DA SILVA l'ascension

MUSIQUE Da Silva : les affres de l'absence
Publié le jeudi 19 novembre 2009 à 06h00

Da Silva réussit parfaitement son virage collectif. Dans « La tendresse des fous », les chansons font souffler la tempête et les mélodies se révèlent plus accueillantes que par le passé. Un troisième album habité par la mélancolie et hanté par l'absence.

PROPOS RECUEILLIS PAR PATRICE DEMAILLY > patrice.demailly@nordeclair.fr

Peut-on parler ici de nouveau départ ?

Totalement. J'avais enregistré les deux albums précédents chez moi. Ce qui m'intéressait auparavant, c'était de garder vraiment l'intensité de l'interprétation guitare-voix. Je ne voulais pas, là, refaire le même disque. J'avais envie de nouvelles sonorités comme un quatuor à cordes, des cuivres, un clavecin... Je ne voyais pas tout ça rentrer dans ma cuisine (rires).

C'est la première fois que vous travaillez en équipe. Comment l'avez-vous vécu ?

Cela signifiait pour moi se mettre en danger. En travaillant en équipe, on peut diluer parfois le propos de la chanson. Le plus difficile, c'est de ne pas la démolir.
J'étais un peu craintif au départ, mais finalement ça s'est excessivement bien passé. De toute façon, il fallait sortir du cocon dans lequel je m'étais confortablement installé.

Vous vous êtes entouré de Dominique Blanc-Francard et Bénédicte Schmitt, un duo qui a fait ses preuves (Camille, Benjamin Biolay, Raphaël..., ndlr).

Je me suis dit : quitte à m'entourer, je prends les meilleurs. Aux arrangements, il y a aussi Joseph Racaille. J'ai voulu travailler avec lui pour les cordes. Ce qu'il a fait pour Bashung sur Fantaisie Militaire, c'est exceptionnel. On s'est tous mis - et moi le premier - au service de la chanson.

« Je suis obnubilé par les questions existentielles » Votre patte reste néanmoins significative...

Je suis autodidacte à la guitare. J'ai appris à jouer d'une certaine façon et je suis donc marqué. Quant à l'écriture, c'est quelque chose que je ne travaille pas. Elle est plus viscérale qu'intellectuelle.

Votre précédent disque s'intitulait « De beaux jours à venir ». Or, on n'a pas l'impression qu'ils sont vraiment arrivés...

Je suis quelqu'un d'assez gai au quotidien. Mais quand je me retrouve dans l'intimité, je suis atteint d'une pathologie chronique qui s'appelle la mélancolie. Je ne fais pas partie de cette chanson française qui parle du quotidien, du voisin... Je suis obnubilé par les questions existentielles de la vie et les sentiments. Il n'y a que ça qui m'intéresse.

Êtes-vous obsédé par la durée de l'amour, un thème fréquent chez vous ?

Dans les meilleurs des cas, on peut passer toute sa vie avec quelqu'un. Mais même dans ce schéma parfait, il y en a un des deux qui va mourir avant l'autre. C'est pour ça que je dis : « Si la vie est terrible, les journées peuvent être si belles ». Il faut être épicurien, profiter de l'instant parce qu'il y a quelque chose de fatal dans la vie : la mort et la séparation d'avec l'autre.

Le disque est traversé par l'absence. Cette récurrence est-elle volontaire ?

Je m'en suis rendu compte après, mais le mot absence apparaît dans sept chansons. Un album, c'est l'humeur d'un artiste, une période de sa vie. Quand on fait 280 concerts en trois ans, la boussole à l'intérieur explose. On se réveille dans des lieux dont on ne se souvient plus.

Comment vous arrangez-vous avec l'absence ?

Il y a des gens qui, quand ils ont des peines ou des traumatismes, font des deuils. Moi je n'ai jamais su faire ça, je porte mes croix. Au lieu d'être triste, je me dis qu'il vaut mieux que la mélancolie soit mon pote. J'ai l'oreille gauche qui est bousillée, avec des sifflements permanents. J'aurais pu me prendre la tête, mais je me dis que c'est mon sort.

« La moisson » évoque cette Chinoise qui a préféré la défenestration à l'expulsion. Plus un hommage qu'un engagement ?

Je ne fais pas non plus partie de cette scène engagée où on lève le poing à tout va. Je n'aime pas les trucs démago. Une chanson est un format trop réducteur et j'ai donc préféré lui rendre hommage avec un texte dont j'ai essayé qu'il soit le plus poétique possible. J'ai lu ça dans la rubrique des faits divers et quand l'être humain finit dans la rubrique des chiens écrasés, ça te fait un peu mal.

La musique est-elle essentielle à votre bien-être ?

Je pense qu'elle me sauve de pas mal de choses.
En tout cas, elle donne un sens à ma vie. En même temps, elle me perd aussi.

Qu'entendez-vous par là ?

Je ne considère pas la musique comme un métier, mais comme une passion. Je n'ai pas de plan de carrière. Le jour où je n'ai plus la flamme, j'arrête.

http://www.nordeclair.fr/Loisirs/Musique/sorties_disques_-_rencontres/2009/11/19/musique-da-silva-les-affres-de-l-absence.shtml

Auteur de trois albums studio chez Tôt ou Tard (dont le dernier, La tendresse des fous en 2009), Da Silva vient de signer chez Pias Recordings France. Côté éditions, il a conclu un pacte de préférence avec Sony/ATV. En revanche, pas de changement niveau tourneur. L'artiste vient de terminer, début décembre, une tournée de soixante-dix dates avec Bleu Citron, avec lequel il travaille depuis ses débuts. La prochaine tournée se déroulera dans la foulée de la sortie du nouvel album, prévue à l'automne.

http://www.musiqueinfo.com/news/buzz/da-silva-chez-pias-recordings-france-et-sony-atv.html

Orchestré par Yann Arnaud (Air, Syd Matters), La Distance nous livre 11 joyaux sonores aux accents pop, et ce, sans jamais renier la profondeur de texte propre à l’artiste. A l’image du single Les Stations Balnéaires, les compositions de Da Silva sont belles, puissantes, mélodiques et déchirantes. L’écriture s’est affinée et se veut désormais sans retenue. Un artiste à part, sans aucun doute.





http://www.pias.com/fr/da-silva-nouvel-album-la-distance-sortie-le-9-janvier-2012/