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Sujet: ROMAN POLANSKI ARRETE EN SUISSE Lun 28 Sep - 21:34
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Le réalisateur du «Pianiste», qui est sous le coup depuis 1978 d'un mandat d'arrêt américain dans une affaire de viol sur mineure, a été placé en garde à vue à son entrée sur le territoire helvétique. La Suisse compte l'extrader.
Rattrapé par la justice américaine après 31 ans de «cavale» et d'exil en Europe. Roman Polanski a été arrêté samedi par la police suisse à son entrée sur le territoire helvétique, ont révélé dimanche les organisateurs du Zurich Film Festival. Il est en détention provisoire en attente d'extradition vers les Etats-Unis. Le réalisateur d'origine polonaise est en effet depuis 1978 un fugitif aux yeux de la justice américaine qui a depuis cette date émis un mandat d'arrêt contre le cinéaste de 76 ans. Il est poursuivi aux Etats-Unis pour avoir eu des relations sexuelles avec une enfant de 13 ans.
La justice américaine dispose de 40 jours pour présenter une demande d'extradition officielle. Polanski pourra de son côté contester toute décision auprès du tribunal pénal fédéral, puis du Tribunal fédéral, la plus haute instance judiciaire helvétique.
L'affaire qui entraîne aujourd'hui cette arrestation remonte au 10 mars 1977. Ce jour-là, Roman Polanski, 43 ans, séduit Samantha Geimer, 13 ans, lors d'une séance photo dans la maison de Jack Nicholson. Le lendemain, Polanski est interpellé par la police, qui le soupçonne d'avoir fait consommer de la drogue et de l'alcool à la jeune fille, avant d'abuser d'elle. Il risque alors jusqu'à 50 ans de prison. Le cinéaste, de nationalité française, plaide coupable de «relations sexuelles illégales» et est condamné à une «évaluation» de trois mois dans une prison. Il y passera 47 jours.
En janvier 1978, lors d'une réunion avec ses avocats, le juge laisse entendre qu'il le renverra sous les verrous pour une nouvelle période de 48 jours. Polanski profite de sa sortie provisoire de prison pour s'envoler vers l'Europe. Il poursuit depuis sa carrière en France et évite soigneusement de se rendre en Grande-Bretagne, de peur d'être extradé vers les Etats-Unis. Logiquement, il ne s'était pas présenté à Los Angeles en 2003 pour recevoir l'Oscar du meilleur réalisateur décroché pour le «Pianiste».
Sa victime favorable à l'abandon des poursuites
Sa victime, aujourd'hui âgée de 45 ans, est, depuis de longues années, favorable à ce que les poursuites à l'encontre de Roman Polanski soient abandonnées. Un point de vue que ne partage pas la justice américaine. Début juillet, les avocats du cinéaste ont déposé un recours devant une cour d'appel de Californie après le refus d'un juge de Los Angeles de réexaminer l'affaire après la fuite du cinéaste. Ils arguaient que le réalisateur «avait été de fait forcé de quitter la juridiction en 1978 pour éviter l'imposition d'un seconde incarcération illégale».
Les avocats de Roman Polanski soutenaient notamment que leur client n'avait pas bénéficié en 1977 d'une procédure pénale équitable, en raison de «communications illégales» entre le juge, en charge de l'affaire, «avide d'attention médiatique», et le procureur de Los Angeles. Dans le documentaire «Roman Polanski: wanted and desired», le procureur David Wells, qui avait pourtant été dessaisi de l'affaire, témoignait avoir rencontré, à plusieurs reprises, le juge qui instruisait le dossier, Laurence J. Rittenband. Wells l'aurait conseillé de condamner le réalisateur de «Chinatown» à une peine de prison ferme et aurait tenté de l'influencer en lui montrant des clichés de Polanski entouré de jeunes filles lors d'une fête de la bière en Allemagne.
Cette demande initiale avait été rejetée en mai dernier par un juge de Los Angeles en raison de l'absence de Roman Polanski à l'audience. Le magistrat estimait que le cinéaste n'avait pas le droit d'obtenir satisfaction tant qu'il resterait en «fuite». Le réalisateur de «Rosemary's baby» et de «Tess» était invité en Suisse à l'initiative du Zurich Film Festival qui lui consacrait une rétrospective. Le ministre de la Culture et de la Communication, Frédéric Mitterrand, s'est déclaré dimanche «stupéfait» par l'arrestation du cinéaste, naturalisé français en 1976. Le ministre s'est entretenu avec le Président de la République qui partage le souhait d'une résolution rapide de la situation».
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Bridget
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Sujet: Re: ROMAN POLANSKI ARRETE EN SUISSE Lun 28 Sep - 21:39
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Affaire Polanski : trente-deux ans de procédure
Le cinéaste franco-polonais Roman Polanski a été interpellé, samedi 26 septembre, en Suisse, pour une affaire de "relations sexuelles illégales" avec une adolescente qui remonte à trente-deux ans aux Etats-Unis.
* 1977
Dans la maison de son ami Jack Nicholson, Roman Polanski, alors âgé de 43 ans, a un rapport sexuel, le 10 mars, avec une jeune fille de 13 ans, Samantha Geimer, qu'il photographiait pour le magazine français Vogue. Rapport consenti selon Polanski, forcé selon la mineure – il l'aurait "abreuvée" de champagne et de drogues. Dénoncé par la famille Geimer, le réalisateur est arrêté.
Il plaide coupable pour détournement de mineure, et non pour viol, après un arrangement entre son avocat et le procureur, en échange d'une réduction de peine. Incarcéré six semaines à la prison de Chino (Californie), il est libéré sous caution. Même si l'évaluation conduite en prison conclut que Polanski n'est pas un pervers sexuel, à sa sortie, celui-ci craint que le juge Laurence Rittenband, chargé de l'affaire, ne revienne sur sa parole et ne l'incarcère plus longtemps.
* 1er février 1978
Roman Polanski prend un avion à destination de Londres, puis s'installe à Paris, où il acquiert la nationalité française. Il travaille pour Hollywood, mais ne remettra jamais les pieds sur le territoire américain.
* 2005
Depuis fin 2005, les autorités américaines recherchent activement Roman Polanski et émettent un mandat d'arrêt international.
* Décembre 2008
Le cinéaste charge ses avocats américains de relancer une demande de classement des poursuites à son encontre. Ils ont déposé une requête de non-lieu s'appuyant sur de "nouveaux éléments de preuve", comme des manquements graves à l'éthique professionnelle de la part du juge d'alors (mort en 1993) et du bureau du procureur. Ces manquements étaient exposés dans le film documentaire de Marina Zenovich, Roman Polanski: Wanted and Desired (2008).
* Janvier 2009
Samantha Geimer, âgée de 45 ans, s'est décidée à faire une requête devant la justice de Los Angeles pour que les poursuites contre Roman Polanski soient abandonnées. Elle a expliqué que l'insistance avec laquelle le parquet de la ville exigeait le retour du cinéaste aux Etats-Unis tenait de la "mauvaise blague" dont elle faisait les frais.
* 7 mai 2009
Le juge californien Peter Espinoza, tout en reconnaissant qu'il y avait eu "une faute professionnelle substantielle" du procureur et du juge, constate néanmoins l'absence du cinéaste à l'audience, et rejette donc sa demande de classement de la plainte.
Les avocats de Roman Polanski demandent alors à la cour d'appel de l'Etat de Californie d'examiner ces vices de procédure et atteintes aux droits constitutionnels du prévenu.
* 26 septembre 2009
Roman Polanski, âgé de 76 ans, est interpellé à son arrivée à l'aéroport de Zurich, alors qu'il devait recevoir au Festival du film de la ville un prix pour l'ensemble de sa carrière. Il est menacé d'extradition aux Etats-Unis.
Le Monde.fr
"Wanted & Desired", un documentaire sur Roman Polanski
Le documentaire "Wanted & Desired" retrace le passé tumultueux du cinéaste Roman Polanski. De son enfance polonaise lors de l'Holocauste à l'assassinat de sa première femme, Sharon Tate, enceinte de huit mois, par le tueur en série Charles Manson, en 1969.
Ce documentaire revient également sur l'accusation de viol d'une mineure de 13 ans, Samantha Geimer, qui a contraint Polanski à fuir le territoire américain en 1977. C'est à cause de ces accusations que le cinéaste a été arrêté samedi 26 septembre, lors de son arrivée en Suisse.
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Sujet: Re: ROMAN POLANSKI ARRETE EN SUISSE Sam 3 Oct - 19:23
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Une affaire datant de trente ans Qui en veut à Roman Polanski ?
Neutres, les Suisses ? Vraiment ? Arrêté à sa descente d'avion alors qu'il était invité d'honneur au Festival de Zurich, Roman Polanski a été jeté dans un cul-de-basse-fosse au vu d'un mandat international lancé par la justice américaine. Les Etats-Unis réclament son extradition en trépignant, les Suisses sont embarrassés d'avoir attiré Polanski dans un traquenard, les Français sont stupéfiés, les Polonais enragent.
Résultat : Polanski, l'un des plus grands cinéastes vivants, se retrouve, à 76 ans, menacé de finir ses jours en prison. L'affaire a plus de trente ans. Pourquoi les Suisses se réveillent-ils maintenant alors que le cinéaste séjourne régulièrement à Gstaad où il possède un chalet ? Pourquoi les Américains, qui ne semblaient plus guère se soucier du cas Polanski, se sont-ils activés ?
Flash-back. En 1977, huit ans après l'atroce massacre de Sharon Tate par les épigones de Charles Manson, Roman Polanski est arrêté pour avoir eu des relations sexuelles avec une gamine de 13 ans. La mère, une actrice en mal de rôles, a laissé volontairement sa fille seule avec Polanski, pour une série de photos. Le cinéaste, qui a la réputation d'aimer les jeunes filles, ne résiste pas. La mère dépose plainte pour viol. Le juge Rittenband propose un deal : un plaider-coupable contre une sentence légère. Entre-temps, la rumeur, à Hollywood, fait état d'une grosse somme d'argent qui aurait changé de mains pour atterrir dans celles de la maman outragée. Envoyé en pénitencier pour «évaluation», Polanski se retrouve dans un environnement dangereux : quelques caïds ont décidé d'embellir leur tableau de chasse en «se faisant» une célébrité. Au bout de quarante-deux jours, Polanski est relâché en liberté conditionnelle. Il repart travailler. Une photo remet tout en question. Polanski, cigare aux lèvres, s'amuse à la Fête de la Bière en Allemagne. Le juge, irrité, casse le deal.
Brusquement convoqué
A son retour aux Etats-Unis, le cinéaste comprend alors qu'il est bon pour un demi-siècle de prison. Il s'enfuit pour la France, où il est né. Il se marie, a des enfants, obtient un oscar et une palme d'or pour «le Pianiste». Le juge Rittenband décède, les procureurs se succèdent et rien ne se passe. Désormais installé à Paris, le cinéaste se voit brusquement convoqué début 2009 par le nouveau juge de Los Angeles, Peter Espinoza. Un documentaire, «Roman Polanski : wanted and desired» (1) vient de changer la donne. L'enquête de la cinéaste Marina Zenovich démontre que le juge Rittenband a eu une conduite violant les règles éthiques. Il aimait faire parler de lui en attaquant des gens célèbres et s'est juré qu'il «aurait la peau» de ce cinéaste mondialement connu. Pas très impartial, le juge... Les avocats (de l'époque) de Polanski n'ont plus qu'à enfoncer le clou : Roman a fait le bon choix en s'enfuyant. Ils reçoivent le soutien du procureur qui a porté l'accusation devant le tribunal en 1977 !
Début 2009, avec le documentaire sur les écrans, tout semble donc en place pour que le dossier soit classé. C'est ce que réclament les avocats de Polanski. Mais pour que le juge Espinoza puisse statuer, il faut que le cinéaste apparaisse sur le sol américain. Ce dernier refuse, craignant d'être traité comme un criminel dangereux. Et entreprend le tournage de «l'Homme de l'ombre» en Allemagne. Puis il passe l'été en Suisse, avant de faire un tour en Grèce. Laissant à ses avocats le soin de faire valoir devant la cour de Los Angeles que le mandat d'amener n'est plus valable puisqu'«aucun effort sérieux n'a été fait» au cours des années. C'est ce qui met le feu aux poudres. Piqué au vif, Steve Cooley, le nouveau district artorney de L. A., publie un document où il rappelle qu'une demande d'extradition a été envoyée aux autorités anglaises en 1978; que la Royal Canadian Mounted Police a été alertée en 1986; que la Thaïlande a été notifiée en 2005; et que le mandat a été présenté aux Israéliens en 2007.
Les avocats contestent : ils n'ont jamais été prévenus de ces démarches. Ont-elles seulement eu lieu ? On peut en douter, suggèrent- ils. Car, en cas d'exécution du mandat, les charges, rendues publiques, seraient apparues dans leur inanité.
Le procureur Cooley a-t-il besoin d'un procès à grand spectacle ? Aux Etats-Unis le poste est électif, comme celui de juge. Plus le tableau de chasse est riche, plus les électeurs sont contents. Cooley, élu deux fois en 2004 et 2008, surfe sur un sujet devenu sensible, la pédophilie.
Pourtant la victime de Polanski, Samantha Gailey, devenue une mère de famille de 45 ans, a passé l'éponge dès 1987 : «Les charges devraient être abandonnées. L'étalage constant des détails de cette affaire me cause un tort immense. Je suis devenue la victime de l'action du procureur.» Les rôles sont renversés. Le D. A. remue la fange par goût de la notoriété, la victime plaide pour l'accusé.
Traquenard policier
Du cote suisse, le procède du traquenard policier a des relents nauséabonds. «Nous n'avions pas d'autre solution», affirme la ministre de la Justice, Eveline Widmer-Schlumpf, visiblement mal à l'aise. Pourquoi «pas d'autre solution» ? Cet été, Hillary Clinton, ministre des Affaires étrangères, a engagé un bras de fer sur la pratique du secret bancaire suisse. Désormais, le Trésor américain peut se voir communiquer les avoirs des fraudeurs fiscaux, sur simple demande. Les Suisses se sont résignés à collaborer. Avec l'affaire Polanski, ils donnent un gage de bonne volonté. Détail qui ne manque pas de sel : Eveline Widmer- Schlumpf, membre du conseil de banque de la Banque nationale suisse, a été l'un des trois conseillers fédéraux en charge du dossier UBS-secret bancaire. Autre détail qui tue : selon le réalisateur Terry Gilliam, le ministre de la Culture suisse en personne était à l'aéroport pour accueillir le cinéaste.
Polanski victime d'un jeu trop diplomatique ? Et d'une ministre soucieuse de ne gâter en rien son ascension (Eveline Widmer- Schlumpf, en acceptant un maroquin contre l'avis de son parti, l'Union démocratique du Centre, l'a fait exploser et a été accusée de «trahison») ?
Pour l'heure, il a fait appel. Sera-t-il un jour emmené, menottes aux poignets, vers Los Angeles ? S'il était extradé, il risquerait de croiser Charles Manson. Qui est libérable dans deux ans.
Philippe Boulet-Gercourt, François Forestier Le Nouvel Observateur
liliane Admin
Nombre de messages : 19403 Age : 49 Localisation : dans la galaxie Date d'inscription : 02/05/2008
Sujet: Re: ROMAN POLANSKI ARRETE EN SUISSE Jeu 8 Oct - 20:08
Le 7 Octobre 2009, par Bernard-Henri Lévy, pour Le Point
Pourquoi je défends Polanski Abuser d’une fille de 13 ans est, évidemment, un crime grave.
Et être un artiste de génie n’a jamais constitué, pour quelque crime que ce soit, une circonstance atténuante.
Cela étant dit, et vu le vent de folie qui est en train de souffler sur les esprits, il convient aussi de rappeler les évidences suivantes.
1. L’illegal sexual intercourse – en français, détournement de mineure – dont Roman Polanski s’est reconnu coupable il y a trente-deux ans n’est pas, pour autant, le crime de sang, voire le crime contre l’humanité, que dénoncent, depuis dix jours, les vengeurs lâchés à ses trousses. C’est un crime, oui. Mais il y a des degrés dans l’échelle du crime. Et vouloir tout mélanger, essayer de nous faire croire qu’un viol serait un crime de même nature que celui, par exemple, dont fut victime Sharon Tate, sa femme, éventrée quelques années plus tôt alors qu’elle était enceinte de huit mois, prendre le risque, autrement dit, car c’est bien de cela qu’il s’agit, de voir Roman Polanski rejoindre Charles Manson dans le pénitencier dont celui-ci aura, au même instant, dès le 1er janvier 2010, la possibilité légale de demander à sortir, c’est une insulte au bon sens, une atteinte à la raison, la porte ouverte à toutes les confusions.
2. Cette affaire est d’autant plus insensée que la principale intéressée a choisi de pardonner, de tourner la page et, si possible, d’oublier. « Laissez-moi tranquille ! supplie-t-elle chaque fois que la Justice Spectacle, ou le Spectacle tout court, reviennent braquer leurs projecteurs sur ce pan de son passé, laissez-moi tranquille et oubliez, par la même occasion, cet homme dont je considère, moi, sa victime, qu’il a suffisamment payé ! ». Mais non. On a là des défenseurs des droits des victimes qui savent mieux que la victime ce qu’elle veut et ce qu’elle ressent. On est là face à des gens qui lui passeraient bien sur le corps, à la victime, plutôt que de lâcher leur proie et de renoncer à la délicate ivresse de punir. C’est honteux. 3. Quand la victime se désiste, n’appartient-il pas à la société, c’est-à-dire au juge, de poursuivre ? Oui, sans doute. D’un point de vue judiciaire strict, c’est en effet le droit de la société. Mais ce ne sera ni la première ni la dernière fois que le point de vue judiciaire strict manquera et aux exigences de la compassion et à celles de l’intelligence. Et de même que je ne me suis jamais privé de pointer, dans le Droit de cette Amérique que j’aime, des usages ou des peines qui, comme dans tous les systèmes de Droit, font entorse à la pure idée démocratique, de même il n’y a aucune raison de ne pas le dire : arrêter aujourd’hui un homme dont on a conclu, jadis, au terme de quarante-deux jours de prison, qu’il n’était pas un pédophile, le traquer comme un terroriste, l’extrader comme un ancien nazi, est peut-être conforme à la loi, mais certainement pas à la justice.
4. Serait-ce, comme on l’entend partout, que sa célébrité « sanctuarise » M. Polanski ? Non, bien entendu. J’ai passé mon existence à tenter de tirer de l’oubli des vies minuscules, des victimes sans visage et sans nom – et je tiendrais donc le même discours, exactement le même, si M. Polanski n’était pas M. Polanski. Sauf que… Je n’aurais pas à le tenir, justement. Car il n’aurait pas été arrêté. Son dossier serait enterré depuis des années. Et il ne se serait pas trouvé de magistrat pour, à la veille d’une élection (car les magistrats californiens sont des élus du peuple, comme les maires et les shérifs), décider cette arrestation médiatisée. La célébrité ne protège pas Roman Polanski, elle le dessert. Loin que Roman Polanski se cache derrière son nom, c’est lui, son nom, qui le désigne. Et s’il y a bien un « deux poids deux mesures » dans cette affaire, c’est celui qui fait de lui, Polanski, non pas un justiciable ordinaire, mais un symbole – et qui, de son éventuelle comparution, ferait un « grand bazar » politico-cathodique davantage qu’un procès équitable.
5. Car le fond de l’affaire est bien dans le parfum de justice populaire qui flotte autour de tout cela et transforme les commentateurs, les blogueurs, les citoyens, en autant de juges assermentés au grand tribunal de l’Opinion – les uns pesant le crime ; les autres le châtiment ; on a même vu l’un de ces vertueux, apparemment expert en castration chimique, proposer, pour ce nouveau Dutroux (sic), un traitement définitif… Etranges enragés qui ne trouvent rien à redire quand c’est un vrai puissant qui, sous nos yeux, se conduit en prédateur de mineures (ah, les « frasques » de M. Berlusconi…), mais deviennent implacables quand c’est un faux puissant qui n’a, comme Polanski, d’autre arme que son talent… Singuliers moralistes qui prennent un malin plaisir à se passer en boucle les détails de cette affaire sordide pour, ensuite, jeter la pierre…
Ce lynchage est un trouble à l’ordre public autrement plus sérieux que le maintien en liberté de Roman Polanski.
Cet acharnement de tricoteuses et de tricoteurs, cette volonté de voir au bout d’une pique la tête d’un artiste, sont l’immoralité même.
De deux choses l’une, messieurs les justiciers. Ou bien Polanski était ce monstre – et il ne fallait pas lui donner d’oscar ni de césar ; il fallait boycotter ses films ; il fallait le dénoncer aux autorités chaque fois qu’il venait, en famille, passer des vacances dans sa maison de Suisse. Ou bien vous n’avez rien trouvé à redire, jamais, à ses apparitions annoncées sur tous les tapis rouges de tous les festivals du monde ; vous sentez bien, comme moi, la formidable hypocrisie de ce procureur, affamé de reconnaissance et de gloire, qui se réveille un beau matin pour le livrer, tel un trophée, à la vindicte d’électeurs chauffés à blanc – et il faut, comme sa victime, prier pour qu’on le laisse, enfin, en paix.
Bridget
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Sujet: Re: ROMAN POLANSKI ARRETE EN SUISSE Ven 9 Oct - 1:39
L'hospitalité suisse n'est plus ce qu'elle était
et la nostalgie , non plus d'aillers !
Une helvète brandit une pancarte où il est inscrit «Bandits unis de Suisse» lors d'une manifestation devant le siège de la banque UBS à Zurich, le 15 novembre 2008. Crédits photo : AFP
Les Helvètes sont inquiets : il n'est plus une semaine, ou presque, sans que leur pays défraye la chronique. Secret bancaire, affaire Kadhafi, arrestation de Roman Polanski… Leur indépendance serait-elle de papier froissé ?
La Confédération, neutralité oblige, n'a jamais appartenu à aucune alliance. Mais, jusqu'à présent, elle pouvait compter sur quelques amis. En 1516, par exemple, après avoir été battus par François Ier et les Vénitiens à Marignan, les Suisses avaient signé avec la France la «Paix perpétuelle».
Aujourd'hui, le ministre français du Budget, Éric Woerth, a le verbe belliqueux contre les banquiers de Genève et Zurich, qui ont financé aussi bien les Médicis que Louis XVI. Les «amis de la Suisse» n'osent plus s'exprimer : Américains, Français, Allemands, Italiens et jusqu'au dictateur de carnaval de la Tripolitaine, le Libyen Kadhafi, s'acharnent sur elle. «Notre utilité est tombée en panne», constate la journaliste Joëlle Kuntz (1).
Même le quotidien anglais Financial Times, que l'on ne saurait soupçonner d'être opposé aux puissances d'argent qui régissent notre planète, a établi, dans l'une de ses récentes éditions (2), le lien entre les graves soucis de l'Union des banques suisses (UBS) aux États-Unis et l'empressement inhabituel de Berne à exécuter la demande d'arrestation formulée par la justice américaine à l'encontre de Roman Polanski.
Si, comme on dit dans le Valais, «la Suisse a fait tout juste» sur le plan juridique en emprisonnant Polanski - en 1999, elle avait extradé vers la France Maurice Papon, sans que cela crée de scandale -, l'hospitalité suisse n'est plus ce qu'elle était.
Dès que le fisc des États-Unis le leur a intimé, les dirigeants de l'UBS ont lâché les noms de plusieurs milliers de leurs clients américains. Et Polanski, qui possède un chalet à Gstaad, où il passe ses vacances en famille depuis cinq ans, était l'invité d'honneur du festival de cinéma de Zurich, financé par la Confédération, lorsqu'il a été saisi par les policiers !
À l'heure où la conseillère fédérale en charge de la Justice, une femme des Grisons, faisait embastiller le cinéaste dans un cachot secret, son homologue de la Culture rédigeait son discours célébrant le même homme.!!!!!
«Hôte félon»
La Suisse, «hôte félon», écrivent les gazettes du Léman. Le ridicule tue plus sûrement encore que la bêtise, et, derrière les molasses grises du palais fédéral à Berne, on mesure que cette affaire ne fait qu'isoler davantage la Confédération. À l'Hôtel Savoy, les élus du Conseil des États (la Chambre haute) partagent leur jus d'orange matinal avec ceux du Conseil national (la Chambre basse) pour tenter de «faire avancer le char» suisse. Cet art de la gestion laborieuse des désaccords entre quatre partis élus à la proportionnelle ne favorise pas les grands desseins. D'ailleurs, dans les piles de journaux helvètes qui leur sont offerts, les élus ne lisent que les pages consacrées à leur patrie. À l'inverse d'une communauté d'affaires formidablement internationalisée, la classe politique sent l'étable. «Le président de la Confédération, qui est allé se ridiculiser à Tripoli chez Kadhafi pour tenter de faire libérer deux de nos concitoyens, ressemble plus à Louis de Funès qu'à Batman», confie Luc Recordon, un sénateur suisse.
Ajoutant : «Nos institutions datent de 1848, elles sont dépassées, pas adaptées au monde moderne, comme notre personnel politique, qui ne voit jamais venir les dangers.»
Faute, donc, de politiques charismatiques (le système ne les tolère pas), les Suisses se font piétiner sur la scène internationale. Ils donnent d'ailleurs l'impression d'avoir tout fait pour que l'avalanche actuelle de scandales leur tombe sur la tête.
Ceux qui s'expriment au nom de la Confédération possèdent un sens aigu des gaffes magistrales. Ainsi, en 1995, lorsque des Juifs américains avaient accusé les banquiers suisses de ne pas vouloir rendre les fonds placés par des Juifs dans les coffres helvètes avant guerre, un M. Studer, président de l'UBS, avait eu la stupidité de dire que ces fonds représentaient «des cacahuètes». La facture, pour la Suisse, avait été colossale.
Mais ce n'était qu'un amuse-gueule. L'UBS, en rachetant la principale banque américaine de gestion de fortune (Paine Webber), était devenue leader dans ce secteur aux États-Unis.
Bien sûr, ses dirigeants avaient alors dû s'engager à se soumettre aux lois américaines (pas de secret bancaire) et, bien entendu, à ne pas pousser des Américains fortunés à fuir leur fisc.
Ce que les Suisses d'UBS ont scandaleusement encouragé. La férocité de l'administration fiscale américaine est sans limites : l'UBS a déjà dû trahir 4 500 de ses clients, s'acquitter d'une amende de 985 millions de dollars, et son avenir outre-Atlantique est «dans le lac».
«C'est toute la place suisse qui a été fragilisée par cette escroquerie de l'UBS», explique David Laufer (3), l'un des meilleurs spécialistes de la banque suisse.
Peut-on encore se sentir en sécurité en Suisse ? Dans les salles de marchés de Zurich ou de Genève, on commence à paniquer, tant la question se pose crûment. «C'est la fin d'une époque, dit Tristan Frachon, un financier, car, dans les banques, les directeurs de desk expliquent à leurs gestionnaires qu'ils sont responsables pénalement de leurs clients. Bref, renvoyer des clients, ce n'est pas évident. Et aider techniquement des clients sérieux devient difficile !».
Face à l'OCDE, la Suisse n'a guère eu d'autre choix, pour être retirée de la «liste grise» des paradis fiscaux, que d'accepter un certain nombre de règles qui, naturellement, doivent être communes à tous.
En renonçant, sans résister, à la distinction entre fraude fiscale et évasion fiscale, le gouvernement de Berne a de facto enterré le secret bancaire pour ceux qui ne résident pas en Suisse.
«La fiction d'une souveraineté intouchable a tenu tant que le monde le voulait bien, explique Joëlle Kuntz. Elle a volé en éclats quand la crise économique a incité les chefs des grands États occidentaux à récupérer l'argent des paradis fiscaux, et donc à mettre en péril la légitimité du secret bancaire helvétique et de ses pratiques.»
Une question de défense de l'individu
L'Helvétie ressemble ces jours-ci à un lapin pris en chasse par une bande de faucons.
À l'heure du tsunami de la crise financière mondiale, des bilans opaques des banques américaines, des coûts exorbitants des guerres en Irak et en Afghanistan, des déficits abyssaux des budgets des grands pays européens, le coffre-fort helvète est bien tentant.
Grâce au talent de gestionnaire de ses banquiers, la Suisse a réussi à accaparer 27,27 % de la richesse off-shore mondiale. Les attaques contre la Suisse sont donc plus liées à la compétition économique mondiale qu'à la défense des grands principes.
Depuis 2002, Berne a mis en place les règles les plus drastiques du monde contre le blanchiment d'argent sale. Des procédures qui sont à l'avant-garde de celles de tous les pays occidentaux.
En dehors des mafieux, qu'elle excluait de ses banques, la Suisse appliquait jusqu'à présent le secret ban caire non seulement à ses ressortissants et à ses résidents, mais aussi aux milliers d'étrangers qui refusaient de solder par des impôts jugés excessifs la gestion publique déficiente des finances publiques de leurs propres pays.
Les Suisses garantissent le secret bancaire parce qu'ils considèrent que, dans le domaine de la fiscalité («Plumer l'oie en obtenant le maximum de plumes et le minimum de cris», disait Colbert), l'État étant juge et partie, il ne peut pas être neutre.
Nos voisins estiment que le secret bancaire n'est pas une question de profit, mais une question de défense de l'individu. Ce secret bancaire n'est pas près de disparaître pour les Suisses ou les résidents en Suisse, car, ce pays étant une démocratie directe, il faudrait qu'une majorité se déclare pour cette révolution, ce qui est impossible, là-haut, dans les montagnes.
La Suisse, gérée au sou près - c'était encore un pays pauvre avant la dernière guerre - a l'une des pressions fiscales les moins fortes du monde. En attendant que la reprise de l'économie mondiale vienne renflouer les caisses de la France ou de l'Allemagne, la Suisse a de quoi s'inquiéter de l'attrait de ses voisins pour ses appas.
«Point d'argent, point de Suisse», fait dire Racine à Petit Jean, dans Les Plaideurs, et nos ministres des Finances connaissent leurs classiques. «Les requins tournent autour de notre joli lagon !», constate David Laufer.
(1) Le Temps, 31 juillet 2009.
(2) Financial Times, 30 septembre 2009.
(3) David Laufer est l'auteur de «Qui veut détruire la banque suisse ?» (Xenia, 2008).
Dernière édition par Bridget le Mer 29 Sep - 1:05, édité 2 fois
Bridget
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Sujet: Re: ROMAN POLANSKI ARRETE EN SUISSE Ven 9 Oct - 2:06
La liberté provisoire refusée à Roman Polanski
Le ministère helvétique de la Justice estime que le réalisateur pourrait en profiter pour quitter la Suisse.
Le ministère suisse de la Justice a annoncé mardi qu'il était opposé à une libération provisoire de Roman Polanski et a recommandé au Tribunal pénal fédéral de Bellinzone (sud), chargé de statuer, de rejeter le recours du cinéaste détenu en Suisse depuis dix jours.
"Nous avons demandé hier (lundi) au Tribunal pénal fédéral de Bellinzone de rejeter le recours de M. Polanski", a expliqué à l'AFP un porte-parole du ministère, Folco Galli.
"L'argument principal est que nous sommes persuadés qu'il existe un grand danger de fuite" en dehors du territoire suisse, a ajouté M. Galli, insistant sur le fait que, "même avec une liberté sous caution, il n'est pas garanti que M. Polanski restera dans la Confédération".
Les avocats de Roman Polanski, 76 ans, arrêté le 26 septembre à son arrivée en Suisse sur mandat d'arrêt américain, ont déposé le 29 septembre un premier recours auprès du Tribunal de Bellinzone sur le "mandat d'arrêt en vue d'extradition", assorti d'une demande de mise en liberté provisoire.
Le même jour, ils ont déposé un deuxième recours auprès du ministère de la Justice, lui demandant de "reconsidérer l'arrestation" elle-même, a précisé M. Galli.
Etant donné que les deux recours sont motivés par les mêmes arguments, le ministère suisse a estimé "inutile" de statuer sur la demande déposée auprès de ses services, a-t-il souligné.
Le Tribunal tessinois est donc désormais la seule instance à devoir se prononcer sur le recours de M. Polanski, recherché par la justice américaine à la suite d'une procédure ouverte en 1977 pour des "relations sexuelles illégales" avec une mineure âgée de 13 ans.
Récemment interrogée par l'AFP, la secrétaire générale du Tribunal de Bellinzone, Mascia Gregori Al-Barafi, est restée vague quant au délai qui s'écoulera avant que les juges ne rendent leur décision.
"Cela peut aller très vite, voire 10 jours. Mais cela dépend des cas", a-t-elle expliqué.
Une fois la décision connue, M. Polanski pourra faire appel.
Réagissant à la recommandation du ministère suisse, les avocats français de Roman Polanski ont rejeté l'argument selon lequel le cinéaste récompensé par l'Oscar du meilleur réalisateur (2003) et la Palme d'Or à Cannes (2002) pour "Le Pianiste", ne resterait pas en Suisse si la liberté provisoire lui était accordée dans l'attente d'une décision sur son extradition aux Etats-Unis.
"M. Polanski s'engage à ne pas quitter le territoire suisse durant toute la procédure d'extradition et à respecter toutes les obligations qui pourraient lui être imposées pour garantir cet engagement", ont répété maîtres Hervé Temime et Georges Kiejman, dans un communiqué.
Ils ont précisé que l'avocat suisse de Roman Polanski ferait "connaître ses observations pour permettre au Tribunal de Bellinzone de prendre sa décision en toute connaissance de cause".
Bien que le réalisateur possède un chalet en Suisse à Gstaad (centre) où il pourrait demeurer au cours de la procédure, Berne a d'ores et déjà prévenu la semaine dernière qu'une liberté provisoire était "exceptionnelle" dans la Confédération.
A priori, il est peu probable que Roman Polanski attende la fin de sa procédure d'extradition vers les Etats-Unis dans son chalet suisse de Gstaad. L'Office fédéral de la justice (OFJ) suisse, l'équivalent de notre ministère de la justice, a annoncé mardi qu'il s'opposait à la remise en liberté provisoire du cinéaste, détenu en Suisse depuis le 26 septembre. L'OFJ rejette la requête de l'artiste demandant la « reconsidération de son arrestation. Il estime qu'il présente « un grand danger de fuite». «Même avec une liberté sous caution, il n'est pas garanti que M. Polanski restera dans la Confédération», défend un porte-parole de la chancellerie. Le passé du cinéaste plaide contre lui. Polanski est depuis 1978 un fugitif aux yeux de la justice américaine. Poursuivi pour avoir eu en 1977 des relations sexuelles avec une adolescente de 13 ans, le réalisateur du « Pianiste » avait quitté les Etats-Unis pour l'Europe et s'était gardé d'y revenir.
Les avocats français de Roman Polanski ont balayé les soupçons de fuite planant sur le cinéaste, exprimée par la justice helvétique. «Notre client s'engage à ne pas quitter le territoire suisse durant toute la procédure d'extradition et à respecter toutes les obligations qui pourraient lui être imposées pour garantir cet engagement», ont de nouveau assuré maîtres Hervé Temime et Georges Kiejman.
Et «surtout, nous souhaitons que les juges suisses sachent s'extraire du lynchage médiatique qui n'est pas compatible avec la sérénité dans laquelle la justice doit être rendue».
La liberté provisoire «exceptionnelle» en Suisse
Roman Polanski a cependant déposé un autre recours sur le «mandat d'arrêt en vue d'extradition», assorti d'une demande de mise en liberté provisoire, devant le Tribunal pénal fédéral de Bellinzone en charge du dossier.
La chancellerie a donc également recommandé au Tribunal de Bellinzone de rejeter cette demande. Le Tribunal tessinois devrait rapidement, d'ici une dizaine de jours, se prononcer sur le sujet. Une fois la décision connue et si elle est négative, le réalisateur pourra faire appel. Ses avocats contestent notamment une lacune dans la rédaction de l'ordre d'arrestation qui, contrairement à ce qu'impose le traité d'extradition entre la Suisse et les États-Unis, ne mentionne pas la peine encourue par le cinéaste.
Cependant Berne a d'ores et déjà prévenu la semaine dernière qu'une liberté provisoire était «exceptionnelle» dans la Confédération. La détention de Roman Polanski - qui a été transféré dans un «local pénitentiaire» de la province de Winterthur (nord de Zurich) pourrait durer au moins six mois.
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Sujet: Re: ROMAN POLANSKI ARRETE EN SUISSE Mar 13 Oct - 1:22
L'avocat de Polanski inquiet pour la santé de son client
L'avocat de Polanski inquiet pour la santé de son client L'avocat du cinéaste a répété qu'il ne fuirait pas le pays en cas de remise en liberté. "Dans l'attente des suites de la procédure judiciaire, il s'est engagé à rester en Suisse" a-t-il ajouté, précisant que M.Polanski "ne réclamait aucune immunité artistique". Les autorités suisses se sont opposées le 6 octobre à une mise en liberté, renvoyant la décision finale au Tribunal pénal fédéral de Bellinzone.
"Le cinéaste est très touché de tous les soutiens qu'ils reçoit, il sait aussi que certains soutiens sont contre-productifs" a poursuivi l'avocat sans vouloir préciser quels soutiens étaient visé par cette déclaration.
Roman Polanski, primé notamment aux Oscars et au Festival de Cannes était recherché par la justice américaine après une procédure ouverte en 1977 pour des "relations sexuelles illégales" avec une adolescente alors âgée de 13 ans. Son arrestation, survenue plus de trente ans après les faits incriminées, a soulevé une vive polémique dans le monde sur la responsabilité morale et pénale des personnes célèbres.
Un extrait du Film : Polanski Wanted & Desired : Sharon Stone
Roman Polanski Interview Part 1
Roman Polanski Interview Part 2
Bridget
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Sujet: Re: ROMAN POLANSKI ARRETE EN SUISSE Ven 16 Oct - 22:10
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Exclusif. Un entretien avec la dramaturge de «Art» Yasmina Reza: ce que je sais de Polanski
Elle vient de remporter, à New York, le Tony Award de la meilleure pièce pour « Le Dieu du carnage », que Roman Polanski s'apprêtait à adapter au cinéma. Dans un témoignage exclusif à paraître ce jeudi dans « le Nouvel Observateur », Yasmina Reza s'exprime sur l'arrestation du cinéaste.
Nouvel Observateur. - Quand avez-vous vu, pour la dernière fois, Roman Polanski ?
Yasmina Reza. - Deux jours avant son arrestation, le 26 septembre. Nous déjeunions ensemble pour parler de l'adaptation, au cinéma, du « Dieu du carnage ». Il avait vu la pièce à sa création à Paris, en 2008. Pendant l'été suivant, en Suisse où, ironie du sort, nous passions nos vacances au même endroit, il m'a demandé avec délicatesse, car c'est un homme sans aucune infatuation, si les droits cinématographiques étaient libres. La pièce se jouait déjà un peu partout, notamment à Londres, et j'avais décliné d'autres propositions. Je lui ai dit oui tout de suite
Nouvel Observateur - Pourquoi ?
Y. Reza. - Parce que tout était évident. Roman Polanski est un génie du huit-clos, il a un sens puissant de la montée dramatique et une veine humoristique qu'il n'a pas exploitée depuis longtemps. Autre ironie du sort, nous sommes vite tombés d'accord pour situer l'action à New York, avec des interprètes américains. En studio ici, bien sûr.... Quand on a déjeuné, il allait commencer le mixage de son nouveau film « The Ghost », et moi, celui de mon premier, « Chicas » dans lequel joue sa femme, Emmanuelle Seigner. On avait prévu de travailler durant les week-end d'octobre, sur le scénario, le casting américain... Je me souviens même lui avoir dit : commençons tout de suite. Il m'a répondu qu'il était obligé de se rendre à Zürich pour assister à l'hommage qu'on lui rendait. Il n'avait pas la moindre intuition de ce qui allait lui arriver dès l'aéroport.
N.O. - Vous le connaissez depuis longtemps ?
Y. R.eza. - Depuis plus de vingt ans. Il avait vu ma première pièce et m'avait demandé d'adapter « La Métamorphose » qu'il allait jouer lui-même au théâtre.
N.O. - Comprenez-vous qu'il doive, même trente-deux ans après, répondre de ses actes devant la justice ?
Y. Reza. - Ce que je comprends ou non à titre privé n'a pas d'importance, et je ne veux pas entrer dans la problématique judiciaire, car je n'ai pas de compétences . Mais je suis choquée, le mot est faible, d'entendre parler de lui, par des gens qui ne savent rien, comme d'un violeur ou d'un pédophile. Je rappelle d'ailleurs qu'il n'est accusé que de détournement de mineure. Personne n'est au dessus des lois certes, mais tout le monde n'a pas la qualité de juge, d'avocat ou de témoin. Les gens ne connaissent pas les pièces complexes et contradictoires du dossier, ni l'histoire réelle, ni les protagonistes. Par quelle ivresse d'exister les hommes se donnent-ils le droit de condamner publiquement ? Ce qui me désole c'est la clameur vociférante qui s'exprime sans la moindre légitimité.
N.O. - Vous êtes son amie. Quel portrait faites-vous de lui ?
Y. Reza. - Je ne reconnais absolument pas l'homme qu'on décrit en ce moment. Celui que je connais mène une vie exemplaire. C'est une expression ridicule bien sûr, mais on se sent le devoir d'opposer des mots rigides et sans appel à ceux des détracteurs. Vous le savez par ce que j'écris depuis toujours, si je crois à l'amour, je crois moins au bonheur du couple ; or je citerais sans hésiter Emmanuelle et Roman comme un exemple rare de réussite dans ce domaine. C'est un couple profondément attachant, uni et solide. Ils ont deux enfants de 16 et 11 ans qu'ils éduquent sans laxisme. Les enfants sont d'une grande finesse, ils adorent leur père et sont aujourd'hui affreusement malheureux.
Roman a 76 ans, il a beau être vif et en pleine forme, il n'est pas plus éternel qu'un autre. Je les ai vus préparer la valise qu'ils ont envoyée à leur père, en prison. Ils ne la voulaient pas trop petite, pour pouvoir y mettre le plus de choses possibles. Et pas trop grande non plus, pour ne pas lui faire craindre une longue incarcération. Je ne raconte pas ça pour attendrir qui que ce soit, juste pour signaler la distorsion entre la vie réelle et le fantasme sur l'homme.
N.O. - Beaucoup de Français trouvent pourtant normale et légitime cette incarcération...
Y. Reza. - C'est bien ça qui m'inquiète. Pourquoi un homme respecté pendant trente ans, dont notre pays s'est enorgueilli de la présence lorsqu'il recevait un oscar, une palme d'or, un homme que nous avons décoré à plusieurs reprises, qui a été fait membre des plus prestigieuses institutions françaises, alors que nul n'ignorait les raisons de son exil, devient subitement un criminel parce que le vent d'une justice étrangère souffle autrement ? Il y a eu des biographies, des films, des articles, en quoi est-il plus coupable aujourd'hui qu'hier ?
N.O.- Vous n'ignorez pas qu'on va vous reprocher de prendre, en artiste, en privilégiée, la défense d'un artiste privilégié...
Y. Reza. - Mon privilège est celui que vous me donnez. Il est de pouvoir m'exprimer, ce qui est beaucoup. En revanche, pour ce qui le concerne, je n'ai pas le sentiment que le prestige de son nom soit de nature à l'aider. Au contraire. Son nom le déshumanise et le livre en pâture sans la moindre protection. Il y a dans cette affaire un total déni de singularité. La justice populaire n'a pas son pareil pour réduire l'être à son minimum. Pourquoi, lorsque les hommes utilisent leur liberté d'expression, qui se transforme aussitôt en liberté d'accusation, disparaissent la compassion, la retenue, la tentative de compréhension, qui sont autant de forme de l'intelligence ?
J'avais écrit un petit texte à propos d'une autre affaire violente sur la vertu du silence. J'ai été confondue et atterrée par les mots de Luc Besson. Au nom de quoi s'est-il précipité, sans rien savoir de l'affaire, pour enfoncer la tête d'un homme déjà fragilisé ? On peut, du simple point de vue de la prudence, trouver un peu hâtif les termes choisis par Frédéric Mitterrand lors de sa première déclaration, mais quel horrible et injuste retour de bâton ! Avec quelle médiocrité on a utilisé un livre que tout le monde avait lu pour le retourner contre lui avec un opportunisme abject.
N.O. - Etes-vous aujourd'hui en contact avec Roman Polanski ?
Y. Reza. - Contact direct, non, c'est impossible. Mais je lui ai écrit quelques lignes, et Emmanuelle m'a transmis un message de lui. Son message était positif mais je sais qu'il est affaibli. Il est angoissé pour Emmanuelle et les enfants. Il souffre de ne pas les voir. Et il a l'impression de revivre ce à quoi il voulait échapper le plus : la publicité et le lynchage médiatique. N'oubliez pas qu'après l'assassinat si sauvage, en 1969, de sa femme Sharon Tate, enceinte de huit mois, on l'avait accusé en raison de son mode de vie et de ses films, d'avoir une part de responsabilité dans le drame.
N.O. - Vous ne parlez pas de lui comme d'un inculpé mais comme d'un personnage de tragédie grecque...
Y. Reza. - Roman a un destin vraiment hors du commun. Et tout homme qui sort de la norme est hélas une cible. Si on se penche sur les événements de sa vie, sur ce qu'il a enduré, surmonté, créé, défait, rebâti, on ne peut être que profondément bouleversé. Il a fui l'Amérique que, entre parenthèse, il n'a cessé d'aimer, non par lâcheté mais par terreur. Ce n'est pas enviable d'être un exilé. Exilé toute sa vie en quelque sorte. C'est une situation qui est lourde, douloureuse. Il a payé très cher cette histoire, contrairement à ce que les gens qui l'accablent veulent bien penser. Il l'a payée au plan professionnel, privé. Et quels que soient ses papiers, ses terres d'accueil, ses distinctions honorifiques, Roman reste un juif d'Europe centrale. Il y a en soi comme un principe de non-appartenance éternelle qui vous détermine et qui n'a rien à voir avoir avec les lieux ou les lois. Cela donne de la force aussi et beaucoup de vitalité.
N.O. - Quelle pourrait être, selon vous, l'issue de cette affaire ?
Y. Reza. - Mon souhait serait d'abord qu'il soit relâché et mis par la justice suisse en liberté surveillée, qu'il soit assigné à résidence. Qu'il puisse voir les enfants, Emmanuelle, et vivre sous le ciel. Et qu'on le laisse tranquille, je veux dire avec les mots. Pour affronter ce qui l'attend et que j'ignore, il a besoin de sérénité. D'ailleurs tous les acteurs impliqués dans cette affaire ont besoin de sérénité.
N.O. - Votre pièce, « Le Dieu du carnage », triomphe actuellement à New York. Vous connaissez bien les Etats-Unis. Que pensez-vous de leur justice ?
Y. Reza. - Là encore, je me garderais de parler sans compétence. Une réflexion cependant : en Amérique le juge est élu, il se trouve dans la situation de l'homme politique en France. Il doit conforter son électorat, il doit avoir une image. C'est un concept qui nous est étranger.
N.O. - Si Roman Polanski peut lire l'Observateur en prison, quel message voulez-vous lui faire passer ?
Y. Reza. - Il y en a deux. Le premier, d'ordre général : sache, Roman, qu'il y a beaucoup de gens, et ce ne sont ni des artistes ni des privilégiés, qui pensent à toi et te soutiennent. Le second, plus personnel : poursuivons notre travail commun, même séparément, je t'attends.
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Sujet: Re: ROMAN POLANSKI ARRETE EN SUISSE Sam 17 Oct - 10:49
UNE DECISION EST ATTENDUE
La justice suisse doit prendre une décision "dans les prochains jours" sur une éventuelle libération du cinéaste Roman Polanski, en prison depuis le 26 septembre, a indiqué vendredi à l'AFP le consul général de France Jean-Luc Fauré-Tournaire.
"La cour de Bellinzone doit se prononcer dans les prochains jours", a expliqué M. Fauré-Tournaire.
Il a démenti des informations parues dans la presse suisse faisant état d'une décision "en fin de semaine" du Tribunal pénal de Bellinzone (sud). "C'est une interprétation", a-t-il assuré.
Sur son site internet, le quotidien Blick avait écrit que la décision du Tribunal concernant une éventuelle libération du réalisateur franco-polonais "pourrait se produire aujourd'hui", vendredi.
Interrogé par l'AFP à Paris, l'un des avocats français du cinéaste, Maître Hervé Temime, a également rejeté cette possibilité.
"Il n'y a aucune décision prise au jour d'aujourd'hui et je ne sais pas quand interviendra la décision du tribunal, donc a fortiori dans quel sens elle ira. Je n'en ai aucune idée", a-t-il souligné.
Alors que le lieu de détention de M. Polanski est tenu secret par les autorités, le site internet de Blick a publié une série de photos montrant le consul français se rendre dans une prison identifiée par le journal comme étant celle de Winterthour (est).
2009 AFP.
Bridget
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Sujet: Re: ROMAN POLANSKI ARRETE EN SUISSE Sam 17 Oct - 22:30
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Roman Polanski quitte sa prison zurichoise pour des soins
Le réalisateur franco-polonais Roman Polanski, a quitté sa cellule pour des examens médicaux. (Reuters/Hannibal Hanschke)
"Le peu que je sais, c'est que M. Polanski a dû quitter la prison pour subir des examens médicaux. Il est clair que M. Polanski est à la fois fatigué moralement et physiquement", a-t-il déclaré à Reuters.
"Je l'ai vu il y a une semaine et, après l'avoir vu, j'étais vraiment sorti le coeur lourd parce que j'avais le sentiment d'un homme (...) affaibli et inquiet.
"De manière plus générale, son âge et sa situation personnelle font que nous avons des éléments vraiment très forts pour demander et obtenir sa mise en liberté", a ajouté l'avocat.
Roman Polanski, âgé de 76 ans, a été arrêté le 26 septembre à son arrivée à Zurich en vertu d'un mandat d'arrêt émis aux Etats-Unis. La justice américaine lui reproche une relation sexuelle avec une mineure de 13 ans en 1977. Celle-ci a entre temps retiré sa plainte.
Le réalisateur de "Chinatown" et de "Rosemary's Baby" a fui la Californie en 1978 craignant d'être condamné. Depuis, il a principalement vécu en France.
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Sujet: Re: ROMAN POLANSKI ARRETE EN SUISSE Sam 7 Nov - 1:19
L'affaire Polanski examinée en appel le 10 décembre à Los Angeles
Les avocats de Roman Polanski vont réclamer la relaxe du réalisateur inculpé dans une affaire de relations sexuelles avec une mineure en 1977, lors d'une audience en appel à Los Angeles le 10 décembre. Trois juges de la cour d'appel du second district de Californie entendront les avocats du cinéaste qui souhaitent obtenir l'abandon des charges pesant contre leur client, arguant qu'il y a eu collusion entre le juge et le procureur en 1978 quand les poursuites ont été lancées. Les avocats espèrent contrer une décision prise en mai par une juridiction inférieure. Le juge de Los Angeles Peter Espinoza avait alors estimé que Roman Polanski ne pouvait faire valoir ses droits devant cette cour tant qu'il se trouvait à l'étranger. Il avait néanmoins précisé qu'il "étudierait le bien-fondé" de la demande de relaxe si Roman Polanski revenait sur le sol américain.
Par ailleurs, le tribunal pénal de Bellinzone (Suisse) a annoncé avoir reçu, mardi, des avocats de Roman Polanski une nouvelle demande de liberté provisoire sous caution du cinéaste franco-polonais détenu en Suisse depuis le 26 septembre sur mandat américain . "Il s'agit d'un nouveau recours contre le refus du ministère suisse de la Justice de mise en liberté provisoire" annoncé vendredi, a précisé à l'AFP le secrétaire général suppléant du tribunal pénal, Patrick Guidon. Après le rejet de leur demande par le ministère suisse, les avocats de Roman Polanski avaient annoncé samedi leur intention de déposer auprès de l'instance juridique une nouvelle demande de liberté provisoire avec des "garanties adéquates", sans les préciser. Ils espèrent ainsi contrer l'argument avancé vendredi par Berne selon lequel il existe un "risque de fuite (...) élevé" du cinéaste.
Caution
Les avocats n'ont pas donné non plus de détails sur la nature de la caution proposée, la dernière soumise au ministère de la Justice ayant été jugée "élevée, mais pas liquide", donc pas de nature à être saisie en cas de fuite, selon un porte-parole.
Les avocats du réalisateur âgé de 76 ans tentent par tous les moyens légaux possibles d'obtenir une mise en liberté provisoire de leur client qui a déjà passé plus d'un mois en prison. Ils ont la possibilité, conformément la législation helvétique, de réitérer "en tout temps" des demandes de mises en liberté, a précisé Patrick Guidon.
Le 20 octobre, le tribunal pénal fédéral de Bellinzone a déjà rejeté une première demande de mise en liberté provisoire, également en raison des risques "élevés" de fuite du cinéaste.
Roman Polanski, qui a reçu l'Oscar du meilleur réalisateur (2003) et la Palme d'or à Cannes (2002) pour Le Pianiste, est recherché par la justice américaine pour des "relations sexuelles" avec une mineure de 13 ans en 1977. Il a annoncé le 23 octobre qu'il s'opposerait à son extradition vers les États-Unis, dont la demande officielle a été reçue le même jour par les autorités helvétiques.
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Sujet: Re: ROMAN POLANSKI ARRETE EN SUISSE Sam 7 Nov - 1:28
Pour Roman Polanski
Le 28 Octobre 2009, par Bernard-Henri Lévy
Les jours passent. Et Roman Polanski est toujours en prison, se couche et se réveille en prison, voit sa femme une heure par semaine au parloir d’une prison – tandis que ses enfants de 11 et de 16 ans, quand ils ont le courage d’aller encore à l’école, doivent affronter le regard des copains qui ont entendu, à la maison, que le papa des petits P., le monsieur qu’on frétillait de côtoyer par enfants interposés, le parent d’élève qu’on était grisé, les soirs de Césars, de reconnaître à la télé, était finalement un criminel, un violeur, un sodomite, un pédophile.
Alors, puisqu’on en est là, puisque les jours passent et que tout le monde a l’air de trouver la situation normale, puisque les soutiens de Roman Polanski perdent courage et, parfois, doutent, puisque la meute des tricoteurs et tricoteuses a même réussi, semble-t-il, à convaincre le ministre de la Culture qu’il avait parlé trop vite, sous l’empire de l’émotion, alors qu’il n’a fait que son devoir, je veux redire ici, une fois encore, pourquoi toute cette affaire est honteuse.
Il est honteux de jeter en prison un homme de 76 ans pour un détournement de mineure – la seule charge retenue, aujourd’hui comme à l’époque, par la justice californienne – commis il y a trente-deux ans.
Il est honteux que, dans un pays, la France, où l’on peut trucider une vieille dame, torturer son prochain, le mutiler, et savoir que son crime sera, comme tous les crimes de sang, prescriptible au bout de dix ans, tout le monde fasse comme si ce crime-ci, celui de Polanski, devait jouir d’une imprescriptibilité de fait.
Il est honteux de voir les habitués du Café du Commerce planétaire, antiaméricains pavlovisés qui ne sont jamais à court de mots pour fustiger l’Amérique sur tout et sur n’importe quoi, -rester brusquement sans voix, devenir doux comme des agneaux et, quand il s’agit de lui, Polanski, juste répéter : « ah, c’est l’Amérique… pas touche à la loi américaine… dura lex sed lex… »
Il est honteux d’entendre une avocate qui, comme Gisèle Halimi, a passé sa vie à sortir des gens de prison pour des crimes autrement plus lourds que celui que l’on reproche à l’auteur du « Pianiste », hurler avec les loups, chez Taddei : « un crime a été commis, la justice est la même pour tous, Polanski doit être jugé ».
Il est honteux de voir des intellectuels dont le rôle devrait être de calmer le jeu et de refroidir les emportements populaires, emboîter le pas, comme Michel Onfray, dans Libération, au troupeau des « ignorants enthousiastes » (Joyce) et se livrer, au nom de la défense de l’enfance outragée, aux amalgames les plus odieux (que ne les entend-on, ceux-là, dénoncer avec autant d’ardeur l’outrage, pour le coup, sans limite qu’est le martyre des enfants soldats en Afrique, ou des -enfants esclaves en Asie, ou des centaines de millions d’enfants morts de faim, selon les estimations de la FAO, depuis… trente-deux ans ?).
Il est honteux de voir un Luc Besson se ruer à la télévision pour, vêtu de probité candide, crier haro sur le baudet et, comme à la pire époque des chasseurs de sorcières mac-carthystes, dénoncer son camarade.
Il est honteux de continuer à répéter, comme font les uns et les autres, que la justice doit être « égale pour tous » alors que, s’il y a bien une « inégalité », s’il y a un « deux poids et deux mesures », c’est au détriment, pas en faveur, de Polanski.
J’ai fait le test. Le 2 octobre dernier, sur NPR, dans l’émission de radio « On Point », où j’affrontais une Geraldine Ferraro répétant en boucle, jusqu’à la nausée : « Polanski a eu une lovely life ; maintenant, il faut qu’il paie », j’ai lancé un appel aux auditeurs : « qu’on me signale un cas, un seul, d’un anonyme, coupable de la même faute, et que l’on serait venu chercher trente ans après les faits ». On ne m’en a, à ce jour, pas trouvé un. Et on ne m’en a pas trouvé, car il fallait être Polanski justement, il fallait être un artiste de renommée mondiale, pour qu’un juge élu, bientôt en campagne électorale, assoiffé de publicité, fasse remonter le cas des oubliettes où la sagesse des peuples range, même aux Etats-Unis, les très anciens dossiers des délinquants qui n’ont pas récidivé.
Il est étrange – honteux, et étrange – d’observer comment les mêmes qui, drogués au soupçon et voyant des complots partout, passent leur temps à s’interroger sur les agendas secrets des Etats ne semblent pas le moins du monde gênés par ce timing, pourtant, extrêmement bizarre : un homme qui a une maison en Suisse ; qui y passe, depuis des années, toutes les vacances scolaires en famille ; et qui, soudain, sans élément nouveau, renoue avec le cauchemar qui a été le lot de sa vie.
Car il est honteux, enfin, que l’on ne puisse, quand on parle de cette vie, évoquer l’enfance au ghetto, la mort de la mère à Auschwitz, le meurtre de la jeune épouse éventrée avec l’enfant qu’elle portait, sans qu’hurlent au chantage (?) les braillards de la nouvelle justice populaire : du plus abominable serial killer, la « culture de l’excuse » ambiante veut bien scruter l’enfance difficile, la famille à problèmes, les traumatismes – mais Roman Polanski serait le seul justiciable au monde à n’avoir droit à aucune circonstance atténuante… C’est l’ensemble de l’affaire, en réalité, qui est honteux.
C’est le débat qui est nauséabond et où il faudrait pouvoir ne pas entrer du tout.
Je ne connais guère Roman Polanski. Mais je sais que tous ceux qui, de près ou de loin, trempent dans ce lynchage se réveilleront bientôt, horrifiés par ce qu’ils ont fait, honteux.
Nombre de messages : 2631 Age : 72 Localisation : Paris Date d'inscription : 13/05/2008
Sujet: Re: ROMAN POLANSKI ARRETE EN SUISSE Lun 16 Nov - 19:24
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La Suisse face à la demande d'extradition de Roman Polanski, par Matthieu de Boisséson
LEMONDE.FR | 13.11.09
La demande d'extradition de Roman Polanski présentée par les Etats-Unis aux autorités judiciaires suisses soulève, malgré les apparences, de graves questions juridiques.
Un examen superficiel pourrait conduire à penser que les juridictions suisses sont saisies d'un débat classique, dont l'issue ne fait guère de doute.
Roman Polanski ne saurait invoquer la prescription des faits, qui ne sont pas prescrits au regard du droit américain, droit du pays requérant.
Il lui est également difficile de soutenir que l'extradition risquerait de le livrer nécessairement à une procédure irrégulière, ou à un traitement inhumain ou dégradant.
Enfin, même si la procédure passée a été affectée de carences et d'irrégularités, le Tribunal fédéral suisse a tendance à avoir recours aux critères du "vice irrémédiable", de sorte que si l'Etat requérant, en l'occurrence les Etats-Unis, garantit à la personne qui fait un recours contre son extradition un nouveau procès conforme aux principes fondamentaux de la Convention européenne des droits de l'homme du 4 novembre 1950, dont la Suisse est signataire, et à laquelle se réfère l'article 2 de la loi suisse sur l'entraide internationale en matière pénale du 20 mars 1981, dans ce cas le recours est souvent rejeté. Il en est de même si la procédure contestée fait l'objet d'une régularisation.
On peut donc se demander si les juridictions suisses, et en dernier ressort le Tribunal fédéral suisse, accepteraient de considérer les irrégularités passées de la procédure américaine comme des "vices irrémédiables", qui empêcheraient Roman Polanski, extradé aux Etats-Unis, de faire l'objet d'un procès équitable. Au fond, on serait en présence, à propos d'un homme exceptionnel, d'une procédure banale.
Pourtant, il n'est pas interdit de penser que cette vision, en apparence simple et logique, est réductrice. Une extradition n'est pas une simple mesure administrative, surtout pour un pays comme la Suisse où la notion d'espace, à la fois politique, juridique et symbolique, a tant d'importance.
Mais comprendre cela suppose un réveil mental. En fait, les questions soulevées par la situation actuelle de Roman Polanski relèvent du respect des droits de la défense et du droit à la liberté, valeurs universelles, mais elles se rattachent aussi à la singularité de l'histoire de la Suisse, aux principes fondamentaux de sa grande démocratie.
Tout d'abord, l'autorité judiciaire suisse sera sans doute amenée à s'interroger sur les conditions de l'arrestation à Zurich de Roman Polanski, au regard de l'acquisition par ce dernier d'une maison dans le canton de Berne, en 2006.
En effet, aux termes de la loi fédérale sur l'acquisition d'immeuble en Suisse par des étrangers, en date du 16 décembre 1983, les autorités cantonales et le ministère de la justice procèdent à une enquête approfondie sur l'acquéreur, en vue d'octroyer une autorisation d'acquérir sur le territoire suisse. Une enquête judiciaire est effectuée. Des questions sont posées à l'acquéreur sur ses liens avec la Suisse, sur les raisons de son choix du territoire suisse, et du canton considéré, comme lieu de résidence ou de villégiature.
Cette enquête, puis cette autorisation ne sont pas de simples mesures administratives. S'exprime, à travers elles, non seulement un contrôle, mais un consentement explicite, personnel, entre l'Etat suisse et l'acquéreur, qui permet à celui-ci de s'établir dans un des cantons de la Confédération.
On peut être frappé par la contradiction qui a existé entre le fait de permettre à Roman Polanski d'acquérir sa maison, de séjourner fréquemment en Suisse, et celui de l'arrêter brusquement alors qu'il était déjà recherché en 2006 avant son acquisition.
Cette contradiction, que l'Office fédéral de la justice explique par le cloisonnement de ses services, altère, en réalité, les conditions de son arrestation, parce qu'elle s'apparente à un principe bien connu dans d'autres domaines du droit international, celui de l'"estoppel", l'interdiction de se contredire au détriment d'autrui.
Même si une autorisation d'acquérir ne confère pas d'immunité, il demeure que les évènements se sont organisés pour M. Polanski, depuis au moins l'acquisition de sa maison, comme un traquenard.
Ce scénario s'est accentué lorsque l'Office fédéral a lui-même prévenu les autorités américaines de l'arrivée imminente de Roman Polanski à Zurich. Pourquoi ne pas l'avoir fait avant ? Et surtout, cette dernière démarche est-elle conforme aux autorisations d'installation et de circulation données à M. Polanski par les mêmes autorités ? Pourquoi avoir donné prétexte à une illusoire immunité ? Telle est la question qui touche aux exigences d'équité et de liberté auxquelles la Suisse est attachée, et que Jacques Chessex, avant de mourir, avait si intensément ressentie, en enfant rebelle mais fidèle à son pays.
En second lieu, puisqu'il n'y a pas de prescription, c'est l'ensemble de la procédure suivie depuis 1977 qu'il revient à l'autorité judiciaire suisse d'examiner, puisque la demande d'extradition en est la résultante. L'imprescriptibilité suscite une éclipse juridique du temps qui concerne aussi la procédure : que les irrégularités se soient produites hier ou en 1977, peu importe. Or ces irrégularités ne sont pas simplement graves, elles sont reconnues par les autorités américaines elles-mêmes, puis par la victime.
Le 8 août 1977, Roman Polanski fut convaincu de relations sexuelles avec une mineure, à travers un accord de procédure légal, en vertu de la section 261.5 du code pénal. Il était prévu que la peine de M. Polanski serait fondée sur le rapport du département de mise à l'épreuve (Probation Department).
En septembre 1977, violant cet accord, le juge ne tint pas compte du rapport et décida l'incarcération de M. Polanski. Le procureur Gunson, aujourd'hui à la retraite, a lui-même établi dans un témoignage que cette décision constituait à la fois une peine et un détournement de procédure.
Roman Polanski passa quarante-deux jours en prison, et fut libéré régulièrement, le 27 janvier 1978. Par la suite, le juge Rittenband renia une seconde fois son engagement, et indiqua aux conseils qu'il allait réincarcérer Roman Polanski. Il refusa la tenue d'une audience publique, pourtant sollicitée par les parties.
En 1988, des témoignages ont révélé que le juge Rittenband était sous l'influence de personnes qui le conseillaient dans ses décisions, extérieures à la procédure.
Plusieurs conclusions peuvent être tirées de cette situation.
Au regard du traité d'extradition, le juge suisse peut vérifier si suffisamment d'éléments probants existent pour considérer que M. Polanski a déjà été condamné, ce qui interdirait l'extradition.
Au surplus, le juge suisse peut estimer que les irrégularités de procédure sont patentes, qu'elles sont irrémédiables parce qu'elles ne peuvent être régularisées, et que l'ensemble du processus judiciaire suivi depuis 1977, jusqu'à l'arrestation en septembre 2009, ne sont pas conformes à la Convention européenne des droits de l'homme. Le Tribunal fédéral a déjà pour ce motif refusé une entraide judiciaire, par exemple des communications de documents et de comptes bancaires dans l'affaire Yukos. Il faut observer que la victime elle-même a déclaré par une requête d'abandon des poursuites du 23 octobre 2009 que "M. Polanski méritait d'être traité équitablement ; il ne l'a pas été".
En définitive, les tribunaux suisses peuvent soit renvoyer l'affaire et le principal intéressé vers le système judiciaire américain, soit affronter la vraie question que soulève l'affaire Polanski. Une question d'équité ? Pas seulement. Aussi celle d'un retour de la Suisse sur elle-même. Pays de sentiers, de cantons et de bourgs, elle est aussi celui de l'ouverture au monde, de la liberté fragile, de sa défense.
Nombre de messages : 2631 Age : 72 Localisation : Paris Date d'inscription : 13/05/2008
Sujet: Re: ROMAN POLANSKI ARRETE EN SUISSE Jeu 19 Nov - 21:04
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«Polanski n'acceptera pas d'être extradé aux États-Unis»
19/11/2009
INTERVIEW - L'avocat du cinéaste, Me Hervé Temime, décrit un client très éprouvé par deux mois de détention en Suisse.
Conseil de Roman Polanski, Me Hervé Temime s'insurge contre son maintien en détention par les autorités suisses et détaille les garanties fournies à l'appui de sa demande de mise en liberté.
LE FIGARO. - Voici bientôt deux mois que Roman Polanski est détenu en Suisse. Comment se porte-t-il ?
Me Hervé TEMIME.- Il se montre très courageux dans cette épreuve, même s'il la vit à la fois comme dure et injuste. En revanche, la situation est excessivement difficile à supporter pour sa femme et ses deux enfants de 11 et 16 ans, qui sont profondément inquiets pour lui. Depuis leur naissance, Roman Polanski est un père à la fois présent et affectueux, si bien que sa présence leur manque énormément. En dépit des trop rares visites qu'ils ont pu lui rendre, ils sont très perturbés psychologiquement par cette séparation, qu'ils vivent comme un véritable déchirement.
Dans quelles conditions le cinéaste est-il détenu ?
Roman Polanski est très bien traité par un personnel pénitentiaire de grande qualité. Pour autant, cet homme de 76 ans passe toutes ces journées seul dans une cellule à la fenêtre grillagée. Parce qu'il est la dignité faite homme, je ne l'ai guère entendu se plaindre. Cependant, nous espérons tous que sa demande de mise en liberté sera prochainement acceptée. À titre personnel, j'ai le sentiment qu'une prolongation de sa détention constituerait une injustice exceptionnelle.
La justice suisse semble craindre qu'il prenne la fuite. Quelles garanties apporte-t-il à cet égard ?
En premier lieu, il s'engage sur l'honneur à ne pas quitter la Suisse durant toute la procédure d'extradition, quelle qu'en soit la durée. Par ailleurs, il est prêt à être assigné à résidence dans son chalet de Gstaad. Il accepterait même de porter un bracelet électronique, ce qui est possible dans les procédures d'extradition en vertu d'une décision fédérale rendue le 13 octobre 2009. À la demande des autorités suisses, enfin, il est prêt à offrir une somme d'argent très significative au regard de ses moyens financiers pour conforter son engagement solennel.
Le 20 octobre dernier, pourtant, une première demande de mise en liberté avait été rejetée.
Depuis lors, nous avons apporté des garanties plus fortes et plus appropriées. En outre, une demande d'extradition a été formulée par les États-Unis et la peine encourue par le cinéaste est passée de cinquante à deux ans. Pour autant, je dénonce là une décision absurde. En 1978, Roman Polanski s'est prêté à toute une série de tests qui ont démontré son absence de dangerosité. Par ailleurs, les faits pour lesquels il est retenu sont vieux de trente-deux ans et j'observe que la victime, Samantha Geimer, souhaite ardemment que les poursuites cessent. Contrairement à ce qui a trop souvent été dit, Roman Polanski ne tire donc aucun bénéfice de sa notoriété dans cette affaire. Au contraire, il en a constamment pâti.
Le parquet de Los Angeles, qui lui reproche d'avoir déjà pris la fuite en 1978, n'a-t-il pas de bonnes raisons de redouter qu'il se dérobe une nouvelle fois ?
Roman Polanski n'a jamais voulu fuir ses responsabilités. S'il a quitté la Californie, c'est parce qu'il a été trahi par un juge qui n'a pas respecté l'accord passé entre toutes les parties.
Une audience importante doit se dérouler le 10 décembre prochain en Californie. Est-il concevable que Roman Polanski accepte finalement son extradition pour y assister ?
Non. Nous soutenons que Roman Polanski a déjà purgé sa peine en se soumettant, dès 1978, à des tests psychologiques menés en milieu fermé durant quarante-deux jours. Par ailleurs, nous soulevons le problème de la prescription qui, s'il n'est pas abordé par la convention d'extradition liant la Suisse et les États-Unis, se pose indéniablement au regard des principes généraux du droit. Nous soutenons enfin que M. Polanski n'a pas fait l'objet d'un procès loyal à Los Angeles. Pour toutes ces raisons entre autres, sa position demeure invariable : il n'acceptera pas d'être extradé aux États-Unis.
Nombre de messages : 19403 Age : 49 Localisation : dans la galaxie Date d'inscription : 02/05/2008
Sujet: Re: ROMAN POLANSKI ARRETE EN SUISSE Mer 25 Nov - 16:32
ATS | 25.11.2009 | 15:50
Polanski libéré contre une caution de 4,5 millions de francs JUSTICE | Le TPF accepte la libération sous caution du cinéaste.
Roman Polanski pourra sortir de prison contre le versement d'une caution de 4,5 millions de francs. Dans un arrêt rendu mardi, le Tribunal pénal fédéral (TPF) qui siège à Bellinzone a accepté le recours du cinéaste contre son maintien en détention extraditionnelle.
«La cour a jugé que la caution offerte par le recourant, combinée à d'autres mesures telles que le dépôt des documents d'identité et l'assignation à résidence sous contrôle électronique devait être considérée comme propre à parer le risque de fuite» a estimé le TPF dans son arrêt publié mercredi. Un recours au Tribunal fédéral peut être formé contre cette décision, précise le TPF.
Roman Polanski, 76 ans, avait été arrêté le 26 septembre dernier à son arrivée à l'aéroport de Kloten. L'auteur de «Rosemary's baby» fait l'objet d'une demande d'extradition déposée par les Etats-Unis.
Le cinéaste avait fui ce pays en 1978 après que la justice californienne l'avait jugé coupable d'abus sexuels commis en 1977 sur une adolescente de 13 ans. M. Polanski qui avait plaidé coupable risque deux ans de prison au maximum.
http://www.tdg.ch/node/121203
Bridget
Nombre de messages : 2631 Age : 72 Localisation : Paris Date d'inscription : 13/05/2008
Sujet: Re: ROMAN POLANSKI ARRETE EN SUISSE Jeu 26 Nov - 11:43
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Dans la cellule de Roman Polanski
Le cinéaste franco-polonais, arrêté il y a deux mois en Suisse, est l’enjeu d’un bras de fer entre Paris, Los Angeles et Berne, mais aussi de l’une de ces bagarres d’intellectuels dont la France a le secret. Ariane Chemin raconte comment, poursuivi depuis trente-deux ans pour le viol d’une jeune fille, il affronte ce nouvel épisode de sa vie de mal-aimé, où se sont entrelacés les drames et la gloire.
On pourrait croire qu’il filme, dans cette pièce blanche qui lui tient lieu de parloir. Il va et vient en bas de survêt’ et blouson étriqué, une vieille écharpe autour du cou. Son uniforme de tournage. Ceux qui lui rendent visite n’en reviennent pas≈: Polanski le prisonnier ressemble comme un double à Polanski le cinéaste qui réaliserait là, dans une prison, son dernier long-métrage. "C’est étrange, on cherche les caméras, dit un ami. C’est comme si on l’avait kidnappé et placé dans un décor."
Depuis sa cellule, il a réglé avec son fidèle monteur, Hervé de Luze, les derniers détails de son prochain film, qui sort le 3 mars : "The Ghost", l'histoire d'un ex-Premier ministre britannique accusé de crimes de guerre. Par téléphone, il a commandé quelques corrections, grâce aux DVD visionnés en prison. Le film est terminé.
Désormais au chômage technique, il regarde des vidéos, fait de la gym et déplace, des heures durant, ses rois, ses fous et ses reines sur son échiquier de poche. Les échecs, sa passion. "Il pousse les jours les uns après les autres", rapporte un de ses visiteurs. Après avoir soulevé la cloche qui tient au chaud le dîner qu’on lui sert chaque fin d’après-midi à 17 h 30, il s’excuse poliment : "Je n’ai pas très faim."
Les soirées sont longues dans les prisons. Le détenu peut se repasser à loisir le film de ces deux derniers mois. Comment aurait-il pu imaginer, le 26 septembre, ce qui l’attendait à Zurich ?
Ce jour-là, à 20 h 20, le vol Air France à bord duquel il a pris place se pose sur le tarmac. Les passagers patientent plus longtemps que d’habitude avant l’ouverture des portes. Mais Polanski ne se doute de rien. Quand des hommes en costume montent dans le cockpit, le cinéaste pense au service VIP du festival du film zurichois, censé rendre hommage le lendemain à "l’ensemble de son œuvre". Il croit aussi que la limousine qui l’attend au pied de l’avion témoigne d’une autre marque d’attention. Les hommes en gris – en réalité des inspecteurs en civil de la Sûreté, vont vite le ramener à la réalité. Le voilà en état d’arrestation. La menace qui planait au-dessus de lui depuis trente ans s’est abattue un samedi soir, sans prévenir.
Il avait fini par vivre avec ce risque. Il savait que, pour les Américains, il était depuis 1978 un fugitif≈: envolé pour l’Europe avant la fin d’un procès où il était poursuivi pour "relations sexuelles illicites" avec une jeune fille de 13 ans. Après avoir passé 42 jours derrière les barreaux du pénitencier californien de Chino, relâché sous caution, il ne s’était jamais représenté devant le tribunal, persuadé que le magistrat devant lequel il avait plaidé coupable voulait sa peau.
Depuis, pour la justice américaine, Polanski, matricule B88742Z, était "wanted". Un mandat émis en 2005 permettait de l’arrêter n’importe quand. Polanski, la star planétaire, continuait à voyager et à se produire ; mais "B88742Z", l’ancien détenu de Chino, respectait quelques élémentaires règles de prudence.
Il y a deux ans, une jeune cinéaste américaine, Marina Zenovitch, qui réalisait un documentaire sur son affaire, avait souhaité l’interviewer≈: il avait refusé, préférant se faire oublier. Ses déplacements et ses tournages étaient toujours calqués sur la carte des accords d’extradition internationaux. Certains pays étaient proscrits. Début 2009, il avait préféré tourner "The Ghost" aux studios Babelsberg de Berlin plutôt qu’en Angleterre, où se situe pourtant l’intrigue du film.
Mais en Suisse, où il avait acheté un chalet il y a trois ans, il se croyait à l’abri. Jamais il n’aurait imaginé que des hommes en gris seraient venus le cueillir avant même sa descente d’avion. Jamais il n’aurait cru que la justice helvétique l’aurait embastillé avec ce luxe de précautions réservé d’ordinaire aux parrains de Cosa Nostra.
Le 26 septembre, de l’aéroport de Zurich, il est d’abord conduit dans un monastère, le premier de ses trois lieux de détention. Gardé au secret dans cet endroit étrange mais confortable, il est ensuite transféré dans une prison, puis une autre, près du quartier de Winterthur. Pourquoi tant de mystère sur un lieu de détention à ce jour jamais divulgué ? Imaginait-on des manifestations de soutien, ou au contraire des hordes criant au lynchage ?
Aujourd’hui, Roman Polanski est en tout cas certain d’une chose≈: ce n’est pas la justice californienne, mais l’administration helvétique qui est à l’origine de son arrestation. Un fonctionnaire a anticipé les désirs américains et prévenu Los Angeles, le 22 septembre, de l’arrivée du cinéaste franco-polonais dans la ville de la Confédération helvétique, quatre jours plus tard. "Nous voulions savoir si le mandat était toujours valable, afin d’éviter d’arrêter une personne inutilement‚ a reconnu le porte-parole de l’Office fédéral de la justice. Les autorités américaines nous ont confirmé en deux jours qu’elles étaient toujours intéressées par l’arrestation de Polanski."
Livré par la Suisse ! "Donné" par cette terre de neutralité, ce pays de cocagne où ses yeux brillants de jeune homme avaient croisé, dans les stations huppées, cette jet-set internationale qui le faisait tant rêver≈: Elizabeth Taylor, Peter Sellars, Blake Edwards…
"Attrapé" à Zurich, où l’a attendu en vain, ce funeste samedi de septembre, son copain de bringue, le photographe Otto Weisser. Il devait aller dîner avec lui au Kronnenhalle, le restaurant zurichois préféré de Polanski, puis danser dans une fête brésilienne, avant de retrouver les luxueuses suites de l’hôtel Baur au Lac. "Roman a le sentiment d’avoir été cocufié par le pays dans lequel il avait placé ses espoirs de bonheur", soupire un proche.
Entre ses quatre murs, les nouvelles qui lui viennent du dehors le laissent stupéfait. Ses avocats, Georges Kiejman et Hervé Témime, ont offert en caution libératoire le chalet de Gstaadt de leur client≈: Polanski pourrait ainsi passer les fêtes de fin d’année en famille, sous bracelet électronique.
Refus de la justice helvétique – qui n’examinera qu’en décembre le recours des conseils de l’accusé. Les autorités suisses se méfient. La très chic station de l’Oberland bernois possède un aérodrome. Et puis, par la montagne, pour le bon skieur qu’est devenu le cinéaste, la France est si proche de la frontière…
En 1977, en Californie, Polanski avait déjà passé Noël derrière les barreaux. Dans sa cellule, trente-deux ans plus tard, le Franco-Polonais continue à regarder CNN et à lire le "New York Times". Chaque jour qui passe, il déteste pourtant un peu plus les Etats-Unis. Il a lu et vu que Woody Allen, Martin Scorsese et David Lynch sont à ses côtés. Mais il a guetté en vain un mot de Jack Nicholson, dans la villa duquel, ce fameux soir de 1977, alors que la nuit tombait sur Mulholland Drive, il a couché avec la jeune Samantha Geimer, 13 ans.
Il a surtout entendu l’acteur américain Jamie Foxx, oscarisé pour son rôle dans "Ray" (Charles), déclarer que si sa fille de 15 ans avait subi le même sort que Samantha, il n’aurait pas hésité à tuer le violeur d’enfant≈: "Polanski serait porté disparu. Point final. Il n'y aurait même pas de procès."
"Tu te rends compte…", lâche-t-il horrifié ce jour-là à son ami Kiejman. Bref et rare moment de découragement.
Devant ses deux enfants, devant sa femme, l’actrice Emmanuelle Seigner, devant Alain Sarde ou Robert Benmussa, les producteurs du "Pianiste", sa palme d’or, il ne se plaint jamais. Polanski n’est pas du genre à vaciller devant témoins.
Jamais il n’évoque ces "circonstances atténuantes" que Bernard-Henri Lévy – premier soutien d’un cinéaste qui ne le connaît pourtant pas – rappelle depuis deux mois avec rage. L’enfermement≈: le ghetto de Cracovie, les barreaux de la Pologne communiste, avant ceux du pénitencier américain. La mort≈: le départ de sa mère vers Auschwitz, où elle fut gazée, enceinte, puis l’assassinat à l’été 1969 de Sharon Tate par Charles Manson et ses diaboliques épigones. L’actrice aussi est morte enceinte.
"Tu l’as vue, ma vie ?", a-t-il seulement glissé, au début de sa détention, à son avocat Hervé Témime. Il a été le premier cinéaste à faire la une de "Time", en septembre 1963, à 30 ans. Le monde entier criait au génie.
En prison, Polanski a compris qu’aujourd’hui il est seul. En trois ans, ses meilleurs amis parisiens – son scénariste Gérard Brach, Pierre-André Boutang, Claude Berri – sont morts.
Même ceux dont les enfants sont les condisciples des siens le lâchent. "J’ai beaucoup d’affection pour Roman, mais il y a une justice, c’est la même pour tout le monde", a expliqué dès l’arrestation de son confrère le cinéaste Luc Besson.
Polanski doit se rendre à l’évidence : les Français l’ont lâché. C’est en France pourtant qu’il est né, il y a soixante-seize ans. Là qu’il avait trouvé ses marques, à 28 ans, avec pour tout bagage deux costumes en velours, une paire de skis et une copie de son dernier film "polonais", "Un couteau dans l’eau". Là qu’il s’est fait naturaliser après la mort de sa femme≈: "Je me rendis compte une fois pour toutes que c’était là mon vrai foyer, raconte-t-il dans son unique biographie, “Roman par Polanski” (Robert Laffont), et l’endroit où je désirais vivre désormais." A l’époque – c’était en 1984 –, il écrivait qu’il ne referait pas sa vie. A Paris, il a pourtant épousé une actrice française et installé sa famille près de ce Plazza où il aime dîner, dans la lumière brillante des Champs-Elysées.
L’Académie française, qui l’avait reçu en 1998 sous la Coupole pour lui remettre l’habit vert et les palmes de chevalier des arts et lettres, se tait. Seul Jean-Marie Rouart a prononcé son nom. Mais pour suggérer, le 27 octobre, dans "Paris Match", de "condamner Polanski à un travail d’intérêt général, un film qui stigmatiserait les auteurs d’abus sexuels. Les tenants de la morale obtiendraient une réparation et les amoureux du cinéma y gagneraient un beau film". Un TIG ! Polanski et ses amis ont été choqués.
Pour un réalisateur – Yan Kounen – qui, dès l’arrestation de Polanski, exige le retrait de la programmation du festival de Zurich de son film "Coco Chanel et Igor Stravinsky", afin de "dénoncer le piège d’un autre temps", combien d’artistes silencieux ?
Rattrapé par sa "Mauvaise Vie", Frédéric Mitterrand, d’abord choqué par une arrestation "épouvantable et complètement injuste", dit aujourd’hui avoir réagi "sous le coup de l’émotion". Inutile de froisser les électeurs et les blogeurs déchaînés.
Quatre cents "fans" se sont "désinscrits" du Facebook de BHL depuis qu’il a pris fait et cause pour le cinéaste franco-polonais – du jamais vu. Et, pour avoir plaidé la défense de Polanski, le 22 octobre, Bernard Langlois, fondateur de "Politis", l’hebdomadaire de la gauche radicale, a reçu une "mer de messages" si virulents qu’il a été "sommé de s’expliquer", la semaine suivante, par ses lecteurs… Bien téméraire, aujourd’hui, l’élu qui se risquerait à prendre fait et cause pour l’artiste maudit.
Finie l’époque où le cinéaste pouvait confesser, comme en 1984 dans son autobiographie, son penchant pour les filles très jeunes. Ni la Toile, ni la gauche française, ni Daniel Cohn-Bendit, ni la justice suisse, ni surtout les juges californiens ne veulent comprendre les arguments de Polanski.
C’est le dernier paradoxe de l’"affaire"≈: les soutiens du cinéaste sont rares, mais lui nuisent de toute façon. "Roman a autour de son cou comme un nœud coulant", a expliqué Me Kiejman, le 5 novembre, devant le – maigre – parterre réuni au cinéma le Panthéon, au cœur du quartier Latin, autour de Marina Zenovich. "Plus on parle, plus la corde se resserre." Emue, la réalisatrice américaine, qui sait que son enquête n’est peut-être pas étrangère à l’arrestation du Franco-Polonais, a glissé un mot, ce soir-là, à l’oreille du ténor du barreau≈: "Pardon…"
"Stay out !", ont écrit les avocats américains à leurs homologues français, dès l’arrestation de leur client. "Restez à l’écart !" Georges Kiejman a dû user de toute sa diplomatie pour convaincre le ministre des Affaires étrangères, Bernard Kouchner, de ne pas rendre visite au prisonnier suisse Polanski.
Barack Obama a fait comprendre à Nicolas Sarkozy que la justice californienne était souveraine. Et lorsque, le 16 octobre, le président français a estimé dans "le Figaro" que "se prononcer trente-deux ans après les faits alors que l’accusé a aujourd’hui 76 ans" ne témoignait "pas d’une bonne administration de la justice", une vague de panique a gagné les conseils américains du cinéaste franco-polonais. "Stay out", s’il vous plaît !
"Je n’ai plus foi que dans l’absurde", dit souvent Polanski depuis l’assassinat de sa première femme. Il a été arrêté alors qu’il se rendait à un festival, financé par la Confédération helvétique, qui avait programmé une rétrospective en sept parties de son œuvre monumentale. A l’aéroport, Karl Spoerri, l’un des deux organisateurs de l’événement, tenait prêt dans sa poche son discours du lendemain et en répétait la chute : "Nous sommes si fiers de le recevoir≈: mesdames et messieurs, je vous demande d’accueillir avec enthousiasme ce géant du cinéma européen !"
Géant ? Vraiment ? "Je sais que je passe aux yeux de bien des gens pour une espèce de gnome méchant et débauché", écrivait Polanski il y a quinze ans. Un détail, récemment, l’a miné. Trois chiffres, posés par l’administration sur la demande d'arrestation provisoire.
A la ligne "taille", une main a inscrit : "1 mètre 40." Le cinéaste s’est toujours moqué de sa petite stature. Dans "Chinatown", truand sadique, il tranchait de la lame de son couteau la narine d’un Jack Nicholson qui le traitait de "midget" – "nabot".
Mais quand, du fond de sa geôle, il a découvert qu’on l’avait ainsi rétréci – de 20 centimètres au moins –, cet homme qui ne déteste rien tant que de se retourner sur la tragédie de sa vie ou quémander la sympathie a soupiré : "C’est quand même toujours la même histoire, non ?"
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Bridget
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Sujet: Re: ROMAN POLANSKI ARRETE EN SUISSE Sam 28 Nov - 21:06
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Au nom du droit
Le plus déplorable dans le réquisitoire des procureurs médiatiques de Roman Polanski, c'est qu'ils ne respectent ni les faits ni les lois.
Le 24 mars 1977, après avoir entendu les dépositions des témoins, y compris de la victime, Samantha Geiner, le grand jury du comté de Los Angeles signifiait à Roman Polanski que six charges étaient retenues, dont le crime de viol avec usage de drogue.
Conformément à la procédure américaine, le juge invitait alors l'avocat de Samantha Geimer, celui de Polanski et le procureur à rechercher les termes d'un accord (plea-bargain).
Cinq mois plus tard, c'était chose faite. Cinq des six chefs d'accusation, dont le viol, étaient écartés. Seules étaient retenues les « relations sexuelles illégales avec un mineur ».
Polanski acceptait de plaider coupable. Et les parties convenaient que la sanction serait fixée lors d'une audience de justice sur la base des recommandations de l'administration en charge de la liberté surveillée, le Département de Probation.
La plaignante et l'Etat ont donc renoncé à l'accusation de viol.
Parce que Polanski avait acheté le silence de Samantha par une indemnisation substantielle ? Il y a bien eu une transaction entre eux : le pardon contre une somme de 500 000 dollars. Mais elle est postérieure de... seize ans (1993) aux accords de 1977. Et le procureur, lui, pourquoi a-t-il renoncé à l'accusation de viol ? En réalité, si la plaignante et le ministère public ont abandonné ces chefs d'accusation, c'est bien sûr pour s'épargner le long chemin de croix public d'un procès. Mais c'est aussi parce qu'ils estimaient ne pas disposer d'un dossier assez solide pour l'emporter devant la cour.
Roman Polanski fut donc examiné par les experts du Département de Probation en septembre 1977. Alors même que l'infraction était passible d'une peine maximale de 50 ans, ils recommandèrent, après une analyse approfondie des faits et l'évaluation du prévenu, non l'emprisonnement mais une lourde amende assortie d'une simple mise à l'épreuve. C'est une indication très forte de leur appréciation de la gravité des faits dans un climat pourtant d'hystérie médiatique contre Polanski. Le juge demanda une deuxième expertise, psychiatrique cette fois, et, à cet effet, l'emprisonnement pour 90 jours de Polanski. Au bout de 42 jours, les psychiatres le libérèrent. Ils rendirent leur avis le 25 janvier 1978 : ils ne préconisaient aucune mesure d'incarcération ni aucune sanction pouvant inhiber l'activité professionnelle ou artistique du cinéaste.
Pourtant, sous la pression de l'opinion, et s'écartant à la fois de l'accord des parties et des recommandations des différents experts, le juge menaça de prononcer une peine de prison. Polanski décida alors de fuir les Etats-Unis. Quelques mois plus tard, le juge était dessaisi du dossier tant son comportement était apparu irrégulier.
La sanction pénale vise, en théorie, à réparer le tort fait à la victime et à protéger la société contre la dangerosité de l'accusé. Dans le cas d'espèce, la victime a demandé en 1977 que Polanski ne soit pas emprisonné. En 1993, elle lui a accordé son pardon. En 2001, à la télévision, elle a souhaité l'abandon des poursuites. En 2007, elle en a fait la requête officielle auprès des autorités judiciaires. Quant à la dangerosité de Polanski, dès 1977 les experts de la liberté surveillée et les psychiatres l'ont jugée inexistante : la conduite du cinéaste depuis trente ans prouve qu'ils ne s'étaient pas trompés.
Qui ne condamnerait, bien sûr, sur le plan moral, le fait pour un adulte de coucher avec une mineure après avoir pris avec elle de l'alcool et de la drogue ? Et sur le plan du droit, même s'il y a consentement de la victime, autrement dit même s'il n'y a pas de viol, cela n'en constitue pas moins une infraction punie par les textes. Polanski l'a d'ailleurs reconnu en plaidant coupable.
Il n'a pas à être au-dessus des lois. Mais il n'a pas non plus à être privé des droits d'un citoyen ordinaire. Il a fait quarante jours de prison alors qu'une double expertise judiciaire recommandait qu'il n'en fît aucun. Il a vécu en exil plus de trente ans. S'il n'avait pas cette notoriété sulfureuse, il y a longtemps qu'on aurait mis un terme à une poursuite que ne justifie plus ni le désir de rendre justice à la victime ni celui de protéger la société.
La responsabilité des intellectuels est de faire triompher la raison sur la passion et d'éclairer l'opinion d'une manière objective et nuancée. Pas d'attiser une colère injuste, de manière violente et infondée.
Le Blog de Denis Olivennes
(Edito publié dans le Nouvel Observateur du 26 novembre)
Dernière édition par Bridget le Lun 13 Sep - 0:51, édité 1 fois
Bridget
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Sujet: Re: ROMAN POLANSKI ARRETE EN SUISSE Dim 29 Nov - 21:36
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Roman Polanski quittera sa cellule pour un enfer doré
Le réalisateur franco-polonais quittera probablement cette semaine sa cellule de Winterthour pour son luxueux chalet de Gstaad. Mais sa nouvelle prison pourrait être pire que l'ancienne.
ASSIGNATION À RÉSIDENCE
Il sera en permanence épié par les paparazzi, et des équipes TV du monde entier retransmettront en direct la moindre de ses sorties. Impossible d'arroser en paix ses plantes aromatiques
On sait maintenant comment va se dérouler l'assignation à résidence de Roman Polanski, qui débutera probablement cette semaine. L'Office fédéral de la justice, qui est chargé de son application, a accordé au réalisateur franco-polonais le régime le plus souple possible. Il est simplement contraint de ne pas quitter sa propriété de Gstaad.
«M.Polanski n'est pas soumis à un régime de détention et peut organiser ses journées tout à fait librement», a déclaré à la SonntagsZeitung Folco Galli, porte-parole de l'Office fédéral de la justice (OFJ).
Les autorités ont en effet décidé que le célèbre cinéaste pouvait «recevoir dans sa maison toutes les personnes qu'il souhaite et les héberger comme il veut». Ses contacts avec l'extérieur ne sont pas limités non plus: «Il peut téléphoner sans aucune limitation et correspondre par e-mail avec qui il entend.» La façon dont l'homme de 76 ans souhaite organiser les repas et les autres tâches ménagères n'a aucune importance pour l'OFJ: «Nous laissons tout cela à M.Polanski.»
Des paparazzi partout
Lorsque le détenu le plus célèbre de Suisse quittera la prison de Winterthour pour passer à l'assignation à résidence à Gstaad, sa situation ne sera pas forcément plus confortable. Malgré toutes les libertés qui lui sont accordées. Depuis des jours en effet, des équipes de télévision et des photographes occupent les alentours du chalet Milky Way, sur l'Alpenblickstrasse. Les cars de retransmission satellite sont prêts à diffuser en direct et dans le monde entier les images du cinéaste. Aussitôt que le réalisateur pointera le nez dehors, il sera sous surveillance publique. Et, puisque les arbres et les arbustes sont encore jeunes, ils ne protégeront pas Roman Polanski s'il lui vient à l'idée de vider sa boîte aux lettres, d'arroser son jardin de plantes aromatiques ou s'il s'assied à la table en bois devant la maison. Les visiteurs du cinéaste n'auront pas vraiment la possibilité d'échapper à cette curiosité. Pour Roman Polanski, son assignation à résidence a toutes les chances de virer à la torture psychologique.
Dans une interview accordée à la SonntagsZeitung il y a onze ans, le réalisateur n'avait qu'un mot à l'esprit pour qualifier les journalistes: «Affreux.»
Depuis sa cellule de Winterthour, Roman Polanski tente donc de se protéger contre le grand ramdam autour de sa détention à domicile. Hier, une société jurassienne spécialisée dans la vidéosurveillance s'est mise au travail autour de son chalet. L'entreprise a visiblement le mandat de sécuriser la parcelle de terrain.
Aldo Kropf, président de Saanen-Gstaad, n'a pas exclu hier que la commune intervienne «si les représentants des médias devenaient trop encombrants et que les habitants se sentaient importunés». Il examine du reste la possibilité de barrer l'accès de la route privée qui mène au quartier d'Alpenblick en cas de nécessité.
Une nouvelle vie pourrie par de fausses alarmes
Dans son chalet fraîchement rénové par son ami architecte d'intérieur Fabrizio Frisardi, Roman Polanski devra aussi s'habituer aux caprices techniques de son bracelet électronique. Aussitôt qu'il quittera son terrain de 1800 m2, le système installé par la société Securiton déclenchera une alarme auprès de la police. L'expérience a montré que de fausses alarmes sont fréquemment causées par les champs électromagnétiques créés par les appareils électroménagers, les baignoires, etc. Un orage particulièrement violent peut aussi déclencher une fausse alerte. Voilà pourquoi Roman Polanski, même dans sa cage dorée de Gstaad, continuera certainement à être dérangé par la police.
Dernière édition par Bridget le Lun 13 Sep - 0:53, édité 1 fois
Bridget
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Sujet: Re: ROMAN POLANSKI ARRETE EN SUISSE Mer 2 Déc - 18:54
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Polanski sera transféré vendredi dans son chalet de Gstaad
Le réalisateur Roman Polanski, détenu à la prison de Winterthour – située à environ 25 km au nord-est de Zurich–, sera libéré vendredi 4 décembre et transféré dans son chalet de Gstaad, a annoncé, mercredi 2 décembre, le porte-parole du ministère suisse de la justice, Folco Galli.
Une caution de 4,5 millions de francs suisses (3 millions d'euros) doit être versée pour que le réalisateur puisse sortir de prison, avait rappelé lundi le consul général de France à Zurich, Jean-Luc Fauré-Tournaire. Cette somme est garantie par l'appartement parisien de l'avenue Montaigne que possède M. Polanski, avait stipulé le tribunal pénal fédéral de Bellinzone dans son arrêt.
La justice suisse a autorisé la libération sous caution de Roman Polanski, qui sera assigné à résidence. La surveillance électronique est en train d'être préparée, mais le bracelet chargé de contrôler les mouvements du cinéaste ne sera posé qu'une fois que ce dernier sera arrivé à son domicile suisse, a précisé M. Galli.
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Sujet: Re: ROMAN POLANSKI ARRETE EN SUISSE Sam 12 Déc - 12:37
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Pour Roman Polanski, un recours difficile sans retour aux Etats-Unis
Le sort juridique de Roman Polanski a été minutieusement débattu en son absence, jeudi 10 décembre, à Los Angeles, devant la cour d'appel du deuxième district de Californie qui entend la demande de classement définitif de la plainte pour relations sexuelles avec une mineure de treize ans, datant de 1977. Cette requête, initiée par le cinéaste, qui estime n'avoir pas bénéficié d'une procédure équitable à l'époque des faits, a été déposée par ses avocats américains le 2 décembre 2008 et plaidée le 21 janvier 2009 devant le juge Peter Espinoza, bien avant l'arrestation de Polanski, le 26 septembre à Zurich (Suisse), son incarcération et sa remise en liberté surveillée dans son chalet de Gstaad.
Roman Polanski a fui le territoire américain à la veille de l'audience du 1er février 1978, qui devait déterminer sa sentence. A l'époque, les défenseurs de Polanski et le procureur ont conclu un plea bargain ("accord amiable"), ramenant les six chefs d'inculpation initiaux - qui incluaient, entre autres, la fourniture de drogue et d'alcool à une mineure, le viol avec usage de drogue, et la sodomie - à la seule charge de relations sexuelles illégales avec une mineure.
A l'audience du 7 mai, le juge Peter Espinoza a refusé de statuer sur la demande de classement en l'absence du cinéaste, et ses avocats ont fait appel de la décision.
Le 10 décembre, il n'y a pas foule dans le prétoire, où on reconnaît Linda Deutsch, la chroniqueuse judiciaire de l'agence Associated Press, qui suit l'affaire depuis trente-deux ans ; Marina Zenovich, la réalisatrice du documentaire Polanski : Wanted and Desired, dont les révélations ont rouvert le dossier ; Jeff Berg, agent du cinéaste et patron d'International Creative Management (ICM) ; et le consul de France à Los Angeles David Martinon.
Le panel de trois juges, présidé par Dennis Perluss, assisté de Fred Woods et de Laurie Zelon, dispose d'un délai de 90 jours pour rendre sa décision écrite, qui pourrait donc intervenir avant l'extradition.
Toute l'équipe de défense américaine de Roman Polanski est là, Douglas et Bart Dalton, et c'est Chad Hummel qui s'exprime, avec force et conviction : "Nous demandons le classement dans l'intérêt de la justice. Ce que le juge Rittenband a fait est effrayant, et l'importance des manquements à l'éthique n'était pas connue à l'époque. Monsieur Polanski a fui l'absence de justice."
Lawrence Silver, l'avocat de la victime, a dix minutes pour soutenir la requête des défenseurs du cinéaste, et demande à la cour de respecter les souhaits de sa cliente et d'abandonner les poursuites, sans attendre l'extradition. Il s'appuie sur un amendement à la Constitution californienne (la proposition 9, votée en 2008), destiné à écouter et à intégrer les voix des victimes et de leurs familles dans le processus judiciaire. Samantha Geimer (qui a porté plainte au civil contre M. Polanski et reçu une compensation financière) se dit harcelée par les médias depuis que cette affaire est revenue dans l'actualité, et insiste pour demander un classement définitif.
Mais pour le bureau du procureur de Los Angeles, représenté par Phyllis Asayama, "Monsieur Polanski doit comparaître" : sa relaxe in absentia créerait un précédent inacceptable, "le message que, pour un accusé, fuir est une option". La doctrine du "fugitive disentitlement" (qui prive tout fugitif d'un recours sans retour) a été au coeur des débats, et l'objet de questions attentives des juges : Roman Polanski peut-il déposer un appel devant une justice qu'il a fuie ?
Il est tentant de lire dans les questions des juges des indications sur leurs inclinations. "Pourquoi le procureur n'a-t-il pas enquêté sur les allégations récentes de vices de procédure, n'est-ce pas dans votre intérêt ?", a demandé la juge Laurie Zelon à Mme Asayama, qui n'a pas vraiment répondu. Le président Dennis Perluss, reconnaissant les manquements à l'éthique du juge Lawrence Rittenband, aujourd'hui défunt, a demandé à la substitut si "le procureur ne devait pas veiller à ce que la justice soit rendue".
La décision de la cour d'appel californienne ne devrait pas interférer avec la procédure d'extradition en cours en Suisse, sauf si les trois juges acceptent de classer définitivement la plainte en l'absence du prévenu... Mais pour Roman Polanski, l'option du recours sans retour semble improbable.
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Sujet: Re: ROMAN POLANSKI ARRETE EN SUISSE Mer 16 Déc - 11:54
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Polanski: Berne décidera début janvier sur la demande d'extradition des USA
a Suisse rendra sa décision "au début de l'année prochaine" sur la demande d'extradition des Etats-Unis du cinéaste Roman Polanski, assigné à résidence à Gstaad après deux mois passés en prison pour une affaire de moeurs vieille de 30 ans, a indiqué mercredi Berne.
"La décision sur l'extradition de Roman Polanski sera rendue au début de l'année prochaine", a expliqué à l'AFP le porte-parole de l'Office fédéral de la Justice (ministère), Folco Galli.
"La demande d'extradition des Etats-Unis est très détaillée, de même que les remarques des avocats (du réalisateur), et cela prend du temps à examiner", a précisé M. Galli.
Le réalisateur franco-polonais, arrêté le 26 septembre à son arrivée à Zurich sur mandat américain, a été libéré le 4 décembre sous caution et assigné à résidence dans son chalet de la station huppé des Alpes suisses.
Roman Polanski a été autorisé à y attendre son éventuelle extradition réclamée par les Etats-Unis où la justice le recherche pour des "relations sexuelles illégales" avec une mineure de 13 ans en 1977.
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Sujet: Re: ROMAN POLANSKI ARRETE EN SUISSE Sam 19 Déc - 17:52
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24 HEURES DANS LA VIE DE ROMAN POLANSKI – LE POINT 18/12/2009
LE BLOC-NOTES DE BERNARD-HENRI LÉVY
Sur les moments passés avec Roman Polanski, la semaine dernière, dans son chalet, en Suisse, je n’ai évidemment, et par principe, rien à dire. Mais puisque la presse ne s’est pas privée de commenter ma visite et, même quand je ne parlais pas, de faire comme si je parlais quand même, je voudrais profiter de la circonstance pour faire deux ou trois mises au point.
1. Roman Polanski est libre, si l’on veut. Il est chez lui, entouré des siens, autorisé à voir ses amis ou ses défenseurs, et, donc, on peut dire, en effet, qu’il est libre. Mais je rappelle que rien n’est, pour autant, réglé quant aux procédures ubuesques qui ont été ressuscitées ou engagées contre lui. Je maintiens, même si cela a choqué et choque encore, que cette affaire de bracelet électronique – qu’il porte, d’ailleurs, à la cheville – est une humiliation doublée d’une infamie. Et, surtout, surtout, quelle est la liberté d’un homme qui ne peut mettre un pied sur le seuil de sa porte, le nez à sa fenêtre, qui ne peut entrouvrir un volet ou un rideau, qui ne peut vivre, avec ses enfants, que dans l’obscurité, parce qu’une escouade de photographes l’épient, guettent le moindre signe de vie, sont postés sur une butte ou derrière un fourré, d’où ils auront, pensent-ils, un meilleur angle de tir ?
Prisonnier de ses geôliers et, maintenant, de la société du Spectacle. Harcelé par la meute comme peu de nos contemporains l’auront été. Il faut que cela cesse. Il faut que Roman Polanski, et le monde, se réveillent de ce cauchemar. Et il faut que la Suisse, déjà, comprenne, entende, se ressaisisse : un pays où un condamné à perpétuité est souvent libre au bout de quinze ans ne peut pas traquer un homme, puis l’enfermer, puis le persécuter, puis l’humilier, pour un détournement de mineur commis il y a trente-deux ans.
2. A propos de la Suisse, justement, situation plus contrastée que je ne l’imaginais depuis Paris ou New York. Et, sans entrer dans le détail, étrange ambivalence de ce pays qui a tendu ce piège à Polanski, abusé de sa confiance, trahi sa propre parole – mais qui, en même temps, six semaines et quelque plus tard, commence de se rendre compte, je crois, de l’absurdité de la situation.
Roman Polanski reçoit, chaque jour, des paquets de lettres de soutien émanant de simples citoyens. Roman Polanski voit arriver, à chaque instant ou presque, de la part de ses voisins plus ou moins immédiats, mille témoignages concrets de solidarité, de compassion, de regrets, d’excuses. Roman Polanski, dans la presse de Genève et de Zurich, n’est plus tout à fait traité comme ce pestiféré, ce paria, ce gibier de chasse à l’homme, ce criminel contre l’humanité, qu’il était, dans les premiers jours, en Suisse comme aux Etats-Unis et en France – et nombreux sont les journalistes, les éditorialistes, les commentateurs, qui finissent par trouver étrange qu’un homme qui était chez lui dans leur pays, qui y passait tous ses hivers depuis des décennies, toutes les vacances scolaires ensuite, ait pu, du jour au lendemain, être traité comme un terroriste ou un bandit.
Les juges suisses – qui vont avoir à se prononcer sur la validité de la demande d’extradition – entendront-ils ce que commence de murmurer l’Opinion ? L’Office fédéral de Berne – qui a fomenté, ce fameux et maudit 27 septembre, l’hallucinant traquenard – prendra-t-il conscience de l’erreur qu’il a commise, du déshonneur durable qu’il s’est attaché, de l’insulte qu’il a faite à sa propre tradition d’accueil et de refuge ? C’est toute la question. Ce serait la voie de la sagesse et de la raison. Mais, bizarrement, j’ai espoir. Je ne sais pas pourquoi, mais j’ai espoir.
3. Et puis, sur Roman Polanski lui-même, je tiens à dire au moins une chose. Une seule. Mais qui m’a tellement sidéré, impressionné, bouleversé, que je m’en voudrais de ne pas la faire partager. Roman Polanski, pendant ce temps, travaille. Roman Polanski passe ses jours, ses nuits, encore ses jours, encore ses nuits, à tenter de finir son film et, je crois, à le finir. Roman Polanski, aussi extraordinaire que cela soit, paraît moins soucieux de ce bal d’incubes, succubes, tarentules et autres vampires qui s’affairent autour de lui et tentent de le briser que de ces autres personnages qui peuplent son cerveau d’artiste et habiteront un film qui, comme on sait, s’appellera « Ghost » alors qu’ils sont pour lui, j’en jurerais, bien moins fantomatiques, bien plus vivants, que les spectres et les morts-vivants qui le harcèlent dans la vraie vie. Peut-on achever un film ainsi ?
Etalonner ses couleurs à distance ? Couper une image, une demi-seconde de son, au téléphone ? Peut-on, sans y être, du fond de ce qui reste une prison, retravailler un ciel, recadrer un sourire ou un mouvement, récrire une émotion ? Peut-on matérialiser une œuvre par la pensée, l’imagination, l’Idée ? Oui, quand on est Polanski. Oui, quand on est cet intraitable, cet indomptable qu’est, aujourd’hui comme hier, Roman Polanski.
Oui, quand on a traversé tous les cercles de l’enfer, qu’on est passé par toutes les sortes d’épreuves que le destin peut infliger à un homme – et qu’on est resté Roman Polanski. Ce film, s’il est le grand film que je pressens, ce sera la preuve par Polanski. Ce sera le théorème de Polanski. Ce sera – nouveaux « Mémoires dans un souterrain » – la leçon de courage, et de vérité, de Roman Polanski.
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Sujet: Re: ROMAN POLANSKI ARRETE EN SUISSE Mar 22 Déc - 12:21
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Les poursuites contre Roman Polanski maintenues
Le cinéaste Roman Polanski est assigné à résidence dans son chalet suisse de Gstaad depuis le 4 décembre dernier.
La justice américaine a rejeté l'argument du cinéaste, qui estime ne pas avoir bénéficié d'une procédure équitable en 1977, lorsqu'il a été accusé dans une affaire de moeurs.
Le cinéaste Roman Polanski devrait passer encore quelque temps dans son chalet suisse de Gstaad, où il est assigné à résidence depuis le 4 décembre dernier. La justice américaine a refusé lundi d'abandonner les poursuites lancées contre le réalisateur franco-polonais pour une affaire de détournement de mineure remontant à 1977. En revanche, les juges de la cour d'appel du 2e district de Californie ont demandé une «enquête rapide» sur les accusations formulées par le cinéaste à l'encontre du juge chargé du dossier à l'époque.
Polanski, qui estime ne pas avoir bénéficié d'une procédure équitable à l'époque des faits, avait déjà demandé une première fois, en décembre 2008 , l'abandon des charges engagées contre lui. En vain. Comme en 2008, il s'appuie aujourd'hui en partie sur le documentaire de Marina Zenovich «Roman Polanski: wanted and desired» qui fait état d'arrangements entre le procureur et le juge chargés de l'affaire. Si le procureur y reconnaît notamment avoir interféré dans le dossier, il s'est depuis retracté. Le juge est, quant à lui, décédé.
Lundi, les magistrats californiens ont donc rejeté l'argument de Polanski. Ils estiment «que le fait que du temps s'écoule encore avant la résolution finale de cette affaire va gêner davantage la recherche de la vérité» et «prolonger la souffrance (...) de Samantha Geimer», la victime, âgée de treize ans à l'époque des faits.
Cependant, «les accusations portées par M. Polanski nécessitent une enquête rapide et complète et ensuite, si besoin est, toutes les actions nécessaires en réparation des préjudices éventuellement subis. Nous appelons toutes les parties prenantes à ce drame interminable à mettre l'intégrité du système judiciaire au-dessus de leur désir de sanction, que ce soit pour son délit ou pour sa fuite», poursuit le jugement.
Roman Polanski, aujourd'hui âgé de 76 ans, attend la décision de la Suisse sur son extradition vers les Etats-Unis, qui devrait intervenir début janvier.
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Sujet: Re: ROMAN POLANSKI ARRETE EN SUISSE Mar 22 Déc - 13:53
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Bernard-Henri Lévy: «Si j’étais Suisse, je ferais un bras d’honneur à la justice américaine»
L’intellectuel français Bernard-Henri Lévy a rendu récemment visite à Roman Polanski à Gstaad. BHL appelle la Confédération à «résister» à la demande d’extradition des Etats-Unis
Antoine Menusier - le 19 décembre 2009, 22h38 Le Matin Dimanche
Il y a une douzaine de jours, Bernard-Henri Lévy a rendu une visite amicale à Roman Polanski dans son chalet de Gstaad. Dans la présente interview qu’il a accordée au «Matin Dimanche», BHL décrit l’état d’esprit du plus célèbre assigné à résidence de Suisse et la relation de ce dernier, emprunte d’«embarras et de gentillesse», avec ses geôliers de la prison de Winterthour. Il affirme qu’une extradition de Roman Polanski «serait une entorse gravissime aux valeurs fondatrices de la Suisse».
Quand avez-vous rendu visite à Roman Polanski? Il y a une dizaine de jours. Dîner amical. Bonnes et longues conversations. Et retour en France le lendemain matin.
Dans quel état l’avez-vous trouvé?
Un roc. Au travail. Confiant, il me semble. Quoique se faisant beaucoup de soucis pour les siens, ses enfants, sa femme.
Roman Polanski travaille à un film, écrivez-vous dans votre dernière chronique parue dans l’hebdomadaire Le Point… Oui. C’est même très impressionnant. Il est en train de terminer, à distance, le montage de son prochain film qui sera, d’après ce que j’ai compris, dans la sélection officielle du prochain Festival de Berlin.
Dans son chalet, vit-il seul ou entouré?
Ce que je peux vous dire c’est que le téléphone n’arrête pas de sonner, les messages de soutien affluent – en particulier d’amis suisses. Il m’a, d’ailleurs, dit une chose que je n’ai pas écrite mais que je vous rapporte bien volontiers: durant les 50 jours de cauchemar qu’il a vécus dans la prison de Winterthour, il a été frappé par l’extraordinaire embarras, et donc la gentillesse, des fonctionnaires suisses, du haut en bas de l’échelle, auxquels il a eu affaire. Ces gens ont fait leur métier, naturellement. Ils ont été bien obligés de le faire. Mais ils semblaient – c’est ainsi, en tout cas, que Roman Polanski, non sans humour, l’a ressenti – presque aussi navrés que lui par la situation dans laquelle il se trouvait!
Dans le Point, toujours, vous décrivez la situation de Roman Polanski, enfermé dans son chalet, bracelet électronique à la cheville, comme humiliante. En quoi est-elle humiliante?
C’est au-delà de l’humiliant. Ce déchaînement autour de lui est incompréhensible et honteux.
Honteux? Pourquoi?
Ce qui est honteux, c’est, dans des pays comme la Suisse ou la France où vous pouvez assassiner votre voisin et voir votre crime prescrit au bout de 15 ou 20 ans, de mettre un homme en prison pour un détournement de mineure commis il y a trente-deux ans. Il y a là une absurdité. Et cette absurdité, s’appliquant à un père de famille de 76 ans dont chacun sait qu’il n’est pas un pédophile, devient une infamie.
De nombreuses personnes ne retiennent pas la notion de détournement de mineure. Pour eux, il y a eu viol, et cette affaire, estiment-ils, doit se terminer devant un tribunal. Les «citoyens suisses et français», fussent-ils «nombreux», ne sont pas, que je sache, juges d’instruction. Le fait est, si vous voulez être précis, que Roman Polanski a été inculpé et jugé, il y a trente-deux ans, non pas pour viol, mais pour détournement de mineure. C’est ça, la réalité. Et c’est d’ailleurs, en partie, pour cette raison que la victime a pardonné et qu’elle supplie, aujourd’hui, qu’on veuille bien tourner la page. C’est incroyable comme tous ces procureurs du dimanche, qui prétendent «défendre la victime», se fichent de ce qu’elle ressent et de ce qu’elle peut avoir à nous dire!
Qu’attendez-vous des autorités suisses?
J’attends des autorités suisses – et je suis d’ailleurs convaincu que c’est ce langage de la raison qu’elles finiront par entendre – qu’elles soient cohérentes avec elles-mêmes. Voilà un homme qui aime ce pays, qui y venait chaque hiver depuis trente ans, qui y a été accueilli à bras ouverts quand, il y a quelques années, il y a acquis un chalet. Alors, on ne peut pas, du jour au lendemain, changer les règles du jeu. La Suisse, autrement dit, doit résister à la demande d’extradition américaine.
Au nom de quoi?
Au nom du fait qu’elle était – légitimement – fière que Roman Polanski l’ait choisie pour y résider. Au nom du fait qu’elle l’a – comme il se devait – accueilli. Et au nom du fait qu’on ne peut pas, tout à coup, sans raison, changer d’attitude et décider que l’homme qu’on a reçu avec joie et fierté, sans jamais se poser l’ombre d’une question, est un dangereux criminel à qui on tend un traquenard.
Avez-vous rencontré des fonctionnaires de l’Office fédéral de la justice pour leur faire part de vos arguments?
Je ne peux pas répondre à cette question. Mais je sais qu’il y a, aujourd’hui, dans les instances gouvernementales et judiciaires suisses, un grand nombre d’hommes et de femmes qui sentent bien qu’il y a là une situation qui n’est pas normale; qui savent que, si cette affaire Roman Polanski allait jusqu’à l’extradition, ce serait un tournant dans l’histoire de la Suisse, un désaveu de ses valeurs fondatrices, une entorse gravissime aux traditions d’hospitalité et d’accueil qui sont l’honneur de ce pays. Combien d’écrivains, d’exilés politiques, de proscrits, ont, au fil des trois derniers siècles, trouvé refuge en Suisse! On tirerait donc un trait sur tout cela? Et on le ferait avec un homme qui, non seulement n’est pas un «proscrit», mais n’a, depuis trente ans, commis aucune espèce de délit? Je vous le répète: tout cela est insensé.
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Sujet: Re: ROMAN POLANSKI ARRETE EN SUISSE Sam 23 Jan - 14:37
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Roman Polanski ne sera pas jugé par contumace
La justice américaine a rejeté vendredi la demande du réalisateur franco-polonais d'être dispensé d'assister à son procès. Si la Suisse valide l'extradition, il comparaîtra à Los Angeles.
Roman Polanski peut dépoussiérer ses valises. Dans quelques semaines, il pourrait quitter la Suisse et son confortable chalet de Gstaad, où il est assigné à résidence au moyen d'un bracelet électronique, pour rejoindre le tribunal de Los Angeles.
Le réalisateur franco-polonais devrait y être jugé pour avoir eu, en 1977, des «relations sexuelles illégales» avec une mineure, alors âgée de 13 ans. vendredi, le magistrat en charge du dossier a mis fin au suspense juridique en refusant la demande de contumace formulée par les avocats américains du prévenu.
Cette décision va dans le sens du ministère public, qui réclamait le retour de Roman Polanski, aujourd'hui âgé de 76 ans, sur le territoire américain. Dans des documents officiels, David Walgren, procureur adjoint du comté de Los Angeles, considérait que l'absence du cinéaste au procès «serait absolument déplacée» , dans la mesure où c'est un «fugitif», condamné «pour le viol d'une enfant».
Les avocats de Roman Polanski avaient pourtant longuement plaidé l'inverse. Chad Hummel et Bart Dalton affirmaient qu'il y avait «de nombreuses et de fortes raisons» de rendre un jugement en l'absence de l'accusé. Dans une partie de leur argumentation, ils notaient que «la politique semble interférer avec l'administration équitable de la justice».
Harriet Ryan, journaliste au Los Angeles Times et spécialiste du sujet, précise que le procureur général du comté de Los Angeles occupe «un poste électif et envisage de se présenter au poste de ministre de la Justice de l'État de Californie». Dans un entretien avec le journal en ligne Swissinfo, elle ajoute qu'il est impossible de dire si «l'affaire Polanski sera un thème de campagne».
Politique ou non, le juge a tranché. Reste que la Suisse doit encore accepter la demande d'extradition émise par le bureau du procureur adjoint du comté de Los Angeles.
L'Office fédéral de la justice, qui doit répondre à cette demande, n'a pas souhaité faire de commentaires ; de même que Lorenz Erni, qui défend Roman Polanski au sein de la Confédération helvétique. «Mais je vois mal comment la Suisse pourrait refuser l'extradition de Roman Polanski, commente Adrien Gutowski, avocat à Lausanne. La peine n'est pas prescrite et les faits sont condamnables dans les deux pays. D'après moi, Berne devrait entrer en matière assez rapidement.»
Les hésitations des autorités suisses ont certainement à voir avec le tour médiatique qu'a pris cette affaire. En arrêtant le cinéaste dans le cadre d'un mandat d'arrêt américain, le 26 septembre dernier, la Confédération helvétique a fait l'objet de violentes critiques de la part de nombreuses personnalités culturelles et politiques, parmi lesquelles le ministre de la Culture français en personne, Frédéric Mitterrand. Le zèle de Berne est d'autant plus étonnant que, depuis plusieurs mois, la présumée victime du viol, Samantha Geimer, affirme qu'elle a «pardonné» à Roman Polanski. Récemment, elle a affirmé soutenir la demande de contumace. Son avocate, Lawrence Silver, a même fait valoir que le parquet n'avait pas prévenu sa cliente avant de demander l'extradition du cinéaste, ce qui constituerait une «violation» de la Constitution de l'État de Californie.
Au-delà de ce déficit d'image, le pays souffre d'importantes difficultés avec les États-Unis, notamment vis-à-vis de la banque UBS et de l'échange des données bancaires.
Dans ce contexte tendu, la Suisse pourrait vouloir contenter Washington en validant l'extradition de Roman Polanski. Si c'est le cas, comme les experts le supposent, Roman Polanski devrait rapidement quitter Gstaad. Trente ans après les faits, l'homme retournera sur ses pas pour affronter son passé. Il risque plusieurs années de prison.