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| « L’Académie s’oppose à toute réforme de l’orthographe » | |
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Bridget
Nombre de messages : 2631 Age : 73 Localisation : Paris Date d'inscription : 13/05/2008
| Sujet: « L’Académie s’oppose à toute réforme de l’orthographe » Dim 14 Fév - 23:46 | |
| Hélène Carrère d’Encausse : « L’Académie s’oppose à toute réforme de l’orthographe » Secrétaire perpétuel de l’Académie française, l’historienne rappelle que la langue est une part essentielle de notre identité.C' est une mise au point. Hélène Carrère d’Encausse, secrétaire perpétuel, s’étonne que l’on exhume une réforme de l’orthographe élaborée il y a un quart de siècle et affirme fortement que l’Académie française, « greffier de la langue », n’est pas à l’origine de ce texte....LE FIGARO. - Avez-vous compris la violence des attaques que l’Académie française a subies après l’annonce de la réforme de l’orthographe ?Hélène CARRÈRE D’ENCAUSSE. - Je n’ai pas compris les raisons qui expliquent l’exhumation d’une réforme de l’orthographe élaborée il y a un quart de siècle et où l’Académie française n’a eu aucune part, à l’inverse de ce que l’on a voulu faire croire. Je rappelle qu’à l’époque on réfléchissait à l’idée de simplifier l’apprentissage de l’orthographe par les élèves. Mais en 2016, nous sommes devant une situation radicalement différente : notre système éducatif s’est écroulé, et toutes les enquêtes internationales montrent que le savoir acquis par les élèves est en régression par rapport à d’autres pays, au point qu’un élève sur cinq quitte l’école sans savoir lire. Le problème n’est donc plus d’offrir des facilités aux élèves, de conserver ou non l’accent circonflexe, mais de revoir totalement notre système éducatif. Le problème est que les jeunes Français ne connaissent plus leur langue. Il faut s’interroger sur les moyens d’apprendre une langue qu’ils ont trop souvent grand mal à lire et donc à comprendre. Même dans le domaine des mathématiques, qui ont toujours été notre point fort, les enquêtes témoignent d’un net recul, dont une des raisons est la difficulté qu’éprouvent les élèves à comprendre les énoncés des problèmes.Beaucoup pensent que l’Académie est à l’origine de cette réforme. D’où vient ce malentendu ?Je suis stupéfaite d’entendre dire que l’Académie française aurait inventé cette réforme de l’orthographe, ou l’aurait soutenue. Or la position de l’Académie n’a jamais varié sur ce point : une opposition à toute réforme de l’orthographe, mais un accord conditionnel sur un nombre réduit de simplifications, qui ne soient pas imposées par voie autoritaire et qui soient soumises à l’épreuve du temps. Cette position est clairement exprimée dans la déclaration de l’Académie votée à l’unanimité dans la séance du 16 novembre 1989 et dont elle ne s’est jamais écartée. On se réclame aujourd’hui de l’approbation que l’Académie aurait donnée, le 3 mai 1990, au projet de réforme. Sollicitée alors de rendre un avis, l’Académie s’est prononcée sur des principes généraux - un nombre limité de rectifications d’incohérences ou d’anomalies graphiques - mais non sur le projet lui-même, dont le texte était en cours d’élaboration. Ce n’est qu’en décembre 1990, lorsque le texte a été publié au Journal officiel, que les académiciens ont pu en prendre connaissance et en débattre. Et le débat fut d’une grande vivacité. L’Académie, dans son ensemble, a marqué son désaccord avec ce texte et les voix d’un certain nombre de ses membres, tels Jean d’Ormesson, Alain Peyrefitte, Félicien Marceau, Claude Lévi-Strauss, Maurice Schumann, Bertrand Poirot-Delpech ou encore Michel Déon, ont porté le refus général.Le rejet de la réforme par la plupart des Français vous a-t-il étonnéNon, car la société tout entière et pas seulement les élites - ou « les héritiers », selon Pierre Bourdieu - est très profondément attachée à la langue française. Pendant un quart de siècle l’opinion française n’a pas cautionné la plupart des rectifications qu’on lui proposait. Il est donc absurde de ressortir aujourd’hui cette réforme. L’opinion refuse que la langue soit manipulée, instrumentalisée, et c’est très réconfortant.Après les attentats de 2015, le drapeau tricolore et La Marseillaise font figure de symboles forts de l’identité. La langue fait-elle partie de ce socle ?Incontestablement la langue est une part essentielle de notre identité. Déjà, l’année dernière - avant les attentats -, la réforme du collège avait suscité une indignation collective à l’idée qu’elle risquait d’entraîner une rupture du lien qui nous unit à notre langue et à notre histoire. La question qu’il convient de se poser est : comment accède-t-on au savoir ? Par la lecture, par l’écriture et par la capacité de s’approprier ce savoir. Et tout cela passe par la langue. Cela explique notre attachement à la langue, qui est notre bien collectif. La société est consciente de cet enjeu et c’est pour cette raison qu’elle affirme sa volonté de préserver la langue.On a affirmé que cette réforme constituait un « marqueur social discriminant ». Êtes-vous d’accord ?Oui. Je dirais que la tragédie française est une inégalité croissante, née de l’effondrement de notre système éducatif. À coups de réformes qui affaiblissent le savoir, on va créer deux France : celle des enfants issus de familles qui ont une tradition culturelle et bénéficient donc de cet héritage, et celle des enfants peu favorisés en cela et pour lesquels l’enseignement dans son état actuel ne permet plus de combler cet écart. C’est à l’école que l’inégalité des conditions sociales disparaissait. Elle ne joue plus ce rôle, et l’on ne peut se résigner à l’idée qu’une génération, voire deux, paie ce désastre éducatif. C’est un problème de justice sociale, de cohésion de la nation. Cette cohésion, c’est la langue qui en est l’outil privilégié. Notre système éducatif doit être reconstruit en fonction de cet impératif d’égalité. Je veux cependant dire ici toute mon admiration pour le corps enseignant français, qui tente désespérément, par un travail admirable, de sauver ce qui peut l’être.RENCONTRE le Figaro
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| | | liliane Admin
Nombre de messages : 19569 Age : 50 Localisation : dans la galaxie Date d'inscription : 02/05/2008
| Sujet: Re: « L’Académie s’oppose à toute réforme de l’orthographe » Mar 16 Fév - 7:03 | |
| Orthographe : Najat Vallaud-Belkacem met les points sur les i La secrétaire perpétuelle de l'Académie française a nié que l'Académie ait pris part à la réforme de 1990. C'est faux, lui répond la ministre par courrier.
La ministre de l'Éducation nationale Najat Vallaud-Belkacem a fait part de son « étonnement » à Hélène Carrère d'Encausse. Objet de cette incompréhension, la sortie de la secrétaire perpétuelle de l'Académie française, qui a pris ses distances avec une réforme de l'orthographe actée en 1990 et qui, quelque 26 ans plus tard, est en passe d'être généralisée dans des manuels scolaires.
Dans une interview publiée samedi par Le Figaro, Hélène Carrère d'Encausse affirme n'avoir « pas compris les raisons qui expliquent l'exhumation d'une réforme de l'orthographe élaborée il y a un quart de siècle et où l'Académie française n'a eu aucune part, à l'inverse de ce qu'on l'on a voulu faire croire ».
« C'est avec intérêt, mais également avec un certain étonnement que j'ai pris connaissance de votre réaction publique aux nouveaux programmes de la scolarité obligatoire, publiés le 26 novembre 2015 - vous critiquez notamment la référence, pourtant identique à celle de 2008, aux rectifications de l'orthographe proposées par le Conseil supérieur de la langue française », écrit la ministre dans un courrier daté de lundi et rendu public mardi. « Étonnement renforcé par le fait que ces rectifications sont intégrées dans la neuvième édition du dictionnaire de l'Académie française et que l'Académie, pourtant contactée par le Conseil supérieur des programmes cet été, n'a pas fait de remarque quant à la présence de cette référence », ajoute la ministre, comme pour mieux enfoncer le clou. Unanimité
Largement méconnue, la réforme adoptée en 1990 prévoit la simplification de l'orthographe de certains mots et allège l'usage des traits d'union et des accents circonflexes. Sa généralisation prochaine dans les manuels scolaires du primaire a suscité une vive polémique.
Or, selon Najat Vallaud-Belkacem, le secrétaire perpétuel de l'époque, Maurice Druon, avait affirmé en 1990 que le rapport du Conseil supérieur de la langue française sur les rectifications de l'orthographe « avait été approuvé à l'unanimité par l'Académie ». Et la publication, en 2008, des programmes de l'enseignement de français au collège faisant référence à ces « rectifications de l'orthographe », « approuvées par l'Académie française », « n'a pas suscité, à ma connaissance, de démenti de la part de l'Académie », insiste la ministre.
Des éléments que semble avoir oublié Hélène Carrère d'Encausse et qui amène la ministre à poser innocemment cette question : « Eu égard à la mission de défense et d'illustration de la langue française assignée à l'Académie, je vous serais reconnaissante de bien vouloir me faire part de toute évolution de la position de votre institution quant aux rectifications orthographiques, afin que les acteurs concernés puissent en tenir compte à l'avenir », demande-t-elle.
L'accent circonflexe retient son souffle... http://www.lepoint.fr/societe/orthographe-najat-vallaud-belkacem-met-les-points-sur-les-i-16-02-2016-2018604_23.php | |
| | | liliane Admin
Nombre de messages : 19569 Age : 50 Localisation : dans la galaxie Date d'inscription : 02/05/2008
| Sujet: Re: « L’Académie s’oppose à toute réforme de l’orthographe » Mer 17 Fév - 14:30 | |
| Hélène Carrère d'Encausse : "L'orthographe n'a pas à être imposée par un pouvoir politique"
Alors que la possible suppression de l'accent circonflexe émeut la France, la secrétaire perpétuelle réagit aux propos de Najat Vallaud-Belkacem. Propos recueillis par Christophe Ono-dit-Biot
Dans une lettre argumentée, et rendue publique, la ministre de l'Éducation nationale Najat Vallaud-Belkacem a exprimé à la secrétaire perpétuelle de l'Académie française son « étonnement ». Qu'a donc fait Hélène Carrère d'Encausse ? Simplement pris ses distances, dans un entretien au Figaro , avec la réforme de l'orthographe qui fait couler tant d'encre – et de tweets. Pour la ministre, l'Académie avait pourtant approuvé cette réforme dès 1990. Une explication s'imposait. Nous avons interrogé Hélène Carrère d'Encausse.
Le Point.fr : Najat Vallaud-Belkacem se dit « étonnée » de votre réaction hostile à cette réforme de l'orthographe… Elle vous a écrit une lettre à ce sujet. Qu'allez-vous lui répondre ?
Hélène Carrère d'Encausse : La courtoisie m'empêche de discuter de cela publiquement. Elle m'a fait porter une lettre, et je vais lui répondre aussi par une lettre, que je lui ferai porter.
Votre courtoisie est tout à votre honneur, mais ce que dit la ministre, c'est que le secrétaire perpétuel de l'époque, Maurice Druon, avait approuvé cette réforme de « rectification » de l'orthographe… Et qu'en 2008, les programmes de l'Éducation nationale, faisant référence à ces « rectifications » ont été « approuvées par l'Académie française »…
Nous avons publié une mise au point sur le site de l'Académie. Le texte est très clair. Dans sa séance du 16 novembre 1989, ce que l'Académie a adopté à l'unanimité, c'est une déclaration qui rappelait fermement son opposition à toute modification autoritaire de l'orthographe. L'orthographe n'a pas à être imposée par un pouvoir politique. C'est ce que l'Académie a réaffirmé, sans se montrer pour autant fermée à certaines évolutions ou tolérances ; nous ne sommes pas passéistes ! C'est vrai qu'il y a des incongruités dans la langue française, et l'exemple de « nénuphar » est intéressant, car le mot, précisément, s'écrivait « nénufar » au XVIIIe siècle, par exemple. Et c'est pourquoi quand Michel Rocard, qui était un esprit subtil, a lancé cette idée de simplification de l'orthographe, nous en avons accepté l'idée, tout en conseillant de « laisser au temps le soin de le modifier selon un processus naturel d'évolution » - ce sont les mots mêmes. La langue est un organisme vivant, et n'a pas à être soumise, de force, à une décision politique, venant d'en haut.
Mais quel est donc ce texte auquel la ministre fait référence et qui aurait été approuvé par l'Académie ?
L'Académie s'est exprimée le 3 mai 1990 sur les principes du projet porté par Michel Rocard. Mais il ne s'agissait que de principes, il n'y avait pas encore de texte et c'est donc sur les seuls principes qu'a porté le vote de l'Académie. Elle a accepté des modifications, mais je le redis, à la double condition que nulle norme graphique ne soit imposée de façon autoritaire, et que les rectifications proposées soient soumises à l'usage que les gens font de cette orthographe. Ni le pouvoir politique ni l'Académie ne sont maîtres de la langue : on peut faire des recommandations, comme cela s'est fait dans les siècles passés, mais on ne passe pas en force, et on regarde ce qui se passe... Qu'est-ce qu'on a vu ? Ces modifications, que nous indiquons d'ailleurs dans notre dictionnaire, par un petit losange, n'ont pas pris dans l'usage… Les gens n'ont pas envie que les mots changent d'orthographe, parce que cette orthographe, c'est aussi ce qui les rassemble. Je vous avoue que je ne comprends pas l'urgence de faire ressurgir, aujourd'hui, ce projet qui date d'il y a vingt-cinq ans…
N'est-il pas tout de même étrange, ce pays qui se déchire pour un accent circonflexe ?
Étrange, mais précieux ! Je crois que cela traduit quelque chose de noble. Dans un monde qui se défait, où l'être humain sent qu'il perd sa place, cette réaction traduit l'attachement à ce qui nous rassemble. Je le répète, je ne suis pas passéiste. Mais au nom de quoi faudrait-il, pour construire l'avenir, se couper de nos racines, et soumettre une langue de force ? http://www.lepoint.fr/societe/helene-carrere-d-encausse-l-orthographe-n-a-pas-a-etre-imposee-par-un-pouvoir-politique-17-02-2016-2019019_23.php
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