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 PATRICE CHEREAU

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Bridget




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MessageSujet: PATRICE CHEREAU   PATRICE CHEREAU EmptyVen 19 Nov - 22:41






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Patrice Chéreau, l’audacieux





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À l’auditorium du musée du Louvre, films et tables rondes célèbrent le metteur en scène français, passé maître dans l’art du spectacle.

Ses travaux combinent recherches plastiques, réflexions politiques et exploration des obsessions humaines.


Metteur en scène de théâtre et d'opéras, réalisateur et scénariste de cinéma puis acteur , Patrice Chéreau est né le 2 novembre 1944 à Lésigné . Il est le fils cadet d'un couple de peintres .

Installés à Paris, ses parents le sensibilisent à l'art et la culture en l'emmenant régulièrement visiter des expositions et assister à divers spectacles.

En 1966, à 22 ans, dans la France d'avant-Mai 68, il prend la direction du Théâtre de Sartrouville.


Comme la plupart de ses compagnons, il s'engage dans un théâtre politique où il affiche des positions affirmées.
En 1965, il met en scène L'Héritier de village de Marivaux puis l'année suivante une pièce de Labiche : L'Affaire de la rue de Lourcine. Il assure également la mise en scène des Soldats de Jakob Michael Reinhold Lenz en 1967.

La faillite, en 1969, du Théâtre de Sartrouville, pousse Patrice Chéreau vers l'Italie, où il intègre le Piccolo Teatro de Milan. Il travaille en même temps en France, où il se met en scène, à Marseille, dans Richard II de William Shakespeare.


Puis de 1971 à 1977, il dirige avec Roger Planchon et Robert Gilbert le Théâtre National Populaire de Villeurbanne auquel il donne de nouvelles ambitions, proches des idéaux de mai 68.


En 1976, Patrice Chéreau vit une expérience exceptionnelle : la mise en scène de la Tétralogie de Richard Wagner, à la demande de Pierre Boulez, pour le centenaire de l'Opéra de Bayreuth, sanctuaire du compositeur allemand.


PATRICE CHEREAU Sans_t12

https://www.dailymotion.com/video/xfd662_chereau-a-bayreuth_news

Son travail sur L'Anneau du Nibelung de Wagner pour le « Ring du centenaire » (1976 à 1980) au Festival de Bayreuth le rend célèbre sur le plan international.

En 1979, Boulez fait à nouveau appel à lui pour la mise en scène de Lulu d'Alban Berg.

Son fécond et audacieux travail de metteur en scène est largement reconnu en Europe pour son goût de l'innovation esthétique.

Son écriture visuelle laisse une place importante au mystère, au fantasmagorique et à l'hyper-expressivité.
Elle mêle la sensualité des corps à une dimension archaïque du jeu d'acteurs.

Héritier comme ses confrères Bernard Sobel, Ariane Mnouchkine, Roger Planchon et Giorgio Strehler de Bertold Brecht (pour la notion de distanciation et d'art engagé) et d'Antonin Artaud (pour l'idée de théâtre de la cruauté) , Chéreau a pour certains franchi une étape décisive dans la représentation théâtrale contemporaine et donné une nouvelle signification à l'espace scénique tant par la réflexion artistique qu'il propose que par l'immense succès rencontré par ses créations .


Son univers plastique trouve une sphère d'influence assez large : il reconnaît notamment l'expressionnisme allemand et l'œuvre d'Orson Welles (qu'il découvrit dans sa jeunesse à la cinémathèque) comme des modèles fondateurs


Le Cinéma



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Pour Chéreau, le cinéma garde en commun avec le théâtre l'unité de lieu et de temps : les scènes deviennent à l'écran des séquences. Mais pour lui le cinéma permet de mieux mettre en valeur les émotions picturales de son enfance et de mieux illustrer les tourments de l'âme.

Il invente donc un cinéma singulier, sensible à certaines recherches stylistiques et qui alterne entre grand spectacle flamboyant et intimisme.

Ses réalisations cinématographiques ne sont reconnues que tardivement.
Le premier long métrage de Patrice Chéreau, La Chair de l'orchidée, adapte avec liberté, en 1974, le roman éponyme de James Hadley Chase et élabore un univers à la lisière du fantastique, privilégiant les thèmes du désir, de la folie et de la mort.


Son deuxième film, en 1978, Judith Therpauve avec Simone Signoret dans le rôle-titre, bien que très dense et voulu ancré dans une réalité sociale contemporaine, semble pourtant être son œuvre la moins aboutie.




Les Amandiers






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De 1982 à 1990, Chéreau dirige la maison de la culture de Nanterre, devenue Théâtre Nanterre-Amandiers, Centre Dramatique National à son arrivée.

En 1983, après Combat de nègre et de chiens, de son ami Bernard-Marie Koltès dont il fait connaître l'œuvre, il monte Les Paravents de Genet en farce sulfureuse, utilisant la salle comme extension de la scène .

Il alterne avec bonheur le classique (Marivaux, Mozart...) et le contemporain.

Il trouve également le temps de se consacrer à sa carrière d'acteur, interprétant Camille Desmoulins dans Danton d'Andrzej Wajda et Napoléon dans Adieu Bonaparte de Youssef Chahine.



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Durant cette période, il réalise son film le plus personnel, L'Homme blessé en 1983 qui dérange pour sa peinture désenchantée d'une époque puis par l'évocation d'une crise d'identité sexuelle.

Pour ce film, il obtient, avec Hervé Guibert, le César du meilleur scénario original en 1984.


En 1987, il présente au Festival de Cannes Hôtel de France, transposition du Platonov de Tchekhov dans une époque moderne.

L'année suivante, il montre au Festival d'Avignon sa mise en scène d'Hamlet de Shakesperare qui fait date pour la prestation de Gérard Desarthe dans le rôle-titre puis pour l'inclusion de morceaux de musique contemporaine dans le déroulement de la tragédie.

Le travail de Chéreau est récompensé par un Molière en 1989.





La maturité




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À la fin de la saison 1989-1990, Chéreau quitte le théâtre des Amandiers.

Il se consacre à l'opéra (Wozzeck, de Berg, 1993 ; Don Giovanni, de Mozart, 1994) et à la préparation d'une fresque cinématographique baroque sur le massacre de la Saint-Barthélémy, La Reine Margot.


Ce film à grand spectacle, sanglant, shakespearien et porté par l'interprétation d'Isabelle Adjani, est tiré d'un roman d'Alexandre Dumas. Le scénario a été écrit sur quatre ans en collaboration avec Danièle Thompson. L'œuvre reçoit deux prix à Cannes en 1994 : le Prix du jury et le Prix d'interprétation féminine pour Virna Lisi qui tient le rôle de Catherine de Médicis.






En parallèle, il met en scène à l'Odéon, Le Temps et la chambre de Botho Strauss (1991) puis une nouvelle version de Dans la solitude des champs de coton, de Bernard-Marie Koltès, en 1995.



Nouvelle réalisation au cinéma : Chéreau nous invite à le suivre à Limoges dans une étrange famille pour le tragi-comique Ceux qui m'aiment prendront le train. Sa réalisation est gratifiée d'un César en 1999.



En 2000, il réalise, pour la première fois à l'étranger et en anglais, Intimité, tiré de certains récits d'Hanif Kureishi, qui rencontre le succès auprès du public.

Absent de la sélection cannoise, il remporte l'Ours d'or à Berlin en 2001 et vaut à Kerry Fox l'Ours d'argent de la meilleure actrice. Le film obtient également le Prix Louis-Delluc en 2002.

Ce drame traite de l'échec d'une relation amoureuse et prend pour trame de départ l'histoire de deux personnes égarées ne connaissant rien l'un de l'autre mais réunies chaque semaine pour avoir des rapports sexuels.

Chéreau met ensuite en scène l'un de ses plus grands triomphes aux Ateliers Berthier du Théâtre de l'Odéon : Phèdre de Racine, qui fait exploser la diction de l'alexandrin classique.
Le rôle-titre est confié à Dominique Blanc et celui de Thésée à Pascal Gregory.










Rêve d'automne en DVD




de Jon Fosse
Mise en scène : Patrice Chéreau
avec Valeria Bruni-Tedeschi, Pascal Greggory, Bulle Ogier, Bernard Verley et Marie Bunel





PATRICE CHEREAU Reve-d10







"Un grand hall peint en rouge, des tableaux tapis dans l’ombre, la salle d’un musée où sont convoqués les vivants et les morts, ces vies entières qu’on traverse avec eux, la mort doucement qui ronge tout, le désir qui s’en va. La métaphore de Jon Fosse, ce cimetière de tous les enterrements, de toutes les vies, et celle du musée, cette envie violente qui m’avait traversé l’esprit il y a longtemps lorsque, ayant lu le texte par hasard, je m’étais promené dans les salles du musée du Louvre où, depuis, la pièce a vu le jour à la Toussaint 2010.



L’enterrement d’une femme âgée qui devient l’enterrement de tout un monde, la salle vide d’un musée où les corps s’empêchent et se déchirent, la mort de toute une lignée du côté des hommes: la grand-mère paternelle, le père, puis cet homme-là que nous raconte Fosse, cet homme sans qualités et son fils de dix-neuf ans qui ne connaîtra jamais son enfant.


Et dans ces vies entêtées, l’ombre envahissante du désir et du deuil unis dans un même mausolée.


Un rêve en automne, des visages qui aiment et souffrent, un désir sexuel inassouvi, rongé par la mort et le suicide, des corps qui ne font que désirer pourtant, un coeur, comme dirait Pierre Guyotat, qui ne fait passer que du sang, et du sang qui ne chauffe plus.


Une banalité aussi, comme la vie même, ou comme une nouvelle de Carver.
Un homme et une femme qui se sont connus se retrouvent devant nous : qu’est-ce qui existe ou a existé entre cet homme et cette femme? De quoi sera fait leur futur auquel on assiste déjà ? Et puis : qui est mort ? et qui va mourir?
On parle ici de sexe comme on parle de Dieu parce qu’on neparle ici que de fin, de dilution : mort des inconnus, mort des proches, mort de l’amour, inassouvi et pourtant perpétuel.


Car les hommes vivent longtemps encore quand tout semble mort en eux, et c’est simplement ce qu’on appelle la vie de tous les jours : dans la lueur froide des échanges sexuels, dans cette nuit déjà tombée, le désir brille encore d’un feu qui ne veut pas s’éteindre.

Et puis, il y a les mères qui,comme dans la pièce, survivent à tout, et les grand-mères, infatigables fantômes dansants, habitantes d’un musée-cimetière qui savent regarder tout cela de leur oeil blasé, attendant que leurs arrières petits-fils viennent les rejoindre dans la tombe, là où est leur vraie place.


Accouplements et mythologies familières : tant d’êtres vivants ou morts, nos fantômes ; la nuit venue, ils se réincarnent sous nos yeux."

Patrice Chéreau






Extrait Bonus Reve d'automne par franceinter


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MessageSujet: Re: PATRICE CHEREAU   PATRICE CHEREAU EmptyLun 18 Mar - 17:41

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Master class Patrice Chéreau     Arte 17/03/2013





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Patrice Chéreau donnera une Master Class ce dimanche 17 mars à 17h au Forum des images. L'occasion pour le cinéaste de nous en dire plus sur son œuvre.



Une heure et demie pour revenir sur 34 ans de carrière… À 17h, ce dimanche, Patrice Chéreau se prêtera à l’exercice de la Master class.
Animée comme chaque mois par Pascal Mérigeau au forum des images, l’évènement affiche déjà complet mais sera retransmis en direct et en intégralité sur le site d’Arte.



A revoir pendant 7 jours sur le site Arte TV



http://www.arte.tv/fr/7385012.html



Primé aux César, à Berlin et à Cannes, Patrice Chéreau est aujourd’hui l’un des grands noms du cinéma français .

D’abord metteur en scène de théâtre puis d’opéras, Chéreau réalise son premier long en 1974. Il s’agit de La Chair de l'orchidée et dès lors, il s’impose comme un cinéaste singulier.
Mais c’est La Reine Margot qui, en 1994, lui apporte une large reconnaissance de ses pairs. Depuis, il y a eu Ceux qui m'aiment prendront le train, Son frère ou encore Intimité. « Faire un film, pour moi, c’est une sorte d’énigme à résoudre, un secret à percer».
Peut-être nous en dira-t-il un peu plus sur ses énigmes et ses secrets qui façonnent le cinéma français.



L'interview de Patrice Chéreau, que nous avons rencontré pour la sortie de Persécution en 2009











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Dernière édition par Bridget le Ven 12 Juil - 0:53, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: PATRICE CHEREAU   PATRICE CHEREAU EmptyVen 12 Juil - 0:51

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Aix-en-Provence : “Elektra” divinement décapée par Patrice Chéreau


 
Interprétation inouïe, orchestre galvanisé, décors mémorables… En débarrassant “Elektra” de ses clichés scéniques, Patrice Chéreau lui donne une tenue magistrale.

Festivals d'été 2013 : Gilles Macassar / Télérama



PATRICE CHEREAU Elektr11
@ Pascal Victor / Artcomart




C'est l'événement dont bruissait tout le festival : le retour de Patrice Chéreau à Aix.


Sa dernière participation, mémorable, remontait à 2007, où il avait mis en scène un opéra de Janacek inspiré des souvenirs de Dostoïevski dans un bagne sibérien, De la maison des morts.

Il revient au Grand Théâtre de Provence pour une autre maison des morts, ou plutôt un palais-prison des survivants : celui des Atrides, à Mycènes. De retour de la guerre de Troie, Agamemnon y a été assassiné par sa femme Clytemnestre et son amant Egisthe.

Si l'affaire n'est pas enterrée, c'est que chaque jour Electre, l'une des filles d'Agamemnon, invoque le fantôme de son père, attendant le retour de son frère Oreste pour armer son bras, et que justice soit faite contre les meurtriers de son père.





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La soprano allemande Evelyn Herlitzius apporte l'endurance d'une sportive de haut niveau à Elektra. © Pascal Victor / Artcomart





Le fidèle Richard Peduzzi, illustrateur attitré des spectacles de Chéreau, a bâti un de ces décors monumentaux dont il a le secret, et dont on se souviendra longtemps : de hautes murailles nues, à la géomètrie tranchante et désolée, enserrant une cour intérieure déserte, forteresse à la fois spacieuse et cadenassée, que tamise un faux-jour crépusculaire, une pénombre grise de début d'orage.
Une Grèce cimentée et antarctique, digne d'un tableau de Chirico dans sa période « métaphysique ».




Pendant de longues minutes, avant que l'orchestre ne lance les premiers accords fatidiques qui scandent les syllabes A-ga-mem-non, les servantes nettoient en silence le sol souillé de sang.

Patrice Chéreau et son équipe se sont livrés au même travail de décapage sur le livret de Hugo von Hofmannsthal, qui s'inspire des tragédies antiques d'Eschyle et de Sophocle au travers de Shakespeare (Hamlet) et des théories de Freud sur l'hystérie féminine et l'interprétation des rêves.

D'une tenue magistrale, leur spectacle débarrasse l'opéra de Richard Strauss, créé en 1909, des clichés scéniques qui le caricaturent trop souvent.



Plus de Clytemnestre en reine décatie, ou en pocharde endiamantée : l'altière Waltraud Meier lui prête une féminité souveraine, ferme maintien de mannequin, moulé dans une élégante robe fourreau.

Plus de Chrysothémis en fille cadette nunuche, restée à la lecture des Claudine quand son aînée Electre potasse le traité du désespoir de Kierkergaard : la soprano canadienne Adrianne Pieczonka lui prête une saine clairvoyance d'adulte équilibrée.


Oreste, non plus, n'est pas le surhomme providentiel tant attendu, mais une sorte de bûcheron étranger, mandaté pour une sale besogne de justicier, et qui, après l'avoir accomplie froidement, semble repartir dépité, sinon dégoûté de sa mission.




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Oreste, sorte de bûcheron étranger, mandaté pour une sale besogne de justicier.
© Pascal Victor / Artcomart




Quant au rôle écrasant d'Elektra, dévolu en général à des walkyries monolithiques, la soprano allemande Evelyn Herlitzius – physique juvénile et idéalisme d'adolescente – lui apporte l'endurance d'une sportive de haut niveau, au sortir d'une séance d'entraînement.


La vengeance est un plat qui ne sert pas les muscles à froid. Timbre de ronce au début, sa voix se polit et se réchauffe au fil des aspérités de la partition, pour rayonner d'un éclat enfin solaire dans l'ultime extase.



Dans la fosse, à la tête d'un orchestre de Paris superbement galvanisé, le chef finlandais Esa-Pekka Salonen accomplit sur la partition de Richard Strauss le même travail décapant que Patrice Chéreau sur le livret de Hugo von Hofmannsthal.


On a pu entendre des Elektra d'un lyrisme plus sentimental, d'une chaleur plus sensuelle : on n'en a jamais entendu de plus inouïes en alchimies ensorcelantes de timbres, en troubles harmoniques insidieux et énigmatiques.


« Il n'y a pas de dieux dans le ciel », enrage Elektra, en apprenant la fausse nouvelle de la mort d'Oreste. C'est peut-être qu'ils se sont réfugiés dans la fosse d'orchestre.




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Elektra, tragédie en un acte de Richard Strauss, livret de Hugo von Hofmannsthal, d'après Sophocle, avec Evelyn Herlitzius, Waltraud Meier, Adrianne Pieczonka, Roberta Alexander, Mikhail Petrenko, Tom Randle, Coro Gubelkian,

Orchestre de Paris, dir. Esa-Pekka Salonen, mise en scène Patrice Chéreau, collaboration artistique Thierry Thieû Niang.

Au Grand Théâtre de Provence, les 10, 16, 19 et 22 juillet 2013 à à 20h, le 13 à 17h.
En direct sur Radio Classique le 13 juillet 2013, et sur Arteliveweb le 19.
En différé sur Arte et France Télévision




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MessageSujet: Re: PATRICE CHEREAU   PATRICE CHEREAU EmptyMer 17 Juil - 0:40

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 « Elektra », animal tragique




Attendue avec ferveur comme une belle promesse, la production d’Elektra de Richard Strauss par le tandem Esa-Pekka Salonen-Patrice Chéreau est telle qu’on l’imaginait.






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Tantôt cinglante, tantôt caressante, elle s’appuie sur l’engagement infini des musiciens.


Oreste n’a pas reconnu sa sœur. Comment la belle Électre, « dont les cheveux étaient de ceux qui font trembler les hommes », a-t-elle pu devenir cette créature maigre, pâle et inquiète, vivant au milieu des chiens, méprisée par les servantes du palais dont elle était la radieuse princesse ?



Créé à Dresde en 1909, Elektra de Richard Strauss (lire notre décryptage) sur un livret d’Hugo von Hofmannsthal remonte aux sources de la tragédie antique : cet opéra en un acte – une heure quarante seulement mais d’une intensité qui rendrait difficilement supportable une durée plus longue… – se focalise sur la personnalité malade de la fille d’Agamemnon.


Électre ne pourra vivre ou mourir qu’une fois vengé le meurtre de son père, dans le sang de Clytemnestre, l’épouse adultère, et de son amant Égisthe.



Aimée mais incomprise de sa sœur Chrysothemis, la jeune fille est rongée par son obsession, déterminée à frapper elle-même si aucun bras plus vigoureux ne vient la seconder. Ce sera celui d’Oreste, le prince exilé, qui accomplira le crime. Mais l’en dépossédera aussi…






Une âme angoissée





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ELEKTRA: répétition (Patrice Chéreau, Evelyn Herlitzius)
(photo by Pascal Victor/ArtComArt)





Sur le plateau du Grand Théâtre de Provence, Evelyn Herlitzius erre comme une âme angoissée, traversée par la musique qui fait d’elle un stupéfiant médium.
Patrice Chéreau a retrouvé en cette chanteuse-actrice une formidable complice, à l’image de Teresa Stratas, l’inoubliable Lulu d’Alban Berg il y a bien longtemps…




Silhouette toute mince dans son costume androgyne – Elektra a abdiqué toute coquetterie – à la fois souple et anguleuse, gracieuse et roide, la soprano allemande parcourt la scène d’un pied cambré de danseuse affolée, ouvre une bouche immense pour mordre dans le chant paroxystique imposé par Strauss, se recroqueville comme une bête blessée, lance des regards magnétiques à ceux qui redoutent sa folie, mais étreint avec une poignante tendresse son jeune frère enfin retrouvé.




Evelyn Herlitzius utilise les défauts de sa voix (timbre sans charme particulier, ligne parfois heurtée, aigus lasers) comme de violentes couleurs, jetées et mêlées sur sa palette expressive.
N’en ressort que mieux le contraste avec sa sœur Chrysothemis, incarnée par Adrianne Pieczonka dans la grande tradition du lied germanique, d’une voix moelleuse, saine et épanouie.


Mais aussi avec la reine Clytemnestre à laquelle Waltraud Meier, toute vêtue de noir, prête sa classe folle et la fraîcheur inentamée de son instrument, même si le rôle, trop grave pour elle, perd de son impact dramatique.






Un jeu d’acteur précis et juste






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Les hommes ne sont que des ombres ou presque dans ce gynécée, même l’Oreste d’un Mikhail Petrenko trop falot.

Mélancolique, le mélomane salue la présence quasi muette de Donald McIntyre et Franz Mazura, qui furent de fidèles compagnons des aventures, wagnériennes notamment, de Patrice Chéreau…



Dans le décor unique conçu par Richard Peduzzi, les trois femmes puissantes, entourées de servantes quasi omniprésentes dans leurs vêtements modestes qui leur donnent une allure de réfugiées en transit, s’affrontent dans d’impossibles dialogues qu’elles ne cessent pourtant de provoquer.



Patrice Chéreau cisèle comme à son habitude un jeu d’acteur précis et juste, d’une émotion contenue et pourtant aveuglante, d’une beauté formelle fondée sur de savantes diagonales, dignes d’un tableau du Grand Siècle.







Vivats dominants






La vaste cour grise à l’architecture intemporelle où se joue le drame est somptueusement éclairée par Dominique Bruguière : halos bleutés, lueurs vaguement ocrées, clairs-obscurs immémoriaux laissent deviner la course du jour.
Mais, seule, une modeste bougie répandra sa lumière vacillante sur la mort des assassins d’Agamemnon.



Au moment des saluts et des acclamations, on n’a pas compris les quelques huées adressées à Esa-Pekka Salonen, au milieu des vivats heureusement dominants.

Que peut-on reprocher à sa direction musicale ? La cohésion merveilleuse d’un Orchestre de Paris galvanisé et galvanisant ?

L’opulence solaire des grands tuttis qui ne tombent jamais dans l’excès bruyant ? Le délié des phrasés, insinuantes et sensuelles guirlandes annonçant déjà Le Chevalier à la rose ?

Les irrésistibles crescendos, tendus à l’extrême, pour chauffer à blanc l’hystérie d’Elektra ou les frémissants frôlements de cordes lorsqu’elle répète inlassablement le nom d’Oreste ?




La musique et l’intrigue d’Elektra participent pleinement de l’univers esthétique du chef comme de celui du metteur en scène.
Le résultat de leur travail commun n’est donc pas une surprise. Mais bien la confirmation d’un talent impressionnant à faire advenir la délicatesse au cœur du gigantisme, la fragilité au sein de la rage. L’éloquence irremplaçable de l’art au milieu du chaos des sentiments.




Emmanuelle GIULIANI, à Aix-en-Provence  

http://www.la-croix.com/Culture/Musique/Elektra-animal-tragique-2013-07-12-985408







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MessageSujet: Re: PATRICE CHEREAU   PATRICE CHEREAU EmptyVen 26 Juil - 13:11

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Elektra de Richard Strauss au Festival d’Aix en Provence




Filmé le 19/07/2013 | En ligne encore pendant 54 jours et 10 heures





« Agamemnon ! » Le nom du défunt roi de Mycènes sort de la bouche de sa fille comme un feulement vertigineux, une plainte lancinante.

Depuis que son père a été assassiné par sa mère, Electre ressasse ce nom, son cri lui tient lieu d’exutoire. Elle s’en repaît, elle s’y consume et ne vit plus que pour la vengeance.
Car Electre guette le retour de son frère Oreste : lui seul pourrait accomplir cette revanche que la destinée réclame mais que la nature réprouve.


De cette attente, Sophocle a tiré une tragédie que le poète Hofmannstahl a revisitée en homme du XXe siècle naissant, lequel sait combien tout mythe antique est un habit chamarré pour la psychè humaine.
De ce cri à la fois universel et intime, Richard Strauss a fait un opéra-coup-de-poing, avec sa partition volcanique, son acte unique d’attente fiévreuse puis de violence irrépressible, son immense orchestre aussi raffiné que déchaîné, et ses voix de femmes qui chantent la détresse d’une famille décomposée.



La solitude de l’individu et la violence intime gisent au coeur du travail théâtral de Patrice Chéreau. Il était donc naturel pour lui d’entrer, en compagnie du chef d’orchestre Esa-Pekka Salonen, dans la course folle d’Elektra, la femme dont le cri est un chant.



Photo © Pascal Victor


• Artistes : Esa-Pekka Salonen (Direction musicale)

Evelyn Herlitzius (Elektra), Waltraud Meier (Klytämnestra), Adrianne Pieczonka (Chrysothemis), Mikhail Petrenko (Orest), Tom Randle (Aegisth), Franz Mazura (Der Pfleger des Orest), Florian Hoffmann (Ein junger Diener), Sir Donald McIntyre (Ein alter Diener), Renate Behle Erste Magd (Die Aufseherin / Die Vertraute), Bonita Hyman (Ernst Magd), Andrea Hill (Zweite Magd / Die Schleppträgerin), Silvia Hablowetz (Dritte Magd), Marie-Eve Munger (Vierte Magd), Roberta Alexander (Fünfte Magd), Coro Gulbenkian (Chœur)

Orchestre de Paris (Orchestre) • Mise en scène : Patrice Chéreau (Mise en scène), Thierry Thieû Niang (Collaboration artistique à la mise en scène) •
Décors : Richard Peduzzi • Production : Bel Air




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http://liveweb.arte.tv/fr/video/Elektra_Richard_Strauss_Festival_d_Aix_en_Provence_Esa-Pekka_Salonen_Patrice_Chereau/






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MessageSujet: Re: PATRICE CHEREAU   PATRICE CHEREAU EmptyLun 7 Oct - 23:59

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Disparition de Patrice Chéreau




PATRICE CHEREAU 55600210



L’homme de théâtre et de cinéma est mort hier à 68 ans. De Milan à Bayreuth ou Nanterre, il a révolutionné la mise en scène.





Parfois, on se disait : «Chéreau, c’est un peu hystérique, non ?» Ou électrique, selon les jours. Mais d’une hystérie qu’on reconnaissait comme la nôtre, un peu honteuse, quelque chose de mis à jour et d’irrité, de terriblement humain.


Ceux qui l’avaient pris en train par le cinéma ne savaient parfois pas qu’il avait d’abord été un jeune génie de la mise en scène. Et puis les opéras. D’autres qui aimaient Nanterre n’aimaient pas ses films. Dans tous les cas, c’était une histoire galvanique, une histoire de corps.


 

Au théâtre, Chéreau n’aura eu finalement qu’un maître, Giorgio Strehler. A une époque - les années 70 - encore marquée par le brechtisme et ses figures imposées - dépouillement, distanciation, souci didactique -, Strehler, maestro du Piccolo Teatro de Milan, maintient la flamme d’un théâtre qui ne récuse rien de la tradition (costumes, décors, lumières) et assume la dimension psychologique du jeu des acteurs.


Les mois que Chéreau passe à Milan auprès du metteur en scène italien sont pour lui l’époque de formation la plus intense. Il y développe aussi son goût de l’opéra, et y affine sa formation picturale.


De Strehler, il retient encore la dimension artisanale du métier, avec un metteur en scène chef de chantier, assurant le lien entre les corporations.
Un metteur en scène qui n’est pas un démiurge solitaire, mais un maître d’œuvre travaillant en cheville avec ses collaborateurs artistiques, et se nourrit de l’échange.
Chéreau avait viscéralement besoin des autres. Et d’abord de Richard Peduzzi, compagnon de toute sa carrière, avec qui il aura à peu près tout conçu, dont l’historique mise en scène de la Tétralogie.





Cubiques.



C’est nourri de tout ce qu’il a appris à Milan qu’il monte en 1973 la Dispute de Marivaux, avec tous ceux qui constitueront pendant des années sa garde rapprochée, Peduzzi pour les décors, Jacques Schmidt pour les costumes, André Diot à la lumière et André Serré au son.


Un spectacle coup de tonnerre dans le ciel du festival d’Automne, avec les hautes structures cubiques de Peduzzi, les lumières tombées du ciel et l’engagement physique des acteurs, comme si le plateau était un champ de bataille.
C’est, au-delà de l’extrême soin porté aux images, la seconde marque de fabrique de Chéreau : la transformation des comédiens - des chanteurs à l’opéra - en combattants des sentiments.

Les six ans qu’il passe au TNP de Villeurbanne, de 1971 à 1977, auprès de Roger Planchon et les moyens scéniques mis à disposition lui permettent d’autre part d’affirmer son goût pour les grands décors et les grosses machines.
Quand il est nommé à la tête des Amandiers de Nanterre en 1982, Chéreau est déjà plus qu’un maître, un monstre sacré. La rencontre avec Koltès achève de forger la légende. Jusqu’à l’épuisement.




Conjuguant l’austère et le flamboyant, Chéreau avait un tempérament ultralyrique. Côté opéra, dès 1974, il signe une production des Contes d’Hoffmann d’Offenbach, d’une grande puissance poétique.

Mais c’est avec le Ring de Wagner en 1976 à Bayreuth qu’il impose son style à la fois fouillé et éruptif, intellectuel et physique. Il a 31 ans, il est proposé par Pierre Boulez. Leur lecture «révolutionnaire» va déclencher l’hystérie, d’autant qu’un nouveau Ring doit être amorti sur quatre ans.



A la direction analytique du chef répond l’engagement du metteur en scène, creusant le texte dans ses moindres recoins et investissant d’intentions interprétatives chaque geste des chanteurs.

Adieu mythologie nordique et casques à pointes, le Ring devient une métaphore de la révolution industrielle et des ravages du capitalisme.
En 1980, le monde de l’opéra a changé et le public applaudit debout les dernières représentations.


Entre-temps, Chéreau a participé à une autre production lyrique majeure : la création mondiale de la version intégrale de Lulu au Palais Garnier, toujours sous la baguette de Boulez. Agressive, décadente, noire, la lecture de Chéreau joue du contraste entre la vivacité de l’héroïne et le monumentalisme écrasant des décors, et rend encore plus inquiétant et passionnant le chef-d’œuvre de Berg.



Dans les années 80, rançon de ses succès au théâtre et au cinéma, il ne signe qu’une mise en scène d’opéra, celle du Lucio Silla de Mozart.
Avec le Wozzeck de Berg qu’il monte en 1992 au Châtelet, Chéreau passe à la vitesse supérieure. Les personnages semblent poussés depuis les coulisses, tandis que les éléments de décor miniatures glissent à toute vitesse sur le plateau : on est dans le cerveau dérangé du héros. Il livre ensuite un Don Giovanni emmuré dans sa solitude de séducteur.


Ce seront ensuite un Cosi Fan Tutte, un De la maison des morts qui fait date, puis Tristan et Elektra en juillet dernier, des sujets allemands comme il aimait à le rappeler, noirs, romantiques, sous le signe du dérangement, de la folie tragique.




Poupée.




Si tel ou tel médium a parfois pris le pas sur l’autre selon les années (avec une interruption en particulier dans la mise en scène opératique), Chéreau se lance à corps ouvert dans tous les médiums à la fois.

On croit parfois que l’Homme blessé, avec Hervé Guibert, est son premier film, mais la Chair de l’orchidée le précède en 1975. Chéreau travaille avec le scénariste de Buñuel Jean-Claude Carrière et le chef opérateur de la Maman et la Putain, Pierre Lhomme, qu’il retrouvera sur Judith Therpauve avec Simone Signoret trois ans plus tard.


Cette description du déclin d’un quotidien régional avec ses mesquineries, et ses luttes syndicales peut surprendre tant le metteur en scène s’essaie à une radiographie d’un univers prosaïque. Beaucoup ont dit qu’il tentait alors de définitivement se débarrasser de cette accusation de théâtralité qui le vexe.




Une rupture s’opère avec l’Homme blessé dont il écrit au long cours (pendant six ans) le scénario avec Guibert. Soudain, la gare du Nord devient ce château vide où errent comme des damnés des dragueurs pédés insatisfaits. Clodos et gigolos se croisent comme des citations de Genet ou Pasolini et l’amour entre le jeune homme joué par Jean-Hugues Anglade et l’homme mûr (Vittorio Mezzogiorno) donne lieu à Cannes à un sursaut de bonnes mœurs effarouchées lorsque l’un et l’autre s’enculent plein cadre.

Le film est produit par Claude Berri, lequel sera aussi le partenaire financier sur la Reine Margot.
Dix ans séparent les deux films. Chéreau s’intéresse au massacre de la Saint-Barthélémy. Il a déjà monté la pièce de Christopher Marlowe, Massacre à Paris.


Curieusement, le cinéaste se met au travail avec Danielle Thompson pour écrire l’adaptation du roman d’Alexandre Dumas. Mais le projet traîne, Berri se décourage, reprend du poil de la bête, puis c’est Adjani voulue pour le rôle-titre qui n’y croit plus.


«C’est avec la Reine Margot que j’ai appris à faire du cinéma», déclarait Chéreau en mai. Le film reste un de ses meilleurs, la vision d’un Paris livide et d’une cour royale peuplée d’aristocrates fiévreux est fascinante.
La matière historique, la rivalité entre catholiques et protestants, les coups de dagues dans le dos et les empoisonnements, les grandes saignées absurdes, tout lui profite en une série de tableaux rutilants et toxiques où Isabelle Adjani passe telle une poupée écarquillée.



Du film émane une ambition rare, pourtant ratée aux yeux de nombreux critiques : raviver un cinéma européen en mêlant les nationalités des acteurs, sortir du cadre franco-français de l’histoire, établir une esthétique qui s’inscrit dans la lignée du Visconti des Damnés.




Névroses.



Le même esprit collégial traverse Ceux qui m’aiment prendront le train en 1998. Jean-Baptiste Emmerich, odieux peintre parisien à la vie très parisienne, décède et, à son enterrement à Limoges (ville où ne comptent que les fabricants de chaussures et les cimetières), se rendent ses amants, les amants de ceux-ci, sa famille, ceux qui l’aimaient ou le détestaient.


Chéreau signe une forme toute personnelle de retour à la famille vu comme un essaim de névroses. Il y déshabille les corps de ses acteurs, cite la peinture de Francis Bacon dans sa lecture de la chair.

A Cannes, il expliquait à Libération : «Cette présence des corps et des corps à corps est pour moi une façon de connaître l’autre. Il doit y avoir quelque chose qui passe et qui tient au regard particulier que j’ai sur les acteurs. [La voix des acteurs au théâtre] c’est une capacité de projection dont j’ai précisément envie de sortir avec le cinéma, pour me rapprocher des visages.»




Littéralement, puisqu’il adapte en 2001 Intimité de l’écrivain anglais Hanif Kureishi, récit d’une relation purement sexuelle entre deux anonymes, avec la présence décatie de l’ex-égérie 60’s Marianne Faithfull. Il reçoit l’ours d’or à Berlin.

Patrice Chéreau est décédé hier matin. Il avait 68 ans.


Par Éric Dahan, clément Ghys, Éric Loret, Didier Péron et René Solis
http://www.liberation.fr/culture/2013/10/07/le-roi-chereau_937783





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MessageSujet: Re: PATRICE CHEREAU   PATRICE CHEREAU EmptyMar 8 Oct - 0:52

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LE ROI CHEREAU






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Patrice Chéreau, temps qu’à faire.......Eric LORET (Article publié le 7 décembre 2009 )



Metteur en scène de théâtre admiré et réalisateur de cinéma reconnu, il accélère sa course contre la montre.
Faire le portrait d’un proche est toujours un peu délicat, surtout quand on ne l’a jamais rencontré.


Proche, puisqu’à 14 ans, on était déjà amoureux de Chéreau incarnant Camille Desmoulins, poussin dépressif dans le Danton de Wajda.

Qu’un peu plus tard, on faisait les pissotières avec son Homme blessé, puis qu’il nous suivait à chaque coin d’étude universitaire, lisant même la Dispute de Marivaux par-dessus notre épaule.
Le soir, il venait nous raconter Hamlet, Koltès, Wozzeck et Mozart. La nuit, on le suivait en train au cimetière, il nous troussait dans le sang. Parfois on mourait content.



Et aussi : pourquoi prendre le pinceau quand on possède déjà plein de photos ?


Chéreau, on l’a chez soi en DVD et en bonus, à 31 ans, acharnant ses doigts à vif les uns contre les autres pour réinventer le Ring. Il a un blouson de loulou et à peine quatre mois pour combler Bayreuth.


On le voit modeler la masse des figurants comme un chef d’orchestre. Un peu plus vieux, en 2003, il se tient au bord des corps des acteurs de sa Phèdre, explique qu’il tente de «casser les réflexes».

En quelques clics sur le site de l’INA, c’est un festival de remise de prix et de JT mitterrandiens. La décentralisation culturelle se fait sous nos yeux, Chéreau prend la direction des Amandiers à Nanterre.

On y entre comme au séminaire, lui y installe un restaurant, pour que le monde extérieur ne distraie plus le travail des étudiants.
Ailleurs sur le Web, il soutient Ségolène Royal ou parle de la Douleur de Duras. On apprend que ses parents étaient artistes-peintres, on se rappelle qu’il n’a pas soutenu les intermittents, qu’il ne dit rien de sa vie privée.

On peut même avoir Chéreau en statue du commandeur. Il suffit d’ouvrir n’importe quelle histoire du théâtre, ouvrage théorique ou usuel : «Un des plus grands metteurs en scène de son temps par la puissance et l’originalité de ses points de vue critiques, par la force de son univers plastique (sur lequel vient se greffer très tôt celui du scénographe Richard Peduzzi) et par la radicalité de sa direction d’acteurs : le lyrisme de son écriture scénique exalte la présence charnelle, concrète des corps» (dixit l’Encyclopedia Universalis).


Il n’y a guère que ses confrères pour risquer un regard plus amical que déférent, tel Jean Jourdheuil (1) qui compare sa stratégie à celle de Platini, «les acteurs disposés en tirailleurs à la française, éloignés les uns des autres, de manière à rendre possible à l’occasion un moment de "jeu personnel"».



On sait tout de lui, c’est-à-dire rien, puisque son œuvre ne parle que de nous - marque du grand art.
A la maison de prod de Persécution, la journée promotionnelle tire à sa fin.


Chéreau sort de l’interview précédente, visage souriant, corps intranquille. Dans la salle où a lieu l’entretien, deux fauteuils clubs s’offrent au prélassement. Il préfère s’asseoir au bureau : lui côté hôte, nous côté jardin, la barrière de la table au milieu.


Tout Chéreau devant soi et une heure seulement. On aurait dû capter que le pitch de ce portrait était le temps. Au lieu de ça, on attaque de traviole, se raccrochant à la perche tendue de Persécution. Puisque c’est écrit là, dans le dossier de presse: le héros du film ne peut aimer que dans «la réclamation permanente» et «le sentiment du deuil», choses que Chéreau déclare bien connaître et détester en lui.


Un journaliste convenablement crétin est donc porté à demander si cette histoire de don impossible et de réception difficile s’applique aussi au travail créatif. La réponse est non, très nettement. «Quand les acteurs me disent : "Laisse-moi respirer", je les laisse, j’attends que ça se développe chez eux. Je suis très impatient quant au résultat, mais patient quant au processus, je sais le temps que ça prend. Je pense que je donne et que j’accompagne. C’est dans la vie privée que je suis moins bon.»


Un peu plus loin, il évoque l’ennui du portrait au passé, d’être depuis longtemps un sujet de thèse. «J’ai envie de penser à un prochain film, de m’amuser à refaire du théâtre l’an prochain, je n’ai pas envie qu’on me traîne avec les casseroles de tout ce que j’ai déjà fait.»
Et, l’œil bleu galopin, «en plus, quand je revois la tête que j’avais à 25 ans, c’est une souffrance, quand même».



Alors revenons au temps. On va vous le faire court. Il y a d’abord chez lui la mesure et la durée. Ce que lui a appris la mise en scène d’opéra, dès 1969, qui consiste à «faire du théâtre sur de la musique, avec la musique ou contre, en tout cas sur un temps absolument mesuré, qui m’est donné et dont je ne suis pas maître». Cela lui permet aussi de mener dix choses à la fois, comme de remonter son Tristantout en tournant Persécution, tant sa carrière de réalisateur ne l’a jamais vraiment éloigné de la scène.




Il y a ensuite le désir. Le temps, c’est entendu, n’est jamais que du présent, mais celui de Chéreau ne se tient pas sur la crête du sable écoulé. Il devance au contraire le devenir.
A Nanterre, il y avait tellement de spectacles qu’il n’avait pas le temps de les corriger. «Les corrections étaient dans le spectacle suivant. Mais c’est bien : on fait, on avance en faisant des films, en montant des pièces, et on entre dans un nouveau projet avec la masse des choses qu’il faut changer.

Y compris ce qu’il faut changer en soi. Je me dis que je ne peux pas tout le temps régler les problèmes à coups de cette énergie physique qui me fait me déplacer, travailler avec les acteurs. Ce qui suppose d’être plus attentif aux gens, plus à l’écoute, les regarder mieux.»



Enfin, il y a la répétition et la différence. Chéreau, on le sait, a mis plusieurs fois en scène Dans la solitude des champs de coton de Koltès, et de façon chaque fois renouvelée.

Ces trois aspects (durée, désir, répétition), le cinéma les lui apporte au centuple. Il y a l’image, temps mesuré, qui devient fixe, mais «fait de dynamiques différentes, piano, forte, fortissimo, et de rythme, lent ou rapide».
Et surtout, le devenir palpable, quand on arrive le matin sur le plateau de tournage avec seulement le premier plan en tête. «Ça fait longtemps que j’ai renoncé à savoir quel sera le deuxième. Le plaisir, c’est de se faire peur au cinéma, de ne pas savoir ce qu’on va faire. Je suis toujours dans le désir d’un film que je n’ai encore jamais fait. Même si après on découvre qu’il ressemble aux autres…»



Le changement, toujours possible et impossible à la fois, contradiction en soi. Impatience de la perception : «Je rêve toujours de changement, mais en réalité, ce n’est que des années après qu’on découvre qu’on est changé.»


Le cinéma, art du temps, permet justement d’accélérer cette sensation d’impermanence. «Si à chaque film on me redonnait les rushes trois mois plus tard, je le referais. Parce que la pensée, la réflexion, ne s’arrêtent pas. Pour ça, je suis incorrigible.» Et dans la vie privée ? «Là, c’est un autre truc, je crois qu’on fait tout le temps les mêmes erreurs. C’est ça qui est agaçant.»












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MessageSujet: Re: PATRICE CHEREAU   PATRICE CHEREAU EmptyMar 8 Oct - 0:59

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Intense




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EDITORIAL



La mort de Patrice Chéreau nous touche et nous peine comme la disparition d’un compagnon de route qui suivait l’histoire de Libération comme ce journal accompagna la sienne.

De ces premières mises en scène de théâtre puissantes dans les années 70 jusqu’à son passage à l’opéra (la «Tétralogie» de Wagner à Bayreuth, avec Boulez) et au cinéma (l’Homme blessé, la Reine Margot).


Mais sa signature reste majoritairement associée au théâtre où, le plus souvent, en compagnie du fidèle décorateur Richard Peduzzi, il crée un style dont les trouvailles bousculent et exhaussent aussi bien les classiques (Marivaux, Shakespeare) que les modernes (Heiner Müller). Le théâtre par Patrice Chéreau : «Un contenant qui crée du vide.»


Ce travail de relecture de l’espace scénique augmente en intensité après sa rencontre avec le jeune Bernard-Marie Koltès, au début des années 80. Il signe avec lui un pacte artistique et amical décisif. Combat de nègre et de chiens, Dans la solitude des champs de coton, sont, comme on dit, des dates.

On y expérimente que le montreur d’ombres, le faiseur d’images, est aussi un formidable montreur d’idées.



Et puis il y avait l’homme. Extrêmement cultivé, européen interlope, parlant l’allemand comme une deuxième langue maternelle, chaleureux, séducteur, fidèle en amitié comme en inimitié, changeant, beau, vivant. Et fondamentalement mélancolique. Invité du musée du Louvre en octobre 2010 pour une exposition-intervention mémorable, il nous confiait : «Le mot fantôme est parfait. Il me convient bien.»



Par Gérard Lefort


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Dernière édition par Bridget le Lun 4 Nov - 19:29, édité 2 fois
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MessageSujet: Re: PATRICE CHEREAU   PATRICE CHEREAU EmptyMar 8 Oct - 1:13




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Patrice Chéreau dernier acte




PATRICE CHEREAU Patric11




Ses yeux clairs étaient cerclés d'un cerne violet. On voyait bien qu'il était malade. Mais on ne voulait pas croire que la camarde pouvait l'arracher au monde, à ce monde qu'il illuminait depuis cinquante ans comme un éternel enfant qui inventait des univers et les partageait.




Hier, à l'entracte de la répétition générale d'Aida, à l'Opéra-Bastille, la nouvelle s'est répandue comme un feu, figeant les vi­sages et les paroles. Un grand silence de douleur profonde.
Car, de tous les artistes, Patrice Chéreau était sans nul doute le plus incontestable. Depuis ses années de lycéen, lorsque avec Jean-Pierre Vincent et Jérôme Deschamps il montait ses premiers spectacles, juste avant de rencontrer Richard Peduzzi, à Sartrouville, en 1968, il répandait partout l'émerveillement. Antoine Bourseiller, Ariane Mnouchkine, Giorgio Strehler avaient tendu la main à ce ­garçon d'une beauté sauvage, et très tôt, ses mises en scène avaient époustouflé public comme critiques.



On ne fera pas ici la liste des spectacles prodigieux qu'il a montés. On ne citera pas tous les grands comédiens qui se sont remis entre ses mains, dans la joie et la souffrance parfois. On pense à Pierre Boulez, son père en musique, le compagnon de l'aventure de Bayreuth. Ils avaient la même manière d'articuler, le même timbre feutré et doux, une sorte de léger accent, très particulier.



Il ne retrouvera pas sur un plateau son cher Gérard Desarthe. Le jeune homme tout en nerfs de La Dispute, de Peer Gynt, d'Hamlet… Ils devaient travailler ensemble pour un Shakespeare que tout le monde espérait, en mars prochain, à l'Odéon…



On revoit Patrice Chéreau, à la dernière d'Elektra, cet été, à Aix. Heureux, rieur, libre. Gai comme un enfant, un «enfant expérimenté», comme dit si bien Peter Brook.

Jean et chemise blanche. Sa tenue préférée. Deux jours plus tard, pieds nus sur la scène de l'Opéra-Théâtre d'Avignon, il avait dit Coma de Pierre Guyotat, un texte qu'il aimait. Ce fut son dernier tour de scène.




À Paris, il avait déménagé. S'était délesté des livres qu'on n'ouvre plus, des disques qu'on n'écoute jamais. Il avait choisi l'ascèse d'un espace pur qui donnait sur un jardin. Il regardait les fleurs éclore avec son regard de rêveur. Il pensait à Séville, où il aimait séjourner.


Il était l'enfant d'un couple d'artistes, et il avait pensé un moment devenir peintre, scénographe. C'était un petit poucet aux poches pleines de cailloux. Beaucoup de ses amis étaient morts. Pierre Romans, Bernard-Marie Koltès, tant d'autres. Il affrontait. Il souriait. On espérait…

Hypersensible, intuitif, il parlait toutes les langues de l'opéra et du théâtre. Il lisait tout le temps. On ne l'a jamais vu sans un livre à la main. Il aimait faire découvrir. Partager.




Acteur, il était prodigieux. Puisant au plus profond de son âme blessée d'énigmatiques ressources.

Bonaparte pour Youssef Chahine, au cinéma, il avait attisé les puissances sombres et cocasses à la fois de Koltès dans Dans la solitude des champs de coton.


Le ­metteur en scène nous laisse devant la béance de l'absence. Sans plus désir de rien.




http://www.lefigaro.fr/theatre/2013/10/07/03003-20131007ARTFIG00696-patrice-chereau-dernier-acte.php




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MessageSujet: Re: PATRICE CHEREAU   PATRICE CHEREAU EmptyMer 9 Oct - 14:51




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HOMMAGE



PATRICE CHEREAU Bv_vm_10
Chéreau , Adjani,  La Reine Margot , Cannes 1994




" Patrice, je te croyais éternel "


Réagir après son décès, rendre hommage à ce mort...

N'est-ce pas trop de présences manifestes soudaines, n'est-ce pas le déranger, lui, Patrice Chéreau, qui disparaît brutalement, en semblant s'inspirer, à son insu, de la solitude qui traversait les spectacles, les compositeurs, les auteurs, les personnages et les interprètes élus par lui, avec la même obsession viscérale qui habitait son regard ?

Son regard, un des plus pénétrants que j'aie jamais croisés, et parfois si dur ou douloureux, m'hypnotisait, m'effrayait lorsqu'il dirigeait, alors qu'il me troublait et m'émouvait dans la vie.


La première grande révélation de mon existence au théâtre fut sa mise en scène de La Dispute, de Marivaux, en 1973. Un moment de transport absolu.

La dernière grande révélation de mon existence au théâtre fut Rêve d'automne, de Jon Fosse, en 2010, dans l'enceinte du Louvre.

Un couple se déchire d'amour dans un cimetière parcouru par l'inconscient familial...

J'ai attendu Patrice après la représentation, pour l'embrasser et lui dire mon bouleversement ; et j'ai lu sur son visage une intense crispation, quelque chose qui ressemblait pour moi à la peur du fantôme de la mort, ce même fantôme rôdeur dans la pièce de Fosse, qu'il avait entrepris de maîtriser par la sublimation.

Je me souviens avoir dit aux merveilleux acteurs : "Mais comment allez vous tenir chaque soir sans mourir ? C'est ravageur."



Mon lien pour l'éternité avec Patrice Chéreau est La Reine Margot. Nous sommes tous en train de mourir et de nous en aller un peu chaque jour...

Ses actrices le savent, le sentent...

Valeria Bruni Tedeschi, pour moi, sa divine muse, Dominique Blanc incandescente dans la Phèdre que j'ai désertée, et Anouk Grinberg, irrésistible dans Le Temps et la Chambre, de Botho Strauss, où je ne suis pas entrée...


Pardon, Patrice, je ne me suis pas rendue à ces deux rendez-vous que tu m'avais offerts car je te croyais éternel. "

Isabelle Adjani © Le Monde.




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MessageSujet: Re: PATRICE CHEREAU   PATRICE CHEREAU EmptyMer 9 Oct - 15:04




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Pierre Boulez " L'extrême précision qui caractérise le moindre personnage "





PATRICE CHEREAU Boulez10




Je n'avais pas revu Patrice Chéreau depuis presque un an mais nous gardions des relations suivies. Je lui avais encore envoyé un message d'encouragement cet été pour Elektra de Richard Strauss, sa dernière mise en scène d'opéra au Festival d'Aix-en-Provence.
Il m'avait répondu comme si tout cela appartenait déjà au passé. Nous avons toujours collaboré avec beaucoup de passion.



Patrice Chéreau est le seul metteur en scène - avec Peter Stein - avec lequel j'ai eu envie de travailler.
Il y a eu le Ring, de Wagner, bien sûr, de 1976 à 1980, mais aussi Lulu de Berg en 1979 et pour finir, en 2007, De la maison des morts de Janacek.


Pour moi, ce qui fait la singularité de son travail est l'extrême précision avec laquelle il caractérise le moindre personnage. Cela tient souvent à un détail, mais qui prend alors une dimension humaine porteuse d'une incroyable émotion.



Je l'avais rencontré en 1975 pour le Ring du centenaire à Bayreuth. Il m'avait été recommandé par Michel Guy - alors secrétaire d'Etat à la culture - , et je l'avais proposé comme metteur en scène à Wolfgang Wagner - petit-fils du compositeur - après la défection de Peter Stein.
J'avais quand même demandé : "Deux Français pour un centenaire, cela ne fait pas trop ?"

Wolfgang Wagner m'avait répondu : "Quand il y a du talent, je ne regarde pas à la nationalité."




Suivre son travail m'a tout de suite passionné. Cela a d'ailleurs été profitable à mon propre travail de chef d'orchestre : j'ai reconsidéré certains passages des partitions que je dirigeais.

Il avait une manière tellement concentrée d'être, que cela touchait quelque chose de très profond chez moi. Lui-même venait à toutes les répétitions d'orchestre et en tirait profit. Il prenait des notes.
Au début de Bayreuth, nous nous sommes observés, puis nous avons voyagé ensemble pour aller écouter des opéras.
Enfin, nous sommes devenus ensemble des acteurs principaux de Bayreuth.



La première année du Ring a été vraiment difficile, mais Wolfgang Wagner, qui n'était pas du tout dans l'esthétique de Chéreau, nous a toujours soutenus et nous nous accrochions à lui.
Je dois dire que j'ai été presque étonné de l'impact qu'a eu le Ring, en dehors du fait que nous avions à faire à un public plutôt réactionnaire.

Je me suis toujours senti en sécurité avec Chéreau et quand il voulait essayer quelque chose, je lui disais toujours oui.



Il a toujours respecté mon avis, mais il l'a aussi parfois fait changer. Dans les premières années, j'avais été étonné par la violence de ses mises en scène - notamment dans le Ring. Puis j'ai été frappé par son évolution vers une sorte de résignation.


Quelque chose me revient de De la maison des morts de Janacek. A la fin de l'opéra, le jeune Aljeja se retrouve seul dans la prison, après que son ami et protecteur, Gorjantchikov, a été libéré. Je me rappelle que Chéreau avait traduit ce désarroi en disant que le seul désir qui lui restait était l'envie de mourir.


Je ne peux m'empêcher d'y voir aujourd'hui comme une prescience inconsciente. "




Pierre Boulez © Le Monde






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MessageSujet: Re: PATRICE CHEREAU   PATRICE CHEREAU EmptyMer 9 Oct - 20:35




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Pour revoir le travail de Patrice Chéreau .....




L'homme de théâtre, de cinéma, d'opéra est célébré sur le petit écran qui modifie pour l'occasion ses programmations. À suivre les jours prochains.

Jeudi 10 octobre

Sur France 5, à 21h40. Documentaire Un film et son époque: Il était une fois la reine Margot, qui raconte l'histoire du film de Patrice ChéreauLa reine Margot.


Dimanche 13 octobre

Sur France 2 à 7h, rediffusion de l'entretien que Patrice Chéreau avait accordé à Catherine Ceylac dans l'émission Thé ou café.
Sur Arte à 11h45, rediffusion d'un interview de Patrice Chéreau par Vincent Josse réalisé le 7 juillet 2013, à l'occasion de sa mise en scène d'Elektra au dernier festival d'Aix-en-Provence.
Sur Arte à 13h30. Dans la solitude d'un champs de coton, pièce de Bernard-Marie Koltès mise en scène par Patrice Chéreau lors du Festival d'automne 1995.
Sur Arte à 14h55. Patrick Chéreau un corps au travail, portrait intime de celui qui porta haut l'art de la mise en scène au cinéma, au théâtre et à l'opéra. Par Stéphane Metge (2009).
Sur France 2 à 20h45, diffusion du film de Patrice Chéreau, sorti en 1994: La reine Margot, avec Isabelle Adjani dans le rôle titre, mais aussi Daniel Auteuil ou encore Jean-Hughes Anglade.
Cet œuvre en costumes saisissante obtint le prix du jury et le prix d'interprétation féminine pour Virna Lisi au festival de Cannes et cinq Césars.
Sur Arte à 23h15. L'homme blessé, film de Patrice Chéreau sorti en 1983, avec Jean-Hughes Anglade et Vittorio Mezzogiorno.



Mercredi 16 octobre à 20h15

Sur France 5, l'émission Entrée libre propose un portrait de Patrice Chéreau à partir des témoignages de ceux qui l'ont connu et ont travaillé avec lui.




PATRICE CHEREAU Cheire10




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MessageSujet: Re: PATRICE CHEREAU   PATRICE CHEREAU EmptySam 12 Oct - 15:21



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1976 : Patrice Chéreau choque et bouleverse avec sa mise en scène du Ring de Wagner.
Un tournant dans sa carrière.





En 1976, pour le centenaire du "Ring" de Wagner et à la demande de Pierre Boulez et sous sa direction musicale, Patrice Chéreau met en scène dans le Palais des festivals de Bayreuth les quatre opéras de la Tétralogie du compositeur allemand.

La mise en scène du metteur en scène français, en rupture avec l'originale, transpose le mythe nordique des Nibelungen au XIXe siècle. Le" Ring" devient alors une métaphore de la révolution industrielle et des ravages du capitalisme.

C'est avec cet opéra que Patrice Chéreau impose son style, fouillé, flamboyant, intellectuel et physique. Le spectacle fait scandale puis triomphe.





Prologue : L'Or du Rhin




Le Ring de Wagner - Prologue : L'Or du Rhin







Première journée : La Walkyrie





Le Ring de Wagner - 1ère journée : La Walkyrie








Deuxième journée : Siegfried






Le Ring de Wagner - 2ème journée : Siegfried









Troisième journée : Le Crépuscule des Dieux







Le Ring de Wagner - 3ème journée : Le Crépuscule des dieux



Distribution

Date : 01 Janvier 1980

Durée : 2h 46min

Genre : Musique

Festival : La disparition de Patrice Chéreau

Compositeur : Wilhelm Richard Wagner

Metteur en scène : Patrice Chéreau

Chef d'orchestre : Norbert Balatsch

Orchestre : Orchestre et Choeurs du festival de Bayreuth

Solistes :

   Brünnhilde - Gwyneth Jones /
   Siegfried - Manfred Jung /
   Hagen - Fritz Hübner /
   Alberich - Hermann Becht /
   Gunther - Franz Mazura /
   Gutrune - Jeannine Altmeyer /
   Waltraute - Gwendolyn Killebrew /
   Woglinde - Norma Sharp /
   Wellgunde - Ilse Gramatzki /
   Flosshilde - Marga Schiml /
   1. Norne - Ortrun Wenkel /
   2. Norne - Gabriele Schnaut /
   3. Norne - Katie Clarke




http://culturebox.francetvinfo.fr/le-ring-de-wagner-3eme-journee-le-crepuscule-des-dieux-143143
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MessageSujet: Re: PATRICE CHEREAU   PATRICE CHEREAU EmptyJeu 17 Oct - 13:03

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Ariane MNOUCHKINE :  « Je pleure un ami …… »





PATRICE CHEREAU Patric10





Patrice , très ennuyé , me raconte ses difficultés à monter son projet de film sur Napoléon à Sainte-Hélène. « Mais pourquoi ?

- Al Pacino n’arrive pas à se décider, et puis les producteurs et lui trouvent que c’est très cher.

- Très cher ?- je m’étonne- mais à part Al Pacino lui même, Napoléon à Sainte-Hélène, quand même, ça ne doit pas être si cher que ça !

- Eh bien….c’est à dire ….il y a quand même un flash back de quarante –cinq minutes sur la retraite de Russie …. »


Je me souviens du fou rire qui nous prit . De son espièglerie, de sa malice de collégien.
De sa constance dans la gaieté. De ses étonnements fertiles . De ses yeux qui écoutaient.


De son pas . Court et rapide . Comme si il était toujours en train d’aller se mettre en place. Quelque part . Pour commencer ou poursuivre . Une répétition . Une idée . Un projet . Un rêve .


Je me souviens de sa franchise . De son honnêteté intellectuelle. Je me souviens d’Avignon en 2003. Intermittents . Patatras ! Annulation .

On ne nous aimait pas beaucoup cette année-là . Il s’en étonnait. Il s’étonnait de la violence verbale. Il voulait débattre, comprendre.


Cette nuit , on le pleure à Milan , à Aix-en-Provence , à Bayreuth , à Salzbourg , à Spolète , à Bruxelles , à Paris . On le pleure partout où il a œuvré .On le pleure là où il allait venir un jour et où il ne viendra pas.


On le pleure dans les palais de marbre , mais aussi dans de tout petits théâtres . Des lycéens le pleurent . Des professeurs le pleurent . De grandes actrices le pleurent , qui ont joué avec lui , ou pas . Des divas le pleurent , celles qui l’ont amusé ou exaspéré de leurs caprices , mais qui l’ont fait pleurer de joie aussi.


Et puis des milliers , des centaines de milliers , des millions de spectateurs le pleurent .



Moi , je le pleure . Tous ces rendez-vous que nous avons repoussés , lui et moi . Surtout moi .Trop de travail . Trop de retard . Oh ! Ne faites pas ça . Allez voir vos amis . Car ils meurent , vos amis , et toujours avant vous .



J’aurais  tant aimé voir la retraite de Russie ressuscitée par Patrice Chéreau .



Ariane Mnouchkine .



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MessageSujet: Re: PATRICE CHEREAU   PATRICE CHEREAU EmptySam 19 Oct - 16:31





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La diagonale de Patrice Chéreau




par Daniel Barenboïm




PATRICE CHEREAU 199410






Le grand chef d'orchestre détaille les traits de caractère qui faisaient le génie d'un metteur en scène qui bouleversa les relations entre le théâtre et l'opéra.





En 1976, à l'occasion du centenaire du Festival de Bayreuth, Patrice Chéreau mit en scène le Ring des Nibelungen, dirigé par Pierre Boulez. Aujourd'hui, ce Ring du centenaire est entré dans la légende. Toutefois, l'année de sa création, cette production provoqua un scandale retentissant, chose que l'on a facilement tendance à oublier.



Ce que Patrice Chéreau donna alors à voir sur la scène du Festspielhaus était totalement nouveau, sans précédent d'aucune sorte. Il situa l'action à l'époque de la première de l'opéra, à la fin du XIXe siècle et s'inscrivit, dans sa direction d'acteurs, en rupture avec toutes les précédentes mises en scène. Subitement, des humains se trouvaient au coeur de l'opéra wagnérien !


Patrice Chéreau avait démythifié le Ring, provocation ultime pour les puristes. Mais, trois ans après, cette mise en scène avait fait l'unanimité et remporta un succès incontestable, accédant au statut de légende et devenant même plus : la référence absolue du Ring, non seulement à Bayreuth, mais aussi dans le monde entier.



En 1981, nous devions travailler ensemble sur une mise en scène de Tristan et Isolde à Bayreuth, mais Patrice s'était retiré du projet en déclarant : " Après cinq années passées sur le Ring, je ne peux tout simplement pas faire Tristan. J'ai trop peur que cela ne ressemble à une cinquième partie du Ring et que d'une tétralogie on passe à une pentalogie ! Je dois prendre de la distance. "
J'ai bien compris son point de vue - même si ce recul durerait au final vingt-six ans.



C'est seulement en 2007 que nous avons pu créer notre Tristan à la Scala de Milan.
J'ai été très heureux de ce travail, tout d'abord en raison de l'extraordinaire précision avec laquelle Patrice Chéreau analysa la partition, obtenant ainsi une profonde connaissance de l'oeuvre qui lui permit de donner à chaque personnage l'importance qu'il méritait.
Il avait d'autre part compris que cet opéra ne pouvait être traité comme une oeuvre de musique de chambre. Les scènes intimistes entre Isolde et sa servante Brangäne ou entre Tristan et son compagnon Kurwenal gagnèrent en ampleur et en clarté ; la question de l'espace, public et physique, prenait tout son relief. Je lui fus enfin reconnaissant de m'épargner la vue d'un Tristan agonisant dans un simple bateau au troisième acte. Ce genre d'idioties n'arrivait jamais avec lui.




Chéreau et moi étions amis depuis plus de trente-trois ans. Il était, selon moi, l'un des plus grands metteurs en scène. J'admirais par-dessus tout sa manière de s'intéresser aux détails les plus infimes comme si ces derniers étaient ce qu'il y avait de plus important, dans le travail comme dans le reste.

Sa personnalité artistique se caractérisait par son obsession de la construction et c'est peut-être la raison pour laquelle nous nous comprenions si bien, ayant toujours travaillé de manière très similaire sur cette question.



Sur scène, on parle souvent du danger de se noyer dans les détails et de perdre l'ensemble de vue. Selon moi, cela revient à aborder le problème sous le mauvais angle. Saisir la structure d'ensemble implique justement de s'attaquer aux détails les plus infimes, méticuleusement, pour finalement comprendre la cohérence entre ces parties, établir des liens.

Patrice travaillait ainsi, avec une telle minutie, comme s'il passait tout au microscope. Cette manière de procéder trouvait, et trouve encore, son équivalent dans le domaine de la musique, où la moindre nuance, la moindre variation dans l'interprétation, le plus subtil des changements de tempo jouent un rôle tellement important. Patrice Chéreau comprenait cela mieux que quiconque.



Il n'était, d'autre part, pas partisan, dans sa manière d'aborder l'opéra, du vieux principe " Prima la musica, poi le parole " - " la musique prime sur les paroles ", titre d'un opéra d'Antonio Salieri, 1786 - , ni de son contraire.

La musique et le texte étaient tout aussi importants selon lui. La grande différence entre la pièce de théâtre et l'opéra réside dans l'impossibilité où se trouve le metteur en scène d'opéra de pouvoir contrôler le tempo ou le volume sonore.

Au théâtre, le metteur en scène est maître de ses choix en la matière mais, dans l'opéra, ces deux facteurs sont dictés par la partition. Pour cette raison, il est très important que les metteurs en scène de théâtre se confrontent à l'opéra et vice versa !



Pour Chéreau, le problème ne se posait pas, même s'il venait du théâtre et du cinéma. Il parvenait toujours à tirer profit des interludes séparant les phrases musicales pour permettre au chanteur d'adopter un nouvel état d'esprit, d'éprouver un nouveau sentiment.

Il ne s'est jamais focalisé uniquement sur ceux qui chantaient et qui, de toute manière, se trouvaient au centre de la scène, mais prêtait en revanche une attention totalement obsessionnelle aux réactions des autres.

Il accomplissait un travail fantastique avec le choeur , faisant parfois jouer ses membres sur scène comme de véritables personnages, les séparant à d'autres occasions en différents groupes ou au contraire leur donnant l'apparence d'une seule et même entité.
Au bout du compte, tout ce qu'il faisait était riche de multiples dimensions.



Cinq traits de caractère faisaient de Patrice Chéreau un metteur en scène si inimitable.

D'abord, son intelligence aiguë lui permettait de lire un texte, de le comprendre et, parallèlement, de développer son propre sous-texte, sans pour autant sacrifier l'oeuvre originale.

Deuxièmement, il possédait un oeil merveilleux, sachant toujours comment rendre précisément l'action passionnante pour le spectateur. Il ne laissait, par exemple, jamais les acteurs sur scène se tenir sur une même ligne droite. Bien des metteurs en scène commettent une telle erreur, amoindrissant ainsi l'impact d'une scène.
Chéreau, lui, était inspiré, en quelque sorte, par la diagonale.


Troisième qualité, bien que n'étant pas musicien, il possédait une très bonne oreille. Sa sensibilité à la musique était étonnante et sa mémoire musicale unique.

Quatrièmement, Patrice était un passionné, il se montrait capable d'entrer en empathie avec ses chanteurs et ses acteurs. Il ressentait dans toute leur force les émotions qu'ils vivaient, la joie comme le chagrin ; il se montrait d'une extrême sensibilité aux peurs et aux émotions humaines.

Enfin, il ressentait les choses avec les tripes : cette sensibilité était au coeur même de son caractère. Ces qualités, chez Patrice Chéreau, s'équilibraient en une harmonie que l'on ne rencontre que très rarement.



Notre longue amitié me donna également l'occasion de travailler directement avec lui en tant qu'acteur lorsqu'il interpréta les trois rôles de L'Histoire du soldat, de Stravinsky, accompagné par le West-Eastern Divan Orchestra sous ma direction. Il entretenait des liens étroits avec l'orchestre.

Il nous aida à repenser de fond en comble nos projets d'opéra, et sa manière d'expliquer le premier acte de La Walkyrie restera gravée dans la mémoire de nombreux musiciens, ses seuls mots réussissant à faire naître l'action sous nos yeux.


J'ai vu Patrice pour la dernière fois en août, lorsqu'il rendit visite au West-Eastern Divan Orchestra, qui répétait alors à Séville.



Il me manquera énormément.




Traduit de l'anglais par François Gauer

http://www.lemonde.fr/journalelectronique/donnees/protege/20131020/html/937315.html




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MessageSujet: Re: PATRICE CHEREAU   PATRICE CHEREAU EmptyLun 4 Nov - 19:38







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Le bel hommage à Chéreau





PATRICE CHEREAU Patric11





Des centaines d'admirateurs anonymes avaient tenu à être là, qui n'ont pas tous pu entrer dans le Théâtre de l'Odéon, dimanche 3 novembre au soir, pour adresser un dernier salut à Patrice Chéreau, disparu le 7 octobre.



Ils étaient accompagnés par l'ensemble de la profession théâtrale, venue écouter les témoignages et hommages de nombre d'artistes ayant travaillé avec le metteur en scène, et qui composaient une affiche étourdissante : Michel Piccoli, Isabelle Huppert, Jane Birkin, Marianne Faithfull, Charlotte Rampling, Valeria Bruni-Tedeschi, Gérard Desarthe…... Ce fut un bel hommage : juste, émouvant mais sans pathos.



La soirée a commencé avec le chorégraphe Thierry Thieû Niang, qui a collaboré avec Chéreau sur ses derniers spectacles, et a dansé un extrait de sa création...… du printemps !, dans laquelle Chéreau lisait des extraits du Journal de Nijinski.
Puis Michel Piccoli, impérial, est monté sur scène pour raconter comment il s'était retrouvé à jouer dans une pièce « d'un auteur totalement inconnu » –– c'était en 1983, le mémorable Combat de nègre et de chiens, de Bernard-Marie Koltès, et le début de toute une aventure…




Marianne Faithfull a lu au micro le texte de sa chanson Sleep, qui berçait Son frère, l'un des films de Chéreau. Isabelle Huppert a fait partager des extraits d'entretiens dans lesquels le metteur en scène se racontait, et a confié que les spectacles de Chéreau lui avaient donné envie d'être actrice.

Charlotte Rampling a évoqué quelques souvenirs de La Chair de l'orchidée, et Jane Birkin, en un moment infiniment émouvant, a chanté a cappella sa chanson L'Amour de moi.






MODESTE ET ORGUEILLEUX À LA FOIS






Il y eut aussi Jean-Pierre Vincent et Michel Bataillon, vieux compagnons de Chéreau depuis le temps du lycée Louis-le-Grand, qui racontèrent le jeune homme qu'il fut, et les influences sur lui de Bertolt Brecht et de Roger Planchon.


Gérard Desarthe, l'acteur mythique de Peer Gynt et d'Hamlet, qui lut le monologue de Jacques dans Comme il vous plaira, de Shakespeare. Il y eut enfin Philippe Calvario, qui joua un passage du spectacle qu'il a conçu à partir du livre Les Visages et les corps, signé par Chéreau en 2010, quand il fut le grand invité du Louvre – où l'on avait découvert que le metteur en scène, en plus de ses talents déjà multiples, avait aussi une plume.



Et peu à peu c'est un beau portrait, pudique et vivant, qui s'est dessiné de cet homme à la fois modeste et orgueilleux –– « Je n'emploie jamais le terme d'“artiste” pour me définir, disait-il. Mes parents [son père était peintre, sa mère, dessinatrice] ne l'employaient jamais. Ils parlaient de “métier”. J'aime ce mot de “métier” ».




Tout s'est terminé alors par quelques images filmées de la sublime Elektra de Strauss mise en scène, cet été, par Chéreau au Festival d'Aix-en-Provence. Dehors, sur la place de l'Odéon, il pleuvait doucement, et chacun repartait avec sa tristesse de ne jamais voir Comme il vous plaira, de Shakespeare, que devait mettre en scène Chéreau en ce même Théâtre de l'Odéon, au printemps.




Fabienne Darge








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MessageSujet: Re: PATRICE CHEREAU   PATRICE CHEREAU EmptyMer 29 Oct - 1:13

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Patrice Chéreau nous quittait  en octobre 2013, il y a 1 an déjà ....



Théâtre, cinéma, opéra, metteur en scène, réalisateur, acteur… retour en images sur le parcours d'un homme engagé, travailleur acharné et exigeant. 




PATRICE CHEREAU Patric10






L'art de Patrice Chéreau





Ce documentaire revient sur le contexte, les conditions d'écriture et de tournage du film "La Reine Margot » réalisé en 1994 par Patrice CHEREAU et adapté du roman éponyme d'Alexandre DUMAS.


Dès 1989, le réalisateur et la scénariste Danièle THOMPSON travaillent sur le scénario de cette fresque fastueuse alors que grondent les menaces des extrémismes religieux en Iran, en Algérie, au Soudan ou en ex-Yougoslavie.


Pour son cinquième film, Patrice CHÉREAU s'intéresse aux intrigues de la cour de France et aux conséquences du mariage politique entre Marguerite de VALOIS et Henri de NAVARRE.
Destinée à apaiser les tensions entre catholiques et protestants, cette union débouchera sur un massacre lors de la nuit de la Saint-Barthélemy.

Un drame familial et historique qui, quatre siècles plus tard, trouve des résonances dans l'apparition de nouvelles guerres de religion.
Les documents d'archives mêlant extraits du film, photographies, gravures, tableaux sont ponctués par les interviews, analyses et souvenirs de Patrice CHÉREAU, Danièle THOMPSON, Pierre GRUNSTEIN, François GÉDIGIER, Goran BREGOVIC, Dominique BLANC, Jean-Hugues ANGLADE, Daniel AUTEUIL et Antoine de BAECQUE.






Il était une fois la Reine Margot

Documentaire sur le contexte, les conditions d'écriture et de tournage du film de Patrice Chéreau.







Rêve d'automne

Retransmission de la pièce de Jon Fausse, "Rêve d'automne", mise en scène par Patrice Chéreau avec Pascal Greggory et Valeria Bruni Tedeschi.








Retransmission de la pièce "Rêve d'automne" de Jon FOSSE, mise en scène par Patrice CHEREAU, et enregistré au Théâtre National de Bretagne, à Rennes.Un homme et une femme, qui se sont aimés un jour, se retrouvent dans un cimetière. Tandis que les parents de l'homme gravitent autour d'eux, ils se rapprochent.







Chronologie en images de la carrière de Patrice Chéreau






Patrice Chéreau  en 1967 à propos de "L'Affaire de la rue de Lourcine"
de Labiche










"Il y a toujours une lecture de l'auteur et une lecture du metteur en scène"

1970.Patrice Chéreau évoque sa mise en scène de Richard II de William Shakespeare. Pour lui, la pièce est une "illustration de Machiavel".










Au Théâtre de France, Patrice CHEREAU a mis en scène "Richard II" de William SHAKESPEARE dont il interprète également le rôle titre.


Paul Louis MIGNON interviewe Patrice CHEREAU sur les raisons de ce choix. Patrice CHEREAU a été séduit par le thème de la pièce (crise du pouvoir et description de la mentalité des gens dans cette période de crise).
Il parle du personnage de Richard II : "quelqu'un qui intériorise en lui la crise... On l'éclaire de façon actuelle, on en donne une lecture politique, SHAKESPEARE a beaucoup de choses à nous apprendre" - BT gravure d'époque de Richard II - Patrice CHEREAU évoque la vie du roi Richard II (malade, intoxiqué par le pouvoir) - Extrait de la pièce : la séparation du roi et de la reine : leurs adieux qu'il définit comme une scène romantique.




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MessageSujet: Re: PATRICE CHEREAU   PATRICE CHEREAU EmptySam 1 Nov - 18:13


1980.Homme engagé, Patrice Chéreau vient sur le plateau du journal pour défendre l'AIDA, l'association de défense des artistes qu'il a fondée avec Ariane Mnouchkine.





"Ce film est une envie d'amour et de tendresse".

1983.Sur le Tournage de "l'Homme blessé" avec Jean-Hugues Anglade.





1987.Patrice Chéreau présente "Hôtel de France" sur la croisette.






1993.Patrice Chéreau parle des Trois mousquetaires et de la Reine Margot.




Le travail de Patrice Chéreau a été récompensé à plusieurs reprises.

1994.Le Jury du 47ème festival de Cannes présidé par Clint Eastwood attribue le Prix du Jury à la Reine Margot de Patrice Chéreau.

1999.Il obtient le César du meilleur réalisateur pour "Ceux qui m'aiment prendront le train".

2003.Il remporte l'Ours d'argent à Berlin pour "Son frère".






2000.Patrice Chéreau tourne dans les faubourgs du Sud de Londres. Sur le plateau, 'il mène le jeu comme un chef d'orchestre".







2007.Festival d'art Lyrique d'Aix en Provence. Patrice Chéreau et Pierre Boulez présentent "De la maison des morts", un opéra de Leoš Janáček.


2007.Festival d'art Lyrique d'Aix en Provence. Patrice Chéreau et Pierre Boulez présentent "De la maison des morts", un opéra de Leoš Janáček.


2009.Le trio Charlotte Gainsbourg, Jean-Hugues Anglade et Romain Duris est à l'affiche de "Persécution", le dernier film de Patrice Chéreau.







2013.Patrice Chéreau décède l'âge de 68 ans des suites d'un cancer. Le monde du spectacle est en deuil. L'hommage est unanime.







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MessageSujet: Re: PATRICE CHEREAU   PATRICE CHEREAU EmptyLun 3 Nov - 19:50

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Richard Peduzzi et Patrice Chéreau, une aventure de quarante ans



Format élégant, bonne prise en main, beau papier, belle impression : logique, l’auteur de ce livre, Là-bas, c’est dehors, est Richard Peduzzi, connu comme alter ego et décorateur de Patrice Chéreau, le metteur en scène disparu le 7 octobre 2013.
Mais si Peduzzi a été surtout connu pour ce rôle, il a aussi été, pour faire court, directeur de l’Ecole des arts décoratifs et de l’Académie de France à Rome, la fameuse Villa Médicis.



Là-bas, c’est dehors, ce sont des Mémoires, avec toute l’exigence d’écriture que le genre requiert, alliées à une passionnante dimension documentaire que l’auteur conduit bien au-delà de sa seule personne. Comme le fait la riche illustration du livre, dessins ou photos qui donnent les clefs de cette aventure hors du commun.





PATRICE CHEREAU 45140910





Chéreau bien sûr occupe une large part du livre et, à cet égard, c’est un cadeau que Peduzzi fait partager à la grande famille du théâtre.

Le portrait de leur relation depuis la rencontre initiale en 1967, alors que les deux jeunes hommes ont à peine 20 ans, est d’une rare sensibilité, doublée d’une belle fidélité. Il révèle une relation faite de passion partagée pour le théâtre, accessoirement pour le cinéma, faite de chaleur amicale, autant que de discrétion, presque d’effacement, Peduzzi rendant un constant hommage à Chéreau, comme Chéreau, pour sa part, se préoccupait de le faire monter à égalité sur les mêmes podiums.



On mesure la singularité de leur aventure commune, conduite en symbiose avec Boulez, dans les pages consacrées à Wagner et Bayreuth. Les difficultés alors rencontrées sont racontées sans ambiguïté, depuis les premiers sifflets en 1976 jusqu’au triomphe qui clôturera le Ring en 1980.
L’accent est logiquement mis sur la genèse difficile des décors, période où le travail commun des deux hommes révèle une étonnante complicité.






Machinerie culturelle



La passion Chéreau occupe tout le cœur du volume. Avec la même sincérité, Richard Peduzzi a d’abord raconté son enfance dans les ruines du Havre dévasté par la guerre, ses parents perdus puis retrouvés, et encore reperdus, sa jeunesse et ses admirations, pour le peintre Charles Auffret, pour le jazz, et pour des musiciens dont il fait alors ses idoles, John Coltrane, ou encore Bud Powell.



Un des chapitres s’intitule « Le regard à l’affût », ouverture d’une épopée qu’il appelle de façon paradoxale, tant sa carrière trahit la volonté, « le hasard, la chance ».
Ce qui semble alors le caractériser, c’est sa façon d’avaler du regard tout ce qui se présente à lui, et devient matière à image et à construction. Le processus est détaillé pour nombre des décors qu’il a signés.
Il vaut aussi pour les lieux dont il a fait plus ou moins durablement ses « ateliers », comme on parle des ateliers de la Renaissance.



Pour son passage à la Villa Médicis, l’exercice était presque trop facile tant l’esthète veille en lui. Il saura cependant regarder avec la même attention la Manufacture des Œillets à Ivry (Val-de-Marne), bâtiment industriel d’exception, que son propriétaire, Eric Danel, métamorphose, sans presque toucher un boulon, en machinerie culturelle pour le Châtelet, pour le monde des arts et du théâtre, pour l’Ecole des arts décoratifs, et donc, douze ans durant, pour Richard Peduzzi.





Transformateur et magicien




Souvent le décorateur est sorti du théâtre, pour inventer la scénographie de musées (Orsay, le Louvre), pour dessiner des meubles, concevoir des chais. Dans un dernier chapitre, il avoue ses tendances à la procrastination, ou s’efforce de nous y faire croire.



Une belle postface de Charlotte Chastel-Rousseau nous le montre en fait pour ce qu’il est, transformateur et magicien. La préface d’Henri Loyrette, qui dirigea le Musée d’Orsay, puis celui du Louvre pendant douze ans, le temps de bien connaître notre homme, donne quelques pistes pour s’habituer aux mille et un métiers qu’aura exercés le « peintre et décorateur », et surtout un indice sur ce travailleur acharné : la « probité du dessin ».




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MessageSujet: Re: PATRICE CHEREAU   PATRICE CHEREAU EmptyJeu 16 Juil - 14:55




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Patrice Chéreau, tentative de portrait en forme de musée



Par  Philippe Dagen (Avignon)



PATRICE CHEREAU 46853510




A en croire ses notes de travail et ses lettres, Patrice Chéreau présentait souvent ses projets en distinguant avec méthode, point par point et numérotés, les éléments de compréhension et d’interprétation qu’il entendait manifester dans sa mise en scène.


L’exposition que lui consacre la Collection Lambert se prête à un traitement identique.


Elle contient, premièrement, une documentation biographique et historique, qui décrit la formation et les débuts de Chéreau, du lycée Louis-le-Grand au Théatre de Sartrouville ainsi que, plus fragmentées et moins claires, quelques autres données biographiques touchant aux décennies suivantes, à ses amitiés et à sa trajectoire d’homme de plus en plus public ; deuxièmement, une documentation du plus grand intérêt sur sa méthode de travail, qu’il l’exerce au théâtre, à l’opéra ou au cinéma, tout cela pris pour l’essentiel dans les archives et confié à l’IMEC à partir de 1996 et jusqu’à sa mort en 2013 ; troisièmement, en raison de cette méthode elle-même, des œuvres graphiques, photographiques et picturales qui ont été pour lui, à des degrés variés, selon des modes divers, des références ou des incitations visuelles ; quatrièmement enfin, une orchestration artistique de sa vie et de son travail par la présence d’œuvres d’artistes contemporains qui seraient en rapport avec ses créations.







Pièces connues et remarquables





Bien que cela ne soit guère conforme à la dialectique, on commencera par ce dernier point. Au fil du parcours, se trouvent intercalées des pièces de Sol LeWitt, Nan Goldin, Miquel Barcelo, Gerhard Richter ou Cy Twombly. Certaines sont connues et quelques-unes remarquables. Ce n’est pas assez cependant de ces qualités pour expliquer la présence de chacune.


La notion de musée imaginaire est trop évasive et commode. Chéreau aurait-il déclaré ou laissé entendre son intérêt pour tel de ces artistes ? Rien de tel n’est affirmé. Est-ce alors au nom de correspondances ou d’analogies ? Elles ne sont pas toutes si marquées que l’on comprenne mieux.

Une cause plus simple serait que beaucoup viennent de la Collection Lambert, où l’exposition se tient. Aussi n’est-il pas surprenant que l’un des rapprochements qui fonctionne le mieux soit celui qui a été voulu entre le Ring de Boulez, Chéreau et Peduzzi à Bayreuth en 1976 et la vidéo de Cyprien Gaillard Pruitt-Igoe Falls, de 2009, venue d’une autre collection. Il en est de même des deux œuvres de George Grosz dans le chapitre consacré aux désastres et aux guerres et qui s’organise autour du film La Reine Margot, lui-même construit autour du massacre de la Saint-Barthélémy. Là, en effet, les résonances sont sensibles, que Chéreau ait connu ou non ces Grosz.





PATRICE CHEREAU 46853512





Ce chapitre est l’un des plus convaincants pour une raison simple : c’est l’un de ceux où les sources visuelles de Chéreau sont explorées le plus complètement et précisément. Avant de filmer la Saint-Barthélémy et l’enfouissement des cadavres dans des fosses communes, il a vu des photos des carnages de Bosnie, des bagnes soviétiques et des camps d’extermination nazis. Il a revu les gravures de Goya et surtout Le Radeau de la Méduse, de Géricault.
Sans doute aussi a-t-il relu Primo Levi ou Robert Antelme. Le film, sans les citer, se fonde sur ces visions et ces récits – et sur la mémoire collective des charniers des XIXe et XXe siècles.




Plus tôt dans le parcours et dans un registre moins tragique, on a découvert les gravures que Chéreau avait réunies quand il préparait son Peer Gynt : pas toutes admirables, mais utiles à son processus parce que porteuses d’un peu de Nord, d’un peu de Scandinavie, d’un peu de « romantisme » – et cette teneur, même faible, suffit à lui donner à songer. Pour Géricault, il s’agit de bien plus que de l’intérêt d’un moment : d’une proximité constante, d’une passion intense. On n’en dirait pas autant de Delacroix ou de Chassériau, bien qu’ils soient eux aussi très présents. Mais de Courbet, sans hésitation, dont Chéreau vénérait L’Homme blessé. Il ne semble pas que la même familiarité l’ait attaché à des artistes plus récents ou à ses contemporains. Mais qu’il se nourrisse de peinture, impossible d’en douter.





Le dessin, outil préparatoire



Cette question est l’une des plus intéressantes que l’exposition soulève : la part plastique dans la conception et l’exécution d’une mise en scène. Dans le cas de Chéreau, elle est d’autant plus évidemment centrale que son père, Jean-Baptiste, est artiste et que lui-même se sert du dessin comme d’un outil préparatoire, du moins dans ses premières années de metteur en scène.


Il va bien au-delà du schéma et du croquis, imagine les postures et l’occupation de l’espace théâtral, construit des perspectives au crayon et joue des rehauts de couleurs. Avec aisance, il invente sur le papier à dessin, autant qu’en lisant et relisant les pièces, qu’il annote sans fin, et autant qu’en écrivant à la main ou à la machine ses réflexions et ses conclusions.
Plus tard, l’invention se fait à deux, avec Richard Peduzzi, dont l’exposition rappelle quel grand dessinateur il est, avec sa manière très particulière de concevoir ce que l’on appelle d’habitude le « décor » – alors qu’il s’agit d’infiniment plus – comme un espace sans limite qui pourrait être bien plus vaste que ne le permet l’architecture du théâtre où l’on jouera.



Cette question est si captivante que l’on regrette qu’elle ne soit pas encore plus longuement développée et analysée dans l’exposition.
Qu’en est-il, par exemple, du passage de l’espace théâtral à l’espace cinématographique ? Chéreau tourne-t-il comme il met en scène ? Sûrement pas.
Dans les rares extraits de ses films projetés dans les salles, on observe combien il y a de murs, de façades ou de cloisons et combien, à l’inverse, dans les dessins de Peduzzi et dans les photographies de plateaux, abondent fenêtres, portes ou couloirs ménagés vers un extérieur supposé, en dehors du théâtre, au-delà de ses murs. Ainsi traite-t-il Wagner, Berg, Shakespeare ou Koltès.

On dirait qu’il s’agit à chaque fois de suggérer que la pièce et son action ne sont pas hors du monde réel, mais forment un concentré momentané de ce monde, en communication avec lui, relié à lui par de nombreux passages comme le lieu de la représentation le serait, symboliquement, par ces ouvertures.
Au cinéma, parce que c’est du cinéma sans doute, cette exigence ne s’impose pas : on est dans la vie, immédiatement. Ou du moins cette illusion est-elle très forte sur l’écran, plus forte que sur la scène.



Musiques, littératures, philosophies, poésies, peintures, photographies, dessins, cinémas : tout ainsi contribue à la création selon Chéreau, sur fond d’histoire et d’actualité très présent. Comme tout grand artiste, il sait que tout peut, que tout doit se fondre dans son travail. L’idéal de l’œuvre d’art totale passe comme un rêve admirable.



« Patrice Chéreau, un musée imaginaire », Collection Lambert, 5, rue Violette, 84000 Avignon. Tél. : 04-90-16-56-20. Juillet et août : tous les jours de 11 heures à 19 heures. Puis du mardi au dimanche de 11 heures à 18 heures. Entrée : 10 €. Jusqu’au 11 octobre.




http://abonnes.lemonde.fr/arts/article/2015/07/16/patrice-chereau-tentative-de-portrait-en-forme-de-musee_4685352_1655012.html





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