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| LEON TOLSTOI - GUERRE ET PAIX - ANNA KARENINE | |
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liliane Admin
Nombre de messages : 19569 Age : 50 Localisation : dans la galaxie Date d'inscription : 02/05/2008
| Sujet: LEON TOLSTOI - GUERRE ET PAIX - ANNA KARENINE Dim 26 Oct - 11:48 | |
| "Tous les hommes font la même erreur, de s'imaginer que bonheur veut dire que tous les vœux se réalisent."Vrai nom : Lev Nikolaïévitch Tolstoï Nationalité : Russe Naissance : 09 septembre 1828 Mort le : 20 octobre 1910 Tolstoï est issu d'une famille de la haute noblesse russe. Son grand père était maréchal de la Cour et ambassadeur à Paris auprès de Napoléon 1er. Ses parents ayant disparus, il sera élevé par sa tante. Il fait ses études à l'université de Kazan puis rentre dans la propriété familiale. En 1851, Tolstoï entre dans l'armée et sert dans le Caucase. Un an plus tard paraît sa première nouvelle, Enfance, qui le rend immédiatement célèbre. Il continue ses récits autobiographiques puis participe à la défense de Sébastopol, qui lui inspirera ses Récits de Sébastopol. En 1856, il quitte l'armée et entreprend des voyages à l'étranger, en France, en Italie, en Allemagne… Il s'intéresse aux méthodes d'enseignement de ces pays et, de retour chez lui, fonde une école pour les enfants pauvres où il peut tester ces nouvelles méthodes, non violentes. Il se marie en 1862 et aura 13 enfants. Ses deux romans, Guerre et Paix et Anna Karénine, lui prendront plus de 10 ans à écrire, et le rendront célèbre dans le monde entier. C'est à ce moment qu'il traverse une véritable crise religieuse et morale et qu'il devient un auteur moralisateur. En effet, ses conversations avec des paysans mystiques lui inspirèrent un grand nombre de brochures et d’articles. Il écrit par exemple Résurrection, qui parle d'un amour coupable. LA CHAMBRE DE LÉON TOLSTOI À IASNAIA POLIANA Voulant mettre sa religion en pratique, Tolstoï tente de distribuer ses terres aux paysans mais sa famille va s'y opposer. Il adopte tout de même un mode de vie ascétique plus en accord avec sa morale que la vie facile qu'il pouvait mener. Il fabriquait lui même presque tout ce dont il avait besoin (vêtements, chaussures, etc). Sa religion parut subversive et le Saint Synode l’excommunia en 1901. Il finit par quitter sa maison et meurt de pneumonie un mois plus tard. BIBLIOGRAPHIE
2003 TROIS MORTS 1998 MAÎTRE ET SERVITEUR 1994 PAYSANNE RUSSE (UNE) 1980 FRUITS DE LA SCIENCE (LES) 1904 HADJI-MOURAD 1900 CADAVRE VIVANT (LE) 1899 RÉSURRECTION 1898 PÈRE SERGE (LE) 1893 MIKHAÏL 1890 SONATE À KREUTZER (LA) 1890 DIABLE (LE) 1887 PUISSANCE DES TÉNÈBRES (LA) 1886 MORT D'IVAN ILITCH (LA) 1883 ROYAUME DES CIEUX EST EN VOUS (LE) 1877 ANNA KARÉNINE 1869 GUERRE ET LA PAIX (LA) 1863 COSAQUES (LES) 1859 BONHEUR CONJUGUAL (LE) 1856 TOURMENTE DE NEIGE (LA) 1856 RÉCITS DE SÉBASTOPOL 1856 DEUX HUSSARDS (LES) 1853 RÉCITS DU CAUCASE 1852 ENFANCE N/D POULIKROUCHKA N/D MATINÉE D'UN SEIGNEUR (LA) N/D LUCERNE N/D KHOLSTOMER N/D ALIOCHA GORCHOK N/D ALBERT
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| | | liliane Admin
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| Sujet: Re: LEON TOLSTOI - GUERRE ET PAIX - ANNA KARENINE Dim 26 Oct - 14:48 | |
| GUERRE ET PAIX
LE ROMAN
| L'histoire se déroule entre 1805 et 1820. Tandis que Napoléon conduit sa Grande Armée en Russie, la vie continue à Moscou. On y croise le comte Rostov qui s’apprête à célébrer la fête de sa fille Natacha - le prince André Bolkonski et sa femme Lise, enceinte - Pierre, le fils illégitime du comte Bezoukhov - Maria Dmitrievna, la tante de Natacha - et enfin Nicolas Rostov et sa cousine Sonia, follement épris, l’un de l’autre.
Au cours du bal, un messager délivre un pli annonçant l’entrée en guerre de la Russie aux côtés de l’Autriche. Les hommes s’en réjouissent, les femmes s’en inquiètent.
Ce roman de Tolstoï, tant par la richesse et le réalisme de ses détails que par les descriptions psychologiques de ses personnages est considéré comme un roman majeur de la littérature. Tolstoï y développe une théorie fataliste de l'histoire, où le libre arbitre n'aurait qu'une importance mineure et où tous les évènements n'obéiraient qu'à un déterminisme historique inéluctable. |
LE FILM
| Genre : Drame épique Pays : Italie Année : 1955 Distributeur : Paramount Durée : 208 min.
Réalisation: King Vidor. Scénario: Bridget Boland, Robert Westerby, K. Vidor, Mario Camerini, Ennio De Concini, Ivo Perilli, Gian Gaspare Napolitano, Mario Soldati, d'après le roman de Léon Tolstoï. Photographie: Jack Cardiff. Montage: Leo Catozzo. Musique: Nino Rota.
Acteurs : Henry Fonda, Audrey Hepburn, Mel Ferrer, Vittorio Gassman, Herbert Lom.
| BANDE ANNONCE DU FILM |
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Opéra de Sergueï Prokofiev (1891-1953) Comme dans la fresque monumentale de Tolstoï, dont le compositeur s'est inspiré, Prokofiev n'assourdit pas les battements de coeur de la jeune idéaliste, Natacha Rostova, par le bruit des tambours et canons annonçant l'invasion napoléonienne. En dépit des valses où s'étourdit l'aristocratie - où Natacha découvre l'amour - le huitième et dernier opéra de Prokofiev est une oeuvre où tout brûle et se consume en même temps : Moscou, comme les illusions de l'amour. Tout concourt dans cet opéra foisonnant à un portrait sensible de la Russie, peinture brossée à grand trait de 'scènes lyrico dramatiques' où s'entremêlent sphère privée et dimension historique. Si l'oeuvre, mise en chantier en 1941, ne pouvait échapper à une lecture « d' actualité » rapportée à l'invasion allemande, Prokofiev aura su résister à des similitudes hors de propos. Surtout, il aura résisté à sa 'récupération' par le diktat stalinien d'une pensée 'correcte'. De sorte que le compositeur ne vit jamais son opéra intégralement représenté de son vivant.
Adaptation télévisée Un téléfilm universel sur l'histoire de la Russie tsariste
Véritable production européenne dans laquelle on retrouve des acteurs de toutes les nationalités : Clémence Poésy (Natacha Rostov) est française, Alessio Boni (Le prince André Bolkonski) et Valentina Cervi (Maria Bolkonski) sont italiens, Alexander Beyer (Pierre Bezoukhov) et Ken Duken (Anatole Kouraguine) sont allemands, Ana Catarina Morariu (Sonia) est roumaine et Dima Isaev (Nicolas Rostov) est russe. | Les 4 épisodes de Guerre et Paix, adaptés du roman de l’écrivain russe Tolstoï (1828-1910), ont été réalisés par le roumain Robert Dornhelm.
D’origine roumaine, Robert Dornhelm vit depuis 25 ans à Los Angeles. Son téléfilm a donc pu bénéficier des techniques cinématographiques les plus avancées, mais aussi de son expérience de la vie en Europe de l’Est et de sa connaissance de la littérature russe. Une œuvre qui lui tenait donc très à cœur et à laquelle il a tenté de rester le plus fidèle possible. Sans compter le financement des principales chaînes publiques européennes partenaires du projet (ZDF, Channel 2, France 2, la RTBF, Rai Fiction, Eos Films, Grupa Filmowa Baltmedia, Poslat, AT-Production et Grupo Intereconomia), qui lui ont apporté un budget à la hauteur de cette super production télévisuelle.
Avec un budget total de 25 millions d’euros, le téléfilm a nécessité 6 mois de tournage partagés entre Saint-Petersbourg pour les séquences en extérieur, et les studios lituaniens pour celles en intérieur. C’est sans compter les 15 000 figurants, les 1 800 scènes de cascades, les 1 500 chevaux et les 2 400 costumes ! Des chiffres exceptionnels qui n’auraient jamais pu voir le jour sans cette collaboration des 10 chaînes européennes.
| Premier épisode Début du XIXe siècle. Napoléon conduit sa Grande Armée en Russie et la vie continue à Moscou. Le comte Rostov s’apprête à célébrer la fête de sa fille Natacha. Véritable garçon manqué, la jeune femme supporte difficilement le corset que sa mère l’oblige à porter. Là, se croisent le prince André Bolkonski et sa femme Lise, enceinte - Pierre, le fils illégitime du comte Bezoukhov - Maria Dmitrievna, la tante de Natacha - et enfin Nicolas Rostov et sa cousine Sonia, follement épris, l’un de l’autre. Au cours du bal, un messager délivre un pli annonçant l’entrée en guerre de la Russie aux côtés de l’Autriche. Les hommes s’en réjouissent, les femmes s’en inquiètent. A quelques rues de là, le comte Bezoukhov, à l’agonie, demande à voir Pierre avant de mourir. Le comte souhaite lui remettre une lettre adressée au tsar pour légitimer sa situation. Vassili Kouraguine qui escomptait bien s’approprier la fortune du comte dispose d’un autre atout pour reconquérir ces biens perdus : sa ravissante fille Hélène qui s’est mise à fréquenter Pierre avec assiduité. | | Deuxième épisode Depuis le bal donné par le tsar, André et Natacha ne cessent de penser l’un à l’autre. Veuf, André demande la bénédiction de son père pour épouser Natacha. Désapprouvant ce mariage, le prince impose à son fils un an de réflexion et l’obligation de rejoindre les armées du tsar, où il a été promu commandant. Des conditions acceptées par Natacha. Triste à l’idée de voir partir André, Natacha est soutenue par Sonia, qui vit une situation similaire avec Nicolas. Malheureux en mariage, Pierre a épousé Hélène et il doute autant de la fidélité de sa femme que de celle de son ami Dolokhov. Il se réfugie de plus en plus sur ses terres où il rêve d’affranchir ses serfs. En Lituanie, André contraint Anatole Kouraguine, le fils de Vassili, à épouser la paysanne qu’il a mise enceinte. Un affront dont Anatole est bien décidé à se venger.
| | Troisième épisode Difficile pour Natacha d'oublier les paroles d'Anatole à l'opéra. Elle n'a aucune idée sur la vengeance orchestrée par Hélène et Anatole. A la suite de la tentative de suicide d'Anatole et déçue par André, qui n'est pas revenu une seule fois en un an, Natacha accepte de s'enfuir avec Anatole. Un geste qu'elle va très vite regretter. Sur le front, l'armée russe est prête à affronter les assauts français. Une bataille à laquelle André, Pierre, Anatole, Nicolas et Denisov vont prendre part.
| | Quatrième et dernier épisode Après la défaite de Borodino, les moscovites préfèrent incendier leurs maisons plutôt que de les laisser aux troupes françaises. Alors que la famille Rostov s'apprête à fuir, le père de Pieta l'autorise à rejoindre son frère Nicolas au front. Pierre conduit André blessé, auprès des Rostov sans en informer Natacha. Il s'est déguisé en paysan dans le but d'assassiner Napoléon. A Lissi Gori, son père enterré, la princesse Maria Bolkonsky est cloitré par ses domestiques, jusqu'à l'arrivée fortuite de Nicolas et Denisov qui parviennent la libérer. | |
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| | | liliane Admin
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| Sujet: Re: LEON TOLSTOI - GUERRE ET PAIX - ANNA KARENINE Dim 26 Oct - 16:26 | |
| ANNA KARENINE
| Léon Tolstoï commence Anna Karénine en 1873 puis l'abandonne. Il le reprend quelques années après, et le publie en 1877. Ce récit a été inspiré à Tolstoï par un fait divers : Le suicide d'une femme abandonnée par son amant qui était un voisin et une connaissance de Tolstoï. Cette jeune femme s'est jetée sous un train dans la petite gare de Lassenki. Tolstoï a vu son corps déchiqueté. C'est de cette image qu'est né le "destin" d'Anna Karénine. Résumé du roman Russie, 1880. Anna Karénine, est une jeune femme de la haute société de Saint-Pétersbourg. Elle est mariée à Alexis Karénine un haut fonctionnaire de l'administration impériale, un personnage austère et orgueilleux. Ils ont un garçon de huit ans, Serge. Anna Karénine se rend à Moscou chez son frère Stiva Oblonski. En descendant du train, elle croise le comte Vronski, venu à la rencontre de sa mère. Le comte laisse passer cette très belle femme. Anna Karénine tombe amoureuse de Vronski, cet officier brillant, mais frivole. Ce n'est tout d'abord qu'un éclair, et la joie de retrouver son mari et son fils lui font croire que ce sera un vertige sans lendemain. Mais lors d'un voyage en train, quand Vronski la rejoint et lui déclare son amour, Anna réalise que la frayeur mêlée de bonheur qu'elle ressent à cet instant vont changer son existence. Anna lutte contre cette passion. Elle finit pourtant par s'abandonner avec un bonheur coupable au courant qui la porte vers ce jeune officier. Puis Anna tombe enceinte. Se sentant coupable et profondément déprimée par sa faute, elle décide d'avouer son infidélité à son mari. Elle n'ose raconter à Vronski qu'elle s'est décidée à parler à son mari. L'amour qu'elle porte pour son fils lui fait songer un moment à abandonner mari et amant et à fuir avec lui. Mais une lettre de son mari, parti en voyages, en réponse à son aveu , où il ne lui demande que de respecter les apparences, la décide à rester. Mais la grossesse se déroule mal. Après avoir mis au monde une fille, Anna contracte la fièvre et risque de mourir . Elle envoie un télégramme à son mari , lui demandant de rentrer et de lui pardonner. Elle se repent et appelle la mort comme une libération pour tous. Emu par le remords de sa femme et sa mort imminente , Alexis consent à lui pardonner. Une fois guérie, Anna qui aime toujours Vronski, refuse de le voir. Chassé par elle, celui-ci songe à se suicider. Puis quelque temps plus tard, une rencontre inopinée avec Vronski suffit à faire voler en éclats la décision d'Anna. Elle se jette dans ses bras et ils décident de fuir ensemble à l'étranger. C'est pour Anna, un moment de joie et de délivrance. Elle connaît pendant quelques semaines un bonheur insolent en visitant avec Vronski la France et l'Italie. Puis leur relation va se détériorer lentement . De retour en Russie, Anna et Vronski vivent en marge de la société. Ils suscitent à la fois admiration et réprobation d'avoir ainsi bravé les conventions de la haute société russe. La fortune de Vronski leur permet d'avoir une existence indépendante et ils parviennent à recréer autour d'eux une micro-société , en marge du Grand Monde. Mais Anna ne supporte pas d'avoir abandonné son enfant et trahi son mari. Elle reste attachée à son fils Serge qu'elle ne voit plus et elle n'aime pas la fille née de sa liaison avec Vronski. De son côté, Vronski, abandonné par ses pairs, vit difficilement les effets de cette liaison. Ce climat pesant provoque une incompréhension réciproque qui obscurcit leur union. Anna, en proie aux plus vifs tourments, et prise dans un engrenage dont elle ne peut se délivrer, met fin à sa vie en se jetant sous un train. L'histoire d'amour tragique d'Anna Karénine et de Vronski s'inscrit dans un vaste tableau de la société russe contemporaine. En parallèle à leur aventure, Tolstoï brosse le portrait de deux autres couples : Kitty et Lévine, et Daria et Oblonski . Il y évoque les différentes facettes de l'émancipation de la femme, et dresse un tableau critique de la Russie de la fin du XIXe siècle : Tolstoï montre que les idées libérales et progressives de l'occident commencent à saper des structures traditionnelles apparemment intactes C'est tout d'abord l'amour heureux qui finira par unir Kitty et Lévine. Kitty est une belle adolescente qui à dix-huit ans fait son entre dans le monde. Lors d'un bal, la déclaration de Levine la flatte car elle lui donne de l'importance . Elle lui répond cependant par la négative car elle est amoureuse de Vronski. Ce dernier lui échappe lors de ce bal où il succombe à la fascination d'Anna. Kitty sombre alors dans la honte. Lévine, lui, est un gentilhomme campagnard généreux et progressiste. Tout comme Tolstoï, il est assailli d’angoisses et d’interrogations sur le sens de la vie et de la mort et sur la relation des êtres humains avec l’infini... Plusieurs mois après ce sinistre bal, Kitty rencontre à nouveau Lévine auprès duquel elle ressent alors un mélange d'effroi et de bonheur. Elle se rend compte qu'elle n'a aimé que lui. Kitty et Lévine comprennent que le passé n'a été qu'une épreuve destinée à consolider leur amour. Ils décident alors de se marier. Cette union offre l'image d'un couple épanoui, où la douceur et la sagesse féminines permettent à l'homme de s'accomplir au sein de la nature. Apparaît ensuite un couple plus contrasté: Oblonski, le frère d'Anna Karénine, est un jouisseur infidèle. Il témoigne une extrême indulgence à ses semblables, sans doute fondée sur le sentiment de ses propres défauts. Daria , son épouse, est, elle, soumise et résignée, mais surtout épuisée par les tâches de la vie quotidienne. Malgré son infidélité, Oblonski prodigue à sa femme plusieurs marques de tendresse réconfortantes... À travers l'histoire de ces couples, au-delà même de l'idéal humaniste qu'il place en Lévine, Tolstoï évoque dans ce roman une double quête sans fin : celle de la recherche de l'amour et de l'exigence de vérité. Deux des principaux personnages de ce roman – Anna et Lévine – ne se rencontrent presque pas, ils évoluent dans des espaces parallèles. Ce qui vaudra à des critiques de reprocher à Tolstoï son " incapacité à construire le sujet " :" il (le roman) n'a pas d'architecture. On y voit se développer côte à côte , et se développer magnifiquement deux thèmes que rien ne réunit. Comme je me suis réjoui de voir Anna et Lévine faire connaissance ! Convenez c'est l'un des meilleurs épisodes du roman. Vous aviez là l'occasion de réunir tous les fils du récit et de lui assurer un finale harmonieux. Vous ne l'avez pas voulu, c'est votre affaire..." ; ce à quoi Tolstoï répondra: "Je suis fier au contraire de son architecture, les voûtes se rejoignent de telle manière qu'on ne remarque pas où est la clef..." |
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| | | liliane Admin
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| Sujet: Re: LEON TOLSTOI - GUERRE ET PAIX - ANNA KARENINE Mer 29 Oct - 11:30 | |
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| | | liliane Admin
Nombre de messages : 19569 Age : 50 Localisation : dans la galaxie Date d'inscription : 02/05/2008
| Sujet: Re: LEON TOLSTOI - GUERRE ET PAIX - ANNA KARENINE Mer 29 Oct - 16:08 | |
| ANNA KARENINE AU CINEMA
| 1915 - ANNA KARENINE
Film de J. Gordon Edwards avec :
Betty Nansen Edward José Richard Thornton Stella Hammertsein Mabel Allen | 1927 - Anna Karénine (Love) Film d'Edmund Goulding avec :
Greta Garbo John Gilbert Brandon Hurst George Fawcett | | | 1935 - Anna Karénine (Anna Karenina)
Film de Clarence Brown avec :
Greta Garbo Fredric March Basil Rathbone Freddie Bartholomew May Robson Maureen O'Sullivan Reginald Owen Reginald Denny | 1948 - ANNA KARENINE
Film de Julien Duvivier avec :
Vivien Leigh Ralph Richardson Kieron Moore Hugh Dempster Mary Kerridge Marie Lohr Frank Tickle Sally Ann Howes
| | | 1967 - ANNA KARENINA
Réalisation : Aleksandr ZARKHI avec :
Tatiana Samoïlova, Nikolaï Gritsenko, Vassili Lanovoï, Iouri Iakovlev, Iya Savvina, Boris Gordéev, Maïa Plissetskaïa | 1985 - ANNA KARENINA
Téléfilm de Simon Langton avec :
Jacqueline Bisset, Christopher Reeve, Paul Scofield, Ian Ogilvy Anna Massey Joanna David Judi Bowker Valerie Lush Judy Campbell
| | | 1997 - ANNA KARENINE Film américano-russe de Bernard Rose, avec :
- Sophie Marceau : Anna Karénine - Sean Bean : Vronsky - Alfred Molina : Lévine - Mia Kirshner : Kitty - James Fox : Karénine - Fiona Shaw : Lydia - Danny Huston : Stiva - Phyllida Law : Vronskaya - David Schofield : Nikolai - Jennifer Hall : Betsy | 2000 - ANNA KARENINA
Série télé de David Blair, avec : Helen McCrory, Kevin McKidd, Douglas Henshall, Mark Strong (II), Amanda Root | |
Dernière édition par liliane le Mar 30 Nov - 9:11, édité 3 fois | |
| | | liliane Admin
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| Sujet: Re: LEON TOLSTOI - GUERRE ET PAIX - ANNA KARENINE Mar 30 Nov - 7:22 | |
| Tolstoï, un prophète
Difficile de trouver un grand sujet de société auquel le monde actuel soit confronté qui n’ait pas été anticipé et discuté par Tolstoï d’une façon ou d’une autre.
La mort de Léon Tolstoï le 20 novembre 1910 dans une petite gare du sud de la Russie prit une dimension mythologique au moment même où elle se produisit. Pathé, le pionnier des actualités filmées, réalisa l’une de ses premières images animées autour de cet événement. Lénine avait déclaré deux ans auparavant que Tolstoï était «un miroir de la révolution». Les révolutionnaires communistes, comme le gouvernement russe, guettèrent l’effet qu’aurait la mort du grand anarchiste sur le peuple russe, qui sentit qu’il n’avait pas seulement perdu un grand artiste mais aussi la voix la plus éloquente qui ait jamais tonné en sa faveur contre de monstrueuses injustices.
À des questions aussi apparemment simples que la manière dont il nous faut vivre, il donnait des réponses qui ébranlaient l’âme même des tsars, des armées, de la police secrète et des inquisiteurs de l’Église. À la fin de sa vie, des millions de personnes du monde entier étaient suspendues à ses lèvres. Une semaine après sa mort, dans la cafétéria d’une gare moscovite, une femme fit une remarque désobligeante à son propos. Les ouvriers du café l’encerclèrent et le serveur refusa de lui donner son thé.
Si actuel
L’anniversaire de la mort d’un écrivain est généralement l’occasion de réévaluer et de relire son œuvre, mais il est rare d’y voir une incitation à se poser les questions les plus fouillées sur le monde tel qu’il est aujourd’hui et sur nous-mêmes. Et voilà que la mort de Tolstoï nous met au défi de nous poser les questions personnelles et politiques les plus profondes. Difficile de trouver un grand sujet de société auquel le monde actuel soit confronté qui n’ait pas été anticipé et discuté par Tolstoï d’une façon ou d’une autre, qu’il s’agisse de la crise environnementale, du débat religieux (créationnisme contre athéisme) ou du mouvement contre la guerre.
Qui fut donc cet homme qui en vint à représenter l’âme de son pays? Tolstoï naquit en 1828, dans une famille de diplomates et de courtisans parmi les plus éminents de Russie. Il s’engagea dans l’armée et participa à la guerre de Crimée. En 1862, il se maria, fonda une famille qui allait être conséquente (treize enfants), et initia un programme d’éducation des paysans en créant un vaste réseau d’écoles et en lançant de nouvelles méthodes agricoles. Après les voyages de sa jeunesse, il passa la plus grande partie de sa vie dans le domaine familial d’Iasnaïa Poliana, à environ 200 km au sud de Moscou.
Dans ses Récits de Sébastopol et dans les récits caucasiens intitulés Les Cosaques se révèle très tôt son génie pour les descriptions réalistes et détaillées non seulement de la vie militaire mais également de la nature. La volonté de découvrir la meilleure façon de vivre est au cœur de tous les écrits de Tolstoï. Elle s’insinue dans les songeries du prince André et de Pierre dans La Guerre et la Paix, ainsi que dans les questionnements intimes de Lévine dans Anna Karénine.
Après avoir écrit ce roman, Tolstoï subit une crise de la quarantaine et devint un fervent orthodoxe. Puis, changeant de nouveau d’avis, il décida que les enseignements de l’Église n’avaient pas de sens. L’important étant ce que Jésus lui-même avait enseigné. Et l’enseignement de Jésus, selon Tolstoï—qui réécrivit littéralement les évangiles—c’était le pacifisme, l’anarchie, pas de gouvernement, pas d’armée, pas d’aristocratie, pas de quête des richesses. Vint s’y ajouter un végétarisme de plus en plus obsessionnel.
Une vie de prophète
La nouvelle biographie de Rosamund Bartlett: Tolstoy: A Russian Life m’a fait découvrir Tolstoï de façon plus vivante qu’aucune autre avant elle. Universitaire et traductrice, Bartlett est imprégnée de la langue et de l’histoire de la Russie. À chaque étape de la vie de Tolstoï, une présence gigantesque s’impose à nous: quand il planta une pommeraie dans sa propriété d’Iasnaïa Poliana, par exemple, ce fut la deuxième plus grande d’Europe. Né dans l’opulence, il en vint à mépriser sa fortune. Lorsqu’il entreprit de soulager les victimes de la famine, il devint une véritable association humanitaire à lui tout seul et galvanisa tout un pays pour sauver les affamés.
Pour le simple lecteur, il n’est pas aisé d’appréhender l’échelle et l’étendue des intérêts et des réalisations de Tolstoï. Avoir tout réuni en moins de 500 pages est une prouesse en soi. Pourtant, Bartlett ne semble jamais précipitée et se donne tout le temps de nous dépeindre les décors, pour faire monter les effluves de la terre et de l’herbe russes jusqu’à nos narines.
Dans ses pages, elle expose la différence entre la lointaine et raffinée Saint-Pétersbourg et Moscou, où Tolstoï acheta à contrecœur une maison de ville; tout comme elle transmet la soif de l’écrivain non seulement pour l’idylle pastorale d’Iasnaïa Poliana, mais aussi pour les étendues désertes de Samara, pour lesquelles il éprouva un attachement qui grandit sans cesse. Il s’y rendit au départ pour boire du koumis (lait de jument fermenté) pour sa santé, mais son caractère obsessionnel, qui s’intéressait à tout, ne tarda pas à le rendre amoureux du peuple qui y vivait, les Bachkirs, des musulmans turcophones. Il acheta près de 3.000 hectares de terre bachkire et obligea sa famille à passer bien plus de temps qu’elle ne l’aurait voulu dans des tentes, à boire du koumis dans des cuves de cuir tandis qu’accompagné de son percepteur de grec, il lisait Hérodote.
Il ne s’agit pas d’une hagiographie: Bartlett admet qu’il était un mari impossible et que son manque total d’humour le rendait pour le moins rébarbatif. Elle parvient à un parfait équilibre entre admiration pour l’art de Tolstoï et respect pour sa vie de prophète. La tradition veut qu’après Anna Karénine, le romancier perdit son dynamisme, fit une dépression nerveuse et se réinventa en prophète cinglé tonnant des appels de clairon moraux. L’écrivain Vladimir Tchertkov, grand prêtre du tolstoïsme à qui presque tous ses biographes font une fort mauvaise presse, l’encourageait à suivre ses marottes.
Mais Bartlett m’a fait réviser mon opinion sur Tchertkov–en plus d’introduire le délicieux ragot qu’il était presque certainement le demi-frère illégitime du tsar. C’était un fanatique, peut-être, mais il faisait aussi preuve d’un courage impressionnant. Un des excellents points de la biographie de Bartlett est qu’elle voit la nécessité de poursuivre l’histoire jusqu’à l’époque moderne. Elle suit la destinée des tolstoïens russes jusqu’à l’ère stalinienne.
Tchertkov, dont la foi dans l’anarchisme chrétien pacifiste qui fut une des marques du tolstoïsme ne vacilla jamais, poursuivit courageusement sa carrière de principal éditeur des œuvres complètes de Tolstoï, sollicitant vainement des fonds auprès de Staline pour finir la tâche, sans jamais compromettre ses convictions au milieu des horreurs qui ensanglantèrent cette époque. Quand cinq tolstoïens furent arrêtés en 1929 et condamnés aux travaux forcés, Tchertkov intercéda en leur faveur, tout comme il tenta héroïquement de maintenir la Société moscovite végétarienne Léon Tolstoï en vie, sans succès.
À la première lecture de La Guerre et la Paix, il apparaît clairement que Tolstoï écrit avec l’ampleur et l’envergure d’Homère. Nulle part ailleurs que dans L’Iliade ne trouvons-nous une si prodigieuse association de détachement artistique de la joie et de la souffrance d’une part, et, de l’autre, une telle sympathie et un engagement si passionné. Cette vérité paradoxale existe dans ces deux chefs d’œuvre européens, et le livre de Bartlett nous explique comment ces deux qualités divines, l’indifférence et l’empathie, étaient constamment présentes dans l’âme de Tolstoï.
Anthony Briggs, professeur de littérature russe, publia une excellente traduction anglaise de La Guerre et la Paix en 2005 pour les éditions Penguin. C’est une version vivante et très lisible, dans laquelle il a traduit les nombreux passages en français dans le même anglais familier qu’il utilise pour traduire le russe. Certains lecteurs n’ont pas aimé ce procédé, tout comme ils n’ont pas apprécié qu’il mette dans la bouche du général Koutouzov les véritables jurons que proférait ce vieux général (en réalité vraiment mal embouché) plutôt que des astérisques. Et Briggs a sans aucun doute perdu quelque chose en dissimulant aux lecteurs anglais découvrant l’œuvre pour la première fois le fait que l’aristocratie russe ne parlait pas russe.
J'ai changé d'avis
La très brève biographie de Tolstoï écrite par Briggs et publiée au début de l’année (chez Hesperus Press) adopte la vision qui, je pense, est devenue une orthodoxie, selon laquelle le Tolstoï tardif et prophétique était moins important que le romancier qui écrivit les premières œuvres. Briggs cite ce que j’ai moi-même écrit dans ma propre biographie du grand homme: que «plus nous possédons d’éléments sur Tolstoï, moins il a de sens». J’ai écrit ces mots il y a plus de vingt ans, et les années qui se sont écoulées depuis ont changé mon point de vue. Tolstoï a un sens très clair à mes yeux aujourd’hui. L’anniversaire de sa mort nous donne l’occasion de nous rendre compte qu’il n’y a pas deux Tolstoï, le romancier et l’anarchiste sectaire. Il n’y en a qu’un. La Guerre et la Paix n’est pas seulement une grande saga nationale et familiale, c’est un roman sur la régénération personnelle et nationale. Tolstoï fut l’un des grand révélateurs de vérité de l’histoire, le premier des grands dissidents et leur saint patron. Dans un monde dominé par des dirigeants véreux, des guerres injustes, la méchanceté et la corruption, et, surtout par les mensonges, Tolstoï devint ce que Dante appelait un «parti à lui tout seul» et se débattit contre tous les bords.
Certes, l’anarchisme chrétien de Tolstoï était inconsistant à de nombreux égards, mais quand on sait que les ennemis dans sa ligne de mire étaient l’épouvantablement égoïste famille royale et une église orthodoxe soutenant l’un des régimes politiques les plus iniques de l’histoire de l’Europe (et bénissant les armes sur le champ de bataille au nom du Christ), il est difficile de ne pas acclamer le vieux prophète barbu et de ne pas passer outre les méchancetés qu’il a pu infliger à sa femme.
Y a-t-il une vanité, presque une frivolité dans la position anarcho-pacifiste? Lorsqu’on sait les excès ultérieurs de Staline et d’Hitler, la mort de Tolstoï en 1910 peut apparaître comme le triste trépas d’un rêve utopiste. Mais l’histoire de l’Afrique du Sud—pour ne choisir qu’un seul exemple—démontre la vigueur et la force de l’idée tolstoïenne. C’est en Afrique du Sud que Gandhi s’enflamma pour les écrits de Tolstoï et qu’il commença à mettre en pratique la politique de résistance passive qui finirait par avoir raison de l’Empire britannique.
Les récents conflits en Irak ou en Afghanistan ne laissent pas penser que la guerre ait jamais pu être une solution aux problèmes humains. Le rejet de Tolstoï non seulement de la guerre et de la violence, mais du concept même de gouvernement, détient encore un grand potentiel pour changer notre monde. En tout cas, c’est ce que j’en suis venu à espérer.
En marchant sur ses pas, depuis cette gare provinciale isolée d’Astapovo jusqu’au domaine ancestral d’Iasnaïa Poliana, une fois de plus j’ai été stupéfait par le génie qui a produit les Récits de Sébastopol, Les Cosaques, La Guerre et la Paix, La mort d’Ivan Ilitch, Anna Karénine et Résurrection – pour ne nommer que quelques-uns de ses chefs-d’œuvre. Moi aussi, tout comme le peuple en 1910, je me suis senti submergé par la sensation que si seulement nous pouvions vivre comme il nous pressait de le faire dans ses derniers écrits prophétiques, nous trouverions la rationalité au milieu du chaos.
A.N. Wilson Ecrivain et chroniqueur anglais cet article a été publié à l’origine dans le Financial Times. Traduit par Bérengère Viennot http://www.slate.fr/rubriques/7901/CULTURE | |
| | | Bridget
Nombre de messages : 2631 Age : 73 Localisation : Paris Date d'inscription : 13/05/2008
| Sujet: Re: LEON TOLSTOI - GUERRE ET PAIX - ANNA KARENINE Sam 11 Déc - 1:07 | |
| "Tolstoï, le pas de l'ogre", de Christiane Rancé : Tolstoï, le dépassement de soi jusqu'à la rageLE MONDE DES LIVRESComment dire Tolstoï ? Comment, une nouvelle fois, esquisser ce geste presque impossible : résumer Tolstoï ? Le défi littéraire n'est pas des moindres, pourtant le voici relevé, avec grâce et intelligence, par la nouvelle biographie de Christiane Rancé. Cette essayiste, biographe de Simone Weil, a effectué un important travail de recherche en amont. Elle signe un livre foisonnant mais succinct, complexe mais limpide. Qu'est-ce qui distingue cette biographie des autres, celle de Romain Rolland, par exemple ? "Je souhaitais montrer qu'il n'y a pas de rupture entre deux hommes, comme on l'a trop souvent écrit, explique Rancé. Comme si, après Anna Karénine, Tolstoï se stérilisait, s'éteignait à lui-même, se reniait... Alors qu'il produit ensuite Résurrection, La Mort d'Ivan Ilitch, et ce dernier texte sublime, écrit presque à l'insu de son entourage, Hadji Mourat, une ode à la vie et à la liberté éblouissante, où absolument rien n'est renié. Je voulais réconcilier ces deux Tolstoï qu'on disait incompatibles, et en dégager la clé d'une quête métaphysique qui, au fond, reste toujours la même." Cette clé, c'est une tension permanente vers un déploiement qui le dépasse lui-même. Une vision qui embrasserait toutes les contradictions. Tolstoï, le pas de l'ogre commence par des tableaux de vie. Naissance, enfance, premiers souvenirs sensoriels. Né le 28 août 1828, à Iasnaïa Poliana, le domaine maternel, Tolstoï souffrira atrocement de la mort prématurée de sa mère. "Je ne me souviens absolument pas de ma mère. J'avais un an et demi lorsqu'elle mourut. Par un curieux hasard, il n'est resté d'elle aucun portrait, de sorte que je ne peux me la représenter en tant qu'être physique réel." De cette absence, Tolstoï semble tirer, très jeune, un principe créatif. Pour commencer, ce sera le monde alentour, le monde naturel, qui s'ouvrira à lui dans une effusion mystique. Il se sent né de cette nature, et participe de sa sensualité. Un "don des sens" qui est sans doute son "premier génie". Très vite, Lev abandonne ses études de droit et se jette dans les livres. Son grand-père, le prince Volkonski, a créé une bibliothèque de 14 000 livres. Tolstoï s'en nourrit et croît intellectuellement à une vitesse prodigieuse, convaincu de n'être "pas né pour être comme tout le monde". Son physique s'avère à la mesure de son intellect. "Tout est énorme chez lui, écrit Rancé, le nez, les oreilles, les mains, les pieds, et l'ivresse de lui-même." A 33 ans, il bouillonne de vitalité. Il a déjà vécu au Caucase, guerroyé en Crimée, énormément écrit, et voyagé : Sébastopol, Saint-Pétersbourg, la toundra, la steppe, rien de ce qui est russe ne lui est étranger. En 1865, dans Le Messager russe, paraît le premier épisode de Guerre et Paix. Jamais Tolstoï ne semble aussi heureux que tout au long de cette rédaction. Selon Rancé, "au moment où la défaite de Sébastopol plonge la nation dans un marasme moral, cette oeuvre impose sa volonté de préférer au néant la lumière. Le cycle fécond de la vie s'y déploie. Tolstoï fait triompher l'homme, dans sa singularité, contre l'Histoire, et affirme ainsi son amour de la vie". Une nuit, néanmoins, dans une auberge, en 1869, Tolstoï fait l'expérience du néant. Il est pris d'une tristesse, d'une angoisse, d'une terreur qui dès lors s'étendra à l'ensemble de sa vie, comme une maladie mortelle. "Je suis ici", lui avait murmuré la mort. A l'ivresse du festin de la vie succède une solitude irréductible et sournoise. "A présent moi aussi je ne vois que ce qui est ; je saisis, je comprends, mais je ne vois pas au travers, avec amour, comme avant." En vérité, il peine à aimer Dieu comme avant. Il voudrait croire "avec son intelligence", et construit une théologie négative et un principe de non-résistance au mal qui inspirera Gandhi. "Le Royaume de Dieu est en vous" devient son message, accompagné d'une attaque virulente contre l'Eglise. Son art a changé. Il a renié l'esthétique de ses propres livres, et signe désormais pamphlets et oeuvres plus didactiques. Sa source d'inspiration s'est-elle simplement tarie, comme on l'a trop souvent supposé ? Non. Selon Rancé, il s'agit certes d'un tournant existentiel violent, mais la quête forcenée de sens reste toujours la même, enracinée dans une spiritualité du travail, une extraordinaire rage de dépassement de soi. Et brusquement, çà et là, l'étonnement de la vie renaît. Un mois avant sa mort, Tolstoï écrit : "Dieu respire par nos vies et par toute la vie du monde. Lui et moi c'est la même chose. Dès qu'on a compris cela, on est devenu Dieu." Puis il prendra la fuite, pour mourir dans une station de train à Astopovo. "Nitchevo", "ce n'est rien", sera son dernier mot. TOLSTOÏ, LE PAS DE L'OGRE de Christiane Rancé. Seuil, 272 p., 19 €. http://www.lemonde.fr/livres/article/2010/11/18/tolstoi-le-pas-de-l-ogre-de-christiane-rance_1441699_3260.html .
Dernière édition par Bridget le Sam 11 Déc - 1:25, édité 1 fois | |
| | | Bridget
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| Sujet: Re: LEON TOLSTOI - GUERRE ET PAIX - ANNA KARENINE Sam 11 Déc - 1:24 | |
| "Tolstoï, le pas de l'ogre"Céline Chadelat Le Monde des Religions A la lumière de l'oeuvre de Tolstoï, de notes puisées dans son journal et de commentaires de ses contemporains, Christiane Rancé offre un éclairage remarquable sur les tribulations d’une âme en quête de vérité. L’occasion de revenir sur la destinée de celui qui fut à sa mort célébré comme un prophète.Léon Tolstoï, portrait par Illya Repine (1897) "On peut suivre, d’une œuvre à l’autre, l’évolution de Tolstoï sur le thème de la mort - thème fondateur de son œuvre, pivot autour de quoi tourne son âme", explique l'auteure. La présence de la mort survient lors d'une crise existentielle à Arzamas, en 1869, emportant sur son passage toutes les certitudes de l’écrivain. Cette nuit-là, face au néant, il prend conscience de la nature impermanente de toute chose. Cette expérience, initiatique, modifie son être en profondeur : "Ma vie s’arrêta. Je pouvais respirer, manger boire, dormir, ne pouvant pas ne pas respirer, manger, boire ou dormir ; mais je n’avais point de vie, car il n’existait plus de désirs dont la réalisation m’eût paru raisonnable." Arzamas ou la nuit de l’âme. Le monde terrestre n’est plus qu’illusion et mensonge.
Une peur d'essence spirituelleL’ombre terrible de cette expérience ressurgit constamment. "Il ressent désormais la peur de perdre son âme sans s’être jamais déployé spirituellement, dit Christiane Rancé, il comprend que cette peur même est d’essence spirituelle." Cet épisode, souvent décrit comme une rupture dans l’œuvre tolstoïenne - traduite dans le changement de ton entre Guerre et paix et Anna Karénine - est ici présenté par l’auteure comme un prolongement de son cheminement personnel. Comme deux faces d’une même pièce, l’angoisse de la mort succède à la célébration de la vie. L'âme, clé de compréhension entre deux phases de l'existence de Tolstoï. En dépit de la noirceur inhérente à Anna Karénine, Lévine, son alter ego, ne vibre-t-il pas corps et âme d'amour pour Dieu lors de son monologue final? Selon Christiane Rancé, "c’est la mort qui a cristallisé chez lui la question du sens de la vie, le fondement de la raison et celui de la foi". En pleine crise métaphysique, il se tourne vers la religion mais "du jour au lendemain, il renonce aux offices, aux jeûnes, aux sacrements". La foisonnante religiosité de la Russie du XIXe siècleEt pourtant, peu de ses contemporains le surpasseront dans l’application des principes évangélistes car "le christianisme de Tolstoï est existentiel avant d'être social ou moral; il a pour but de donner un sens à notre vie". Végétarien, il cesse de fumer et de pratiquer la chasse, rêvant d'abandonner domestiques, luxe et famille. Christiane Rancé brosse un portrait de la foisonnante religiosité de la Russie du XIXe siècle avec ses pèlerins, ses sectes et ses vagabonds mystiques tels que Skovoroda, qui à l’instar des sâdhus indiens était "végétarien, jouait de la flûte, prônait la vérité, incitait à combattre le mal, dormait par terre et, des heures durant, contemplait le ciel" et dont les écrits éblouirent Tolstoï. Nouvel Evangile et loi du ChristGrâce à son domaine d’Iasnaïa Poliana, l'écrivain est libéré du poids des contingences sociales qu'il excècre. Dépouillé du dogme, mu par la conscience aiguë de la nécessité de perfectionnement, il se lance dans la composition d’un nouvel Evangile. Mais comment et pourquoi Tolstoï a-t-il si mal lu l'Evangile jusqu'à ce jour? "Par faiblesse, estime Christiane Rancé. La loi du Christ a toujours touché son cœur, mais la loi contraire qu’il voit à l’œuvre dans la société l’attirait davantage. Elle flattait ses bas instincts et lui assurait, s’il la suivait, qu’il ne resterait pas seul dans son coin, détesté, malheureux et finalement persécuté." En 1901, suite à la publication de Résurrection, il est excommunié par le Saint-Synode de l'Eglise orthodoxe. Un conseiller de GandhiLe succès de sa pensée dépasse les frontières de l'Empire, parvenant même "aux oreilles de Gandhi". Il conseille d'ailleurs ce dernier sur la politique à tenir face à la présence britannique. Peu à peu, son évolution religieuse le fait rompre avec toute forme d'attachement matériel et physique, sans néanmoins trouver la force de quitter définitivement son domaine pour vivre son idéal de charité christique; tourment moral qui le poursuivra jusqu'à sa mort. Cet ouvrage nous dépeint un homme dont le courage de vivre pleinement toutes les dimensions de l’existence n’eut d’égal que son intention acharnée à se soumettre aux exigences de son âme. Ce qui lui fit déclarer, à la veille de sa mort, "Dieu respire par nos vies et par toute la vie du monde. Lui et moi, c'est la même chose. Dès qu'on a compris cela, on est devenu Dieu". http://www.lemondedesreligions.fr/culture/tolstoi-le-pas-de-l-ogre-23-11-2010-966_112.php | |
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