Pourquoi la musique a le blues
Le marché du disque est en chute libre depuis le début du siècle. La musique a-t-elle perdu la guerre ou peut-elle rebondir ? D’où viendra l’espoir ?
Le Midem, le salon international de la musique ouvre ce vendredi à Cannes. Et franchement l’ambiance risque d’être morose car les chiffres présentés hier par les producteurs de disques démontrent que le marché français n’en finit pas de chuter. L’heure est-elle vraiment grave ?
Depuis le début du siècle, le marché français du disque a été divisé par plus de deux. On est aujourd’hui à peine à 600 millions d’euros. Les maisons de disque ont souffert. Les artistes ont souffert. Et les distributeurs aussi, on le sait bien, quand on regarde le sort de Virgin ou de la Fnac. Le pire pour le monde de la musique, c’est que l’industrie ne souffre pas parce que les gens n’aiment plus la musique. Au contraire, on en a jamais consommé autant. Non, la cause principale on l’a connaît : c’est le boom du numérique et du piratage qui est la principale cause du déclin.
La musique est au fond du trou. Mais a-t-elle une chance de rebondir ?
Avant de rebondir, il faut enrayer le déclin. Aujourd’hui on en est peut-être là, au point d’inflexion, car l’ennemi numérique est en train de devenir un allié. La musique digitale devient payante et ce marché est en forte croissance. Le numérique, via les mobiles ou les PC, via l’achat à l’unité comme sur iTunes ou via des sites de streaming comme Deezer ou Spotify se développe. Aux Etats-Unis, le digital représente déjà la moitié du marché et la croissance numérique fait plus que compenser le déclin du marché physique. En France, nous n’en sommes pas encore là mais le numérique c’est déjà plus d’un quart du marché et la croissance est aussi au rendez-vous.
Dans ce marché en crise comment s’en sorte les acteurs français ?
Pas trop mal. D’abord il faut savoir qu’Universal Music, la première major est contrôlée par le groupe Vivendi qui est français. Les centres de décisions sont pour l’essentiel aux Etats-Unis, mais le management est en partie tricolore. L’autre bonne nouvelle, c’est que dans le numérique nous disposons de sérieux atouts. Deezer fait pratiquement jeu égal avec Spotify. Et on a des start-up prometteuses comme Beezik qui propose des téléchargements gratuits en échange de publicité. Et puis enfin, pour l’instant, le système des quotas à la radio a permis à la musique “made in France” de faire de la résistance. Et sur la scène internationale, je ne vous apprends rien en vous disant que nos DJ à l’accent français ont la cote.
Donc en dépit de la crise, la filière musicale française n’est pas morte ?
Non. Il faut en plus arrêter de considérer que la musique ça n’est que la vente de disques. La musique c’est un écosystème très vaste dans lequel il faut inclure les concerts, les émissions de télé et de radio, les journaux spécialisés, la vente d’instruments, les leçons et pourquoi pas les chaînes hi-fi ou les iPods. Au total, si on additionne tout ça, Jean-Noël Tronc, le patron de la Sacem, la société qui défend les droits des auteurs-compositeurs, estimait en début de semaine dans Les Echos que la filière musicale génère un chiffre d’affaires de 6 à 8 milliards d’euros. La musique est un art qui a de l’avenir. Et en plus voilà une industrie qui n’est pas délocalisable alors ne voyons pas tout en noir.
http://blogs.lesechos.fr/david-barroux/pourquoi-la-musique-a-le-blues-a12385.html