libérer ses associations d'idées, de sensations, dans l'expérience d'un cinéma affranchi des attentes et normes usuelles.

Il faut cependant reconnaître que cette rébellion contre le système du cinéma – ou contre le cinéma du système –, Godard l'a souvent jetée à la face du public, dans l'espoir exigeant d'un écho de sa part.

Indéniablement, ses films cherchent bien la joute polémique, la dispute loyale, une prise de position tranchée et franche. Bref : un sursaut du débat politique, étouffé depuis trente ans par la prétendue mort des idéologies.

Bien que de plus en plus solitaire, Godard n'a ainsi cessé d'exhorter le spectateur à se tenir éloigné de tout confort de la pensée, et de toute soumission à un ordre, qu'il soit logique, conceptuel ou narratif.


Pour finalement interroger sa subjectivité à travers l'expérience des limites de son langage – quitte à préférer l'incompréhension, le risque ou l'échec, aux artifices d'un cinéma sans conscience. (2)
(1) Sur le site de VOD www.filmotv.fr
(2) Dans une longue et truculente interview accordée à Mediapart, Godard en vient justement à évoquer son projet d'un ultime film, point d'orgue à sa filmographie, dont le titre serait : 'La Fin du langage' (http://www.mediapart.fr/dossier/culture-idees/jean-luc-godard-en-liberte).



La culture sans dessous



Très tôt, Godard a donc fait sienne cette politique du détournement du sens, d'élargissement du langage, essentiellement à travers un usage disgressif du collage et de la citation.

D'abord de façon ostensible, souvent provocatrice, en entrecoupant un dialogue de bruits de moteur ou en optant pour un montage discontinu, une narration déviante.

Dès 1957, et le court métrage 'Une histoire d'eau' (coréalisé à 27 ans avec François Truffaut), Godard revendique ouvertement cet art de la digression, qu'il situe dans la lignée d'Aragon et de Pétrarque.

Mais avec le temps, ses collages sont devenus plus subtils, et unifient désormais les fragments hétérogènes dans une esthétique simple, presque monacale, loin des ruptures de ton compulsives de 'La Chinoise' ou de 'Pierrot le fou'.
Du coup, le réalisateur peut désormais paraître moins ironique. Parfois même funeste. Et pourtant, toujours aussi dense, un peu comme s'il tentait héroïquement de sampler l'ensemble de la culture occidentale, pour lui faire rendre gorge : littérature (Baudelaire, Balzac), philosophie (Wittgenstein, Benjamin, Castoriadis), histoire (Manceron et Michelet).

Mais aussi la peinture – avec une prédilection pour Velazquez et l'impressionnisme, ou la musique de Mozart et d'Arvo Pärt.

Jusqu'à la physique quantique, JLG s'obstine à brasser les sphères séparées du savoir, qu'il déshabille dans le boudoir de sa pensée sinueuse, et mélange sans fil conducteur, rebondissant selon son désir, à coups de jeux de mots plus ou moins improbables.

De telle sorte que sa parole, mettant les mots d'ordre en perspective (donc en désordre), rappelle en permanence qu'un discours sophistiqué n'est pas fondamentalement très différent d'un calembour. Ce dont l'art du contrepet sort auréolé d'un prestige assez réjouissant.


Le cinéma, une philosophie picturale


Bien sûr, certains de ses films ('Les Carabiniers', 1963, par exemple) ont moins bien vieilli que d'autres ; et tout, chez Godard, n'est pas nécessairement réussi.

Mais ça n'a jamais vraiment été la question. D'ailleurs, dès 1982, le cinéma lui paraît moribond : "Toi et moi, on est trop vieux. Et le cinéma va mourir bientôt, très jeune, sans avoir donné tout ce qu'il aurait pu donner. Alors il faut aller vite au fond des choses, il y a urgence", constate, parmi d'autres, un court métrage aussi beau que désabusé, 'Lettre à Freddy Buache'.

Le cinéma enterré, il ne restait donc plus à Godard qu'à "faire des films". C'est-à-dire gâcher de la pellicule, pour faire des essais de films. Ou bien des films en forme d'essais, comme un disciple de Montaigne armé d'une mini-caméra.

En cela, 'Film Socialisme' s'inscrit bien dans la lignée des méditations godardiennes des années 1990-2000. Et, plus particulièrement, à la suite de 'Notre musique' (2004), dont il partage le montage en triptyque, comme la problématique d'un déclin de l'Europe.

Chère civilisation crépusculaire : l'actualité semblant lui donner raison, Godard serait-il notre Cassandre à tête de vieux hibou, animal veilleur, scrutant dans la nuit ce qui échappe aux autres regards ?


Ces remarques faites, le désir de débattre de socialisme (ou pas) avec le dernier film de Godard ne doit pas faire oublier l'immense picturalité du cinéaste.

Qui, sous ses allures de philosophe foutraque, reste aussi un formidable paysagiste, qu'on peut voir avec autant de plaisir pour la rétine qu'une exposition de Monet ou Van Gogh. En somme, un lumineux signal d'alerte pour le cerveau, doublé d'un oeil de visionnaire. Dans les deux sens : un voyant. Autrement dit, le genre de type qui n'aura jamais besoin de Cannes pour avancer.

Alexandre Prouvèze pour Evene.fr - Mai 2010
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