Le musicien d’origine bulgare est décédé dimanche à Lugano.
Il était de cette génération d’interprètes voués à rendre la musique plus grande que nature.
Herbert von Karajan, Carlo Maria Giulini, Leonard Bernstein, voilà quelques-uns des chefs avec qui Alexis Weissenberg a partagé son art d’un piano monumental. Une puissance technique foudroyante, d’une rigidité parfois extrême, mais dont la solidité donnait la mesure des partitions les plus démesurées. Le pianiste français d’origine bulgare s’est éteint à l’âge de 82 ans, dimanche à Lugano, où il s’était établi il y a presque vingt ans.
Un certain dépouillement expressif, presque une sécheresse, voilà ce qui a parfois été dit de cet ex-enfant prodige, né à Sofia en 1929. Certaines de ses lectures de Chopin (la 2e Sonate), très frontales, frisent la brutalité. Mais il suffit de s’immerger dans l’adagio de ce 1er Concerto de Brahms gravé avec Riccardo Muti et le Philadelphia Orchestra pour saisir combien Weissenberg est consumé par une volonté de bannir tout épanchement superflu, et de toucher à l’essence du répertoire romantique.
Fuir les camps allemands
Au-delà de la rigueur charpentée de son jeu dans les œuvres virtuoses (incomparables Préludes de Rachmaninov), il y a chez Alexis Weissenberg une manière de tourner le dos à la fragilité qui tient de la profession de foi.
En 1941, lui et sa mère sont internés dans un camp par l’occupation allemande alors qu’ils tentent de fuir vers la Turquie. «Le silence, le chant, les pleurs», se souviendra plus tard le pianiste. Il joue Schubert sur un vieil accordéon et parvient à gagner la sympathie d’un officier sensible à la musique, qui les aide à rejoindre Israël.
Après des études au Conservatoire Jerusalem, Alexis Weissenberg gagne les Etats-Unis pour se former à la Juilliard School de New York. Il reçoit les conseils d’Arthur Schnabel, compte parmi les protégés de l’emblématique Vladimir Horowitz.
Ses débuts aux côtés de George Szell et du Philharmonique de New York le projettent sur le devant de la scène internationale, en 1947.
Succès, tournées, renommée. Weissenberg supporte mal cette gloire soudaine. Entre 1957 et 1966, il s’éloigne de la scène et évite les apparitions publiques, rattrapé par une fragilité qu’il répugne peut-être à laisser paraître en concert.
Dans les années 1990, l’enseignement prend de plus en plus d’importance, à Harvard et en Suisse. Ce sont les symptômes de la maladie de Parkinson qui l’éloigneront définitivement du piano.
Dernière édition par Bridget le Ven 13 Jan - 0:50, édité 1 fois
Gérardmer777
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Sujet: Re: ALEXIS WEISSENBERG Mar 10 Jan - 11:06
J'apprends la nouvelle avec émotion et compassion. Il fut un pianiste trés présent en son temps et j'eu la chance de l'entendre lors d'un Festival de Prades ...
Il fut assez controversé dés qu'il fut célèbre (!) : les "critiques" décrétèrent qu'il jouait moins bien .
Ses deux pianos Steinway (Phénomène I et II) un pour chaque côté de l'Atlantique, les Radioscopies avec Jacques Chancel, l'excellent film où il interprète le "Pétrouchka" de Stravinsky, ...tout ce succés et le mystère du personnage, lui valurent des jalousies féroces et incompréhensibles.
Les cds (EMI)restent pour prouver que sa place d'interprète original est libre. :6qzwpya2.gif:
Bridget
Nombre de messages : 2631 Age : 73 Localisation : Paris Date d'inscription : 13/05/2008
« On ne découvre pas la musique, on se découvre en musique. C’est une différence très importante… »
L’auteur de cette phrase vient de s’éteindre à 82 ans dans sa maison de Lugano en Suisse… Alexis Weissenberg était un grand pianiste et un homme d'une vive intelligence.
Pour Karajan, il était l’un des meilleurs de notre temps. Un talent qui côtoiera les plus grands maestros : William Steinberg, Georges Szell, Sergiu Celibidache, Eugène Ormandy, Victor de Sabata, Lorin Maazel, Claudio Abbado, Stanislaw Skrowaczewski, Seiji Ozawa, Leonard Bernstein, Georges Prêtre, Herbert von Karajan, Carlo Maria Giulini ou bien encore Georg Solti.
Durant les années 70 et 80, invité régulier du fameux Grand Echiquier de Jacques Chancel, sa notoriété dépassera même la sphère classique.
A son répertoire, Beethoven, Brahms, Debussy, Schumann, Tchaïkovski et Liszt notamment, mais aussi Chopin, Rachmaninov et Bach.
Deux vidéos pour lui rendre hommage. La première : en 1965, un petit film avant-gardiste signé Åke Falck, assistant de Bergman, saisit Weissenberg, à Stockholm, dans les trois mouvements de Petrushka de Stravinsky.
La version est saisissante. Et Karajan, assez subjugué, l’invite immédiatement à se produire avec sa Philharmonie de Berlin.
Sur la seconde vidéo, Weissenberg évoque la musique en général dans de bien beaux termes. Une interview où il interprète le Concerto pour piano n°3 de Rachmaninov :