L'histoire du Papier d'Arménie Auguste Ponsot, en voyage dans l'Empire Ottoman, se rend en Arménie, appartenant alors au gigantesque empire. Il découvre que les habitants parfument et désinfectent leurs maisons, en faisant brûler du Benjoin, résine d'un arbre (styrax) connu aujourd'hui des parfumeurs pour son odeur puissante, originale et proche de la vanille.
"Laisser brûler
Les p'tits papiers
Papier de riz
Ou d'Arménie
Qu'un soir ils puissent
Papier maïs
Vous réchauffer"
SERGE GAINSBOURG
De retour en France, Auguste Ponsot décide d'importer cette pratique traditionnelle et écologique. Associé au pharmacien Henri Rivier, il travaille sur une méthode "moderne" afin d'adapter l'usage du papier aux mœurs occidentales. Un but écologique, pratique et peu onéreux, un produit simple, utile, odorant et antiseptique pour chasser les mauvaises odeurs. Henri Rivier découvre qu'en faisant dissoudre le Benjoin dans de l'alcool à 90°, on obtient une odeur persistante. L'ajout de parfums donne un mélange aromatique agréable et tenace ; reste alors à trouver un support : le papier buvard absorbe le mélange, tout en conservant l'odeur originelle du Benjoin, et en brûlant lentement sans faire de flammes.
Après de nombreuses tentatives, le produit recherché est enfin au point. Le Papier d'Arménie est couronné de succès, notamment à l'Exposition d'Hygiène (1888), ainsi qu'à l'Exposition Universelle (1889). Au cours de celle-ci, persuadés de l'efficacité et du caractère antiseptique du papier, les deux inventeurs placèrent deux morceaux de viandes sous deux cloches, faisant brûler dans l'une du Papier d'Arménie. Au bout d'une semaine, la viande ayant "respiré" les effluves du papier étant encore consommables, alors que l'autre était faisandée. Une expérience qui a marqué les esprits.
UN PRODUIT NATURELLe Papier d'Arménie apparaît comme une solution beaucoup plus écologique et économique que les aérosols classiques, outre ses qualités hygiéniques et antiseptiques. D'usage très facile et fabriqué exclusivement à partir de produits naturels, il existe aujourd'hui encore sous la même présentation qu'à la fin du XIXe siècle : un petit carnet à la couverture de couleur jaune et vert, contenant les petites feuilles de papier détachables de couleur brune.
Le Papier d'Arménie ne serait pas devenu ce qu'il est sans son principal composant : la résine de styrax. Cet arbre, peu connu du grand public, pousse dans les forêts de l'Extrême-Orient, notamment dans l'ancien Laos où il est encore largement cultivé aujourd'hui. Le styrax peut atteindre 20 mètres de hauteur, son feuillage est clairsemé et ses feuilles lisses dessus et velues dessous. Lorsque le styrax atteint un diamètre d'environ 15 cm, on l'entaille au coupe-coupe afin de récolter sa résine, ce suc qui s'écoule par les entailles ainsi faites dans son écorce. La résine, d'un blanc légèrement jaune, est recueillie dans une parcelle rectangulaire de l'écorce faite lors de l'entaille. Ces étapes se déroulent entre le mois de juillet et le mois de janvier de l'année suivante. Ainsi, après plus de 6 mois, la résine peut être récoltée, sous la forme de "larmes". C'est le benjoin brut. 1 à 3 kilos de benjoin sont extraits par arbre et par an. Il contient environ 25% d'acide benzoïque, responsable de ses propriétés antiseptiques.
UNE FABRICATION ARTISANALE
Depuis plus d'un siècle, les carnets de Papier d'Arménie sortent de l'atelier de Montrouge selon le même ritusel. Ce produit est l'exemple typique d'une méthode de fabrication traditionnelle et familiale : Mireille Schvartz, l'arrière petite fille du pharmacien Henri Rivier, préside aux destinées de la Vieille Maison. Le matériel d'origine est encore utilisé de nos jours pour la fabrication des carnets. Pas moins de trois mois pour confectionner du Papier d'Arménie : le responsable du laboratoire vérifie les provenances des différentes essences nécessaires à sa fabrication, et étudie puis contrôle chaque arrivage. Il procède ensuite, après vérification et sélection des composants, aux mélanges et assemblages, puis il laisse macérer le mélange aromatique. Pendant cette période, le papier buvard trempe dans une solution saline qui l'empêchera de brûler trop rapidement. Le papier séjourne ensuite dans la décoction, puis il est séché en étuves. Les grandes feuilles sont alors mises sous presse, perforées puis découpées et mises en carnet.
LE SITE DU PAPIER D'ARMENIE :http://www.papierdarmenie.fr/
L’odeur du Papier d’Arménie flotte dans notre inconscient collectif. Ce n’est pas un hasard car depuis 1885, Papier d’Arménie transporte dans son incandescence les charmes de l’Orient sous nos cieux.
L’idée naît à la fin du XIXe siècle dans l’imaginaire d’Auguste Ponsot lors d’un séjour dans l’Empire Ottoman. Avec son associé, le pharmacien Henri Rivier, il met au point la formule, évocation olfactive des maisons arméniennes.
À l’occasion de l’Année de l’Arménie en France, le parfumeur Francis Kurkdjian crée pour Papier d’Arménie une édition du mythique carnet, manière de faire partager sa vision des symboles poétiques de ses racines.
Pour donner naissance à ce « carnet de voyage » olfactif, il a laissé vagabonder son inspiration : la couleur de la couverture est déclinée dans le bleu du drapeau national, symbole du ciel arménien. Le graphisme est inspiré de motifs issus de l’art décoratif traditionnel. Il est enrichi d’une chatoyante lettre ornementale dite terchna-kir, contraction des mots « oiseau » et « lettre », hommage à la beauté de la calligraphie arménienne.
Dans ce décor, l’encens, la myrrhe, les notes boisées et la vanille s’évadent en volutes délicieuses, délivrées dès qu’une flamme touche le papier. Une évanescence « habitée » s’en dégage, hymne contemporain à une Arménie fantasmée.