liliane Admin
Nombre de messages : 19569 Age : 50 Localisation : dans la galaxie Date d'inscription : 02/05/2008
| Sujet: PRIX MEDICIS 2010 Mer 3 Nov - 19:26 | |
| La romancière toulonnaise Maylis de Kerangal décroche le MédicisLe dernier roman de Maylis de Kerangal est en lice pour le Goncourt dont la liste passera aujourd'hui de quatorze à huit oeuvres. Et le Médicis est attribué à... Maylis de Kerangal. La romancière toulonnaise, également en lice pour le Goncourt, a reçu aujourd'hui le prestigieux prix littéraire pour Naissance d'un pont, son dernier livre paru aux Editions Verticales. Agée de 43 ans, Maylis de Kerangal a été éditrice de littérature jeunesse et a collaboré à des guides de voyage, avant de plonger dans l'écriture. Son précédent roman, Corniche Kennedy (sélection Médicis, France Culture/Télérama, finaliste du prix Fémina 2008) avait déjà été salué par la presse et le public. http://www.varmatin.com/article/derniere-minute/la-romanciere-toulonnaise-maylis-de-kerangal-decroche-le-medicis | |
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liliane Admin
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| Sujet: Re: PRIX MEDICIS 2010 Mer 3 Nov - 19:32 | |
| Une telle déflagration littéraire ne passe pas inaperçue. Il y a deux ans, Maylis de Kerangal avait déjà donné à entendre sa petite musique intrigante avec son roman Corniche Kennedy, dont le motif central consistait en des plongeons d'adolescents décidés à « coïncider avec tout ce qui respire ». Mais là, sursaut, propulsion, éclosion : Maylis de Kerangal s'impose, avec un roman déclamatoire au suspense haletant, qui s'entend avant de se lire, tant la langue y est musicale et tripale. On imagine bien la voix d'Alain Cuny, peut-être à cause des prénoms claudéliens des personnages : Sanche, Soren, Summer... Ou celle de Denis Lavant, qui traduirait à merveille la folie funambulesque et animale du livre. Ecrit à rebours et plein d'allant, Naissance d'un pont s'entend d'abord au sens propre : venus de Chine, de Bobigny, du Kentucky ou de Russie, des hommes et des femmes font converger leurs solitudes pour travailler à la construction d'un pont autoroutier, dans la ville de Coca, encore timide mais décidée à devenir tentaculaire. Comme les adolescents de Corniche Kennedy, le chef de projet rêve de coïncider avec tout ce qui vibre : « Je ne veux pas du sabre de flamme, de faisceaux qui sculptent, d'ampoules qui appuient, toute cette saloperie de grandiloquence, les tours ne seront pas éclairées jusqu'au sommet afin qu'on puisse penser qu'elles se prolongent dans la nuit, le tablier sera un simple trait comme une ligne de fuite, on fera toucher les matières, le fleuve, la ville, la forêt... » Sensible aux déviances qui se transforment en droiture, aux imperfections touchées par la grâce, à l'anonymat qui révèle les êtres au grand jour, Maylis de Kerangal propose une visite de chantier hors du commun, sans casque ni combinaison de protection. Attention aux escarbilles, étincelles, coups de foudre et chutes d'humeur : les têtes pensantes et les athlètes du béton sont des bombes à retardement dont le décompte intime cliquette magistralement, dans la torpeur d'une nature vampirique. « Leurs peaux que l'obscurité fusionne prennent même température et mêmes nuances carbone, ils se tendent une main jusqu'à se toucher par-dessus le lit, jusqu'à se rapprocher l'un contre l'autre, alors c'est le grand tâtonnement, l'opéra tactile, et les corps à fragmentation multiple qui se débrouillent parfaitement dans la pénombre. » Dans un état d'ivresse désenchantée, au plus près du désir et de la peur, Maylis de Kerangal constate l'insoutenable impossibilité de fuir. Pour elle, un seul salut : savourer le lyrisme consolant du présent, absorber la lumière qui précède la disparition. Marine Landrot Telerama n° 3162 - 21 août 2010 http://www.telerama.fr/livres/naissance-d-un-pont,59088.php | |
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